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« Aléa Drumman » : dans le sillage de Barbe Noire

Jonathan Fanara Responsable des pages Littérature, Essais & Bandes dessinées et des actualités DVD/bluray

Les éditions Glénat publient le premier tome du diptyque Aléa Drumman, intitulé « L’Héritage de Barbe Noire ». Le scénariste Dobbs et la dessinatrice Siamh reviennent sur la légende de Barbe Noire, qu’ils perpétuent en mêlant récit historique et fantastique.

Au crépuscule du XVIIème siècle, dans un monde où les voiles blanches s’étendaient à perte de vue, un homme, d’une apparence sombre et inquiétante, se détachait de la foule. Son nom : Edward Teach, mais tous le connaissaient sous le pseudonyme de Barbe Noire, un pirate dont la renommée dépassait les frontières des océans. Son navire, le Queen Anne’s Revenge, jadis français, fut arraché aux mains du destin pour voguer sous pavillon noir. Quarante canons pour cracher la mort, une flotte pour l’accompagner, et des centaines d’âmes pour le servir… Il incarnait le cauchemar des mers des Antilles et de l’Amérique du Nord. Dans l’ombre de Benjamin Hornigold, un autre pirate illustre, Barbe Noire apprit les ficelles du métier, et en 1717, il hérita du flambeau de la terreur. Ses exploits se succédèrent, faisant trembler les navires marchands et les puissances coloniales, témoins médusés de la puissance d’un homme caractérisé par une barbe épaisse et des mèches de chanvre embrasées.

En 1718, l’audace de Barbe Noire atteignit des sommets inégalés, paralysant pendant une semaine le port de Charleston, en Caroline du Sud. Pris en otage, les habitants ne furent libérés qu’en échange d’une rançon. Mais toute légende a une fin, et celle de Barbe Noire ne fait pas exception. Alexander Spotswood, gouverneur de Virginie, lassé de voir l’ombre du pirate planer sur ses côtes, envoya le lieutenant Robert Maynard à sa poursuite. Le 22 novembre 1718, les deux forces s’affrontèrent lors de la bataille d’Ocracoke, où le sort funeste de Barbe Noire fut scellé. Le trépas du pirate légendaire marqua la fin d’une ère et le début d’une autre. Son héritage perdura et se perpétua à travers les récits et les légendes, qui ont traversé les siècles et les frontières, gravant à jamais dans les mémoires l’image d’un homme qui régna en maître sur les mers et les océans, symbole de l’âge d’or de la piraterie.

Avec « L’Héritage de Barbe Noire », premier tome du diptyque Aléa Drumman, Dobbs et Siamh y vont eux aussi de leur proposition graphique pour prolonger le mythe d’Edward Teach. Ils décident de convier sa fille Aléa dans une quête mâtinée de fantastique, censée la mener à une figure paternelle qu’elle pensait disparue à jamais. Cette dernière porte en elle un esprit de vengeance et sur elle un pendentif mystérieux. C’est dans l’ombre des récits d’aventures que ses péripéties maritimes vont s’inscrire, la menant à une découverte glaçante : la tête de son père, Barbe Noire, est toujours en vie, prisonnière d’une malédiction macabre, sous la coupe d’un capitaine l’appréhendant tout au plus comme une relique précieuse.

Aux côtés de Robert, bourreau repenti, Aléa se lance dans une quête périlleuse pour retrouver et libérer son père. Mais les vents du destin soufflent souvent en des directions imprévues, et ses désirs ne trouveront pas toujours écho dans les faits. L’ambiance est travaillée, soignée, envoûtante. Et les dessins de Siamh, habillant des planches très ingénieusement agencées, font le lit de ces aventures maritimes nappées de fantastique. Dobbs et Siamh prennent appui sur un personnage féminin fort, résilient, capable de duplicité. Ils la confrontent à des épreuves douloureuses – et des créatures monstrueuses –, auxquelles elle fait face avec une détermination qu’elle semble partager avec son illustre géniteur. De bon augure pour la suite, malgré un déficit relatif de surprises.

Aléa Drumman : L’Héritage de Barbe Noire, Dobbs et Siamh
Glénat, avril 2023, 56 pages

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3.5
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