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Bobbypills

Peepoodo and the Superfuck Friends : normalisation et bienveillance autour de la sexualité

Depuis quelques années, le studio Bobbypills s’est donné la mission de produire des dessins animés à destination des adultes. Il est de ce fait, un des premiers et seuls studios français et européen à produire ce genre de contenu. Nous leur devons notamment des séries comme Vermine, série du dessinateur Balak sur les aventures d’un policier sauterelle, Crisis Jung ou la série qui nous intéresse aujourd’hui : Peepoodo.

La sexualité est un sujet tabou dans toutes les sociétés, même celles qui paraissent garantir les droits individuels. En atteste le recul de l’accès à l’IVG aux Etats-Unis en 2022, permis par la Cour Suprême américaine, qui est la preuve que les sujets du sexe, de l’avortement, de la contraception et de l’éducation sexuelle en général, demeurent un combat à mener.

Peepoodo est une série de deux saisons, produite entre 2017 et 2021 par le studio Bobbypills. Le succès de la première partie n’ayant pourtant pas trouvé de plateforme de diffusion, non à cause de son caractère pornographique mais à cause de la présence d’organes génitaux visibles à l’écran, le visionnage est possible sur le site Bobbypills gratuitement. Balak, le créateur du petit hamster rose s’est donné pour tache de nous parler de sexualité de manière éducative et surtout bienveillante.

L’auteur a déjà travaillé sur des dessins animés comme les Kassos et Last Man. La première est une websérie connue pour son détournement des personnages d’animation ou de figures connues (exemple : Le Lapin du métro parisien) en les montrant chez l’assistante sociale. La nature des personnages est très orientée « adulte » par la caricature sexuelle tels Candy (dite Sandy) qui a une addiction au sexe ou justement le lapin du métro parisien qui semble être quelque peu masochiste.

Pourtant, ces travaux n’ont pas la même résonance que Peepoodo, surtout durant le mois des Fiertés LGBTQ+. En effet, la série a un pitch des plus banals…

Synopsis : Peepoodo est un petit hamster rose qui vit dans la forêt jolie avec ses amis. Il vit des aventures toutes plus drôles les unes que les autres en étant aidé et entouré du Docteur Lachatte, un médecin qui a réponse à tout, Kévin, un ours polaire et Groscosto un yack des plus limités…

Les découvertes de Peepoodo et de sa bande se concentrent sur la sexualité : le plaisir masculin, féminin, les fantasmes, la masturbation, les règles, l’Amour, la sexualité des personnes âgées, les maladies et infections sexuellement transmissibles, l’orientation sexuelle et l’identité de genre. Le tout est saupoudré d’une dose d’humour à la Balak.

Nous nous focaliserons seulement sur deux ou trois épisodes de la série qui montrent la bienveillance et la normalisation des diverses orientations sexuelles et des identités de genre. Nous vous laissons le loisir de découvrir les autres épisodes.

Une histoire d’amour comme une autre… : Saison 1, épisode 8 : Peepoodo est amoureux

Dans cet épisode, Peepoodo a un love interest. C’est un hamster qui s’appelle Tonio. Bien que l’histoire soit banale,  il faut rappeler à quel point il reste rare de montrer des couples homosexuels et en plus de manière aussi démonstrative. Ce coup de foudre est normalisé dans tous ses aspects. C’est ce qui en fait un très bon épisode. Il n’introduit même pas le fait que Peepoodo aime un individu du même genre, juste que Peepoodo est amoureux de quelqu’un. Même si la thématique de l’épisode est l’Amour, il est important que le spectateur constate de lui-même que ce sentiment est universel et qu’il transcende des « normes » obsolètes.

Un coming-out transgenre, les ABC de la Bienveillance : Saison 1, épisode 14 : Dr Peepoodo

Parler de couples du même genre est un grand pas en avant. Mais parler de transidentité est définitivement la raison qui rend cette série incontournable concernant l’identité de genre. Par définition, la transidentité est le fait de ne pas se reconnaitre dans son genre attribué à la naissance. Dans cet épisode, le docteur Lachatte part en voyage et Peepoodo la remplace au cabinet. Kévin se présente à celui-ci, ne se sentant pas très bien. Mais le manque d’écoute de Peepoodo le mène à renoncer à se confier.

Sans montrer la nature des confidences de Kévin, le Dr Lachatte se montre ouverte, à l’écoute et l’exhorte à la parole. Ainsi, il fait son coming out en tant qu’ Evelyne. A ce coming-out, même Groscosto dont la mentalité est généralement rétrograde, réagit par un « Elle est magnifique », les yeux brillants. Il n’y a pas de jugement de la part des proches d’Evelyne, pas utilisation de dead-name (l’ancien nom que la personne transgenre n’utilise plus) et le pronom qu’elle a choisi est correctement utilisé (en l’occurrence, ici, Evelyne se définit au féminin, donc son pronom est « elle ») .

Malgré la durée de l’épisode (4 minutes 30 secondes), nous avons un ensemble de points vitaux énoncés : l’aide de la personne transgenre à la parole, la bienveillance durant le coming-out, l’utilisation des bons pronoms. Cela peut paraître si simple, voire simpliste, mais cet épisode ne fait que montrer que le dialogue et la communication (encore une fois) sont les clés. La communauté transgenre est parmi les plus stigmatisées, avec des membres dont la santé mentale est assez fragile et le taux de suicide est très élevé. Voir ce genre de traitement pourrait empêcher des individus d’avoir des mots maladroits par erreur mais qui marqueraient les personnes trans.

Une représentation de rapports sexuels dans des couples non-hétérosexuels : Saison 2, épisode 3 : Dans l’espace, personne ne peut vous entendre crier

Dans cet épisode, les personnages de Peepoodo, Groscosto et Evelyne sont dans l’espace. Et une créature rentre dans leur vaisseau. Elle les maintient dans un sommeil où elle se nourrit de leurs fantasmes.

Ainsi, Peepoodo se retrouve dans une fiction où il est habillé en lycéenne japonaise et où il a des rapports avec Tonio. Peepoodo est un hamster mâle mais il est habillé en fille. Cela n’entrave en rien ce qu’il est. Aucun jugement n’est émis sur lui. La mise en scène les traite sous un aspect de normalité, et surtout fictionnel. Un fantasme n’est pas forcément un objet dont on souhaite la réalisation. Le docteur Lachatte, elle, fantasme sur une nonne, elle est montrée en plein ébat avec celle-ci. Même si ce personnage est en lui-même un objet de fantasme dans la fanbase, elle n’est pas montrée comme un objet, mais comme actrice dans la série.

Finalement, Evelyne est montrée avec un personnage masculin en plein ébat, normalisant donc la sexualité des personnes transgenres. L’idée est énoncée comme telle : il n’y a aucune barrière à un désir amoureux et sexuel consensuel, surtout pas celle du genre ou du jugement porté par la société. De plus, c’est Evelyne qui sauve tout l’équipage.

Le sel de la Forêt Jolie

En fait, dans cette série, ce n’est pas plus le fait que les personnages soient des animaux qui la rend crédible au niveau éducatif. Cela y participe grandement, puisque cela donne un ton décontracté, comme si tout commençait par une vaste blague. Le côté innocent plus qu’enfantin de Peepoodo lui permet une approche de la sexualité sans avis préconçu, ni préjugé acquis.

De plus, les épisodes qui encadrent les pratiques ou thèmes sexuels sont aussi jalonnés de discours sur la déconstruction de soi, de ce que la société dit acceptable, d’un établissement de rapport au corps sain, en plus de l’humour et d’un côté décalé qui leur sont propres.

Ce qui rend cette série attractive est qu’elle a été créée à destination de n’importe qui ayant envie d’apprendre sainement ce qu’est la sexualité sans aucune distinction de genre ou d’orientation sexuelle. Les orientations sexuelles et les identités de genre sont incluses sans les distinguer des autres, ni créer de cases ou de vocabulaire compliqué ou orienté. Elles ne sont pas non plus mises en avant de manière aguicheuse pour attirer le public.

Conclusion

Que l’on aime ou que l’on n’aime pas Peepoodo, c’est quand même une des seules séries à combiner éducation sexuelle, humour, bienveillance et intégration de toutes les possibles attirances, orientations et identités. Ainsi, nous vous encourageons vivement à regarder cette mini-série de deux saisons. Si vous souhaitez approfondir le sujet, nous vous souhaitons vivement d’écouter le podcast « N’importe Cul » de Mina et Jade sur Spotify.

Fiche technique:

Crée par: Balak

Ecrite par: Nicolas Athané, Balak, Brice Chevillard

Voix: Brigitte Lecordier (Peepoodo), Jeanne Charier (Docteur Lachatte), Brice Chevillard (Grocosto et Tonio), Balak (Kévin/Evelyne), Mr Lapine (Vincent Ropion)

 

Sources pour écrire cet article:

Bobbypills, about us – bobbypills.com

Balak –wikipedia

Peepoodo and the superfuck friends, –wikipédia– ; -imdb-

Visionnage des épisodes sur bobbypills.

Le podcast N’importe Cul, épisode 38 de Jade et Mina –Spotify