Il faut d’abord confesser que, sortie en 2004, Veronica Mars est un sérieux plaisir coupable d’ado. Parce qu’on adorait aimer-détester Logan, parce que Veronica était vraiment trop forte et impertinente ! On passera sur l’existence récente d’une saison 4 plus que discutable (Logan !), mais force est de constater que pour une série d’ados, Veronica Mars se pose en petite pépite réjouissante sur les affres d’une période de lycée pas toujours ragoûtante ! Et plus encore…
She’s a marshmallow
Si enfance et adolescence se confondent et que les héroïnes définissent les petites filles comme les contes autrefois alors Veronica Mars est la série parfaite pour grandir en fracassant tout. Elle nous apprend à être irrévérencieux et à refuser de se laisser dicter une conduite toute faite. C’est déjà pas mal. En plus, c’est souvent drôle, un poil mélodramatique sans trop en faire non plus (parce que notre héroïne est rancunière mais pas pleurnicharde). Entre ça et Gossip Girl ou encore Un dos tres, séries sorties entre 2002 et 2007, on a vite fait son choix. Ici, ce sont surtout la galerie de personnages secondaires qui marquent la série et entourent notre marshmallow de Veronica Mars. On y découvre surtout des caïds au grand cœur et des gentils pas si gentils (bon Wallace mis à part, d’accord), ce qui rend la série assez dark tout en étant par moment totale teenage ! Mais ce qui fait sa force, c’est que Veronica a du recul sur sa propre situation. On la voit ainsi construire une histoire d’amour et se moquer de ses propres choix, ne pas se définir que par ses histoires, se construire seule à la force de son mental (et grâce à son super papounet dont elle a parfois du mal à avaler les failles). A travers ce personnage, c’est l’Amérique elle-même et son système injuste, très « star system »( coucou la merveilleuse famille Echolls !) justement qui est critiquée, la violence n’est jamais cachée et elle n’est pas toujours là où on l’imagine. D’où les choix radicaux faits dans la saison 4, qui nous a sortis un peu trop brusquement de l’enfance finalement. Pour Veronica la sortie de l’enfance a été brutale elle aussi, presque trop, avec la mort de sa meilleure amie dès le début de la série. Sortie de l’ombre aussi de ce personnage très envahissant comme on le verra dans la suite de la série, Veronica sort de sa coquille.
She’s a feminist ?
Qui n’a pas rêvé de devenir détective à Neptune, une sorte de Gotham un poil moins cauchemardesque, où le crime a tous ses droits, où un seul faux pas peut faire basculer un chouette shérif dans le côté obscur de la ville ? Voilà l’excellente question que pose la série, ne clivant pas simplement les plus riches et les plus pauvres puisque Veronica elle-même oscille sans cesse entre les deux états, défendant la veuve et l’orphelin et se prenant d’amour pour les fils à papa dont elle révèle, là encore, le côté obscur tout en en développant la tendresse. La force de la série est que si Veronica a différentes relations, de Duncan à Piz en passant par Logan ( « garçon que, entre parenthèses, je déteste » et sans oublier Léo donc !!!), elle ne se définit pas que par ces relations, elle évolue au gré de ces rencontres et doit apprendre à vivre avec et contre eux. Ce qui donnera lieu à des ruptures plus ou moins digérées, qui toujours sont une nouvelle avancée pour le personnage, quitte à refaire mais jamais à l’identique, un peu comme avec le remake, notre cycle d’avril. Veronica est un véritable phénix qui avance avec indépendance, quitte à laisser des champs de ruines autour d’elle mais qui croit toujours à la force de la co-construction tout de même. Au-delà de ces thèmes rabattus, elle reste une des premières séries d’ados parfois ouvertement féministe en parlant du viol sans tabou et en étant du côté des filles qui ne s’en laissent pas compter. Ce ne sont ainsi pas que des petites choses fragiles ou provocantes qui subissent l’outrage. Et ça, pour une série de 2004, c’est quand même un bon point. Preuve de plus de la réussite des personnages secondaires, Parker se révèle un personnage complexe, entre sa superficialité apparente et la profondeur de sa résilience. Logan non plus ne s’y est pas trompé.
Une fin sans fin
Mais Veronica est tenace, la fameuse Parker l’apprendra à ses dépens, Logan aussi (toujours lui décidément). Ainsi, quand la série s’achève en 2007, après seulement trois saisons, le personnage est encore à la croisée des chemins, un peu comme les petits fans qui la regardent. Qui peut parier sur ce qu’elle deviendra finalement ? Et la force de ses rêves ? Ni le film sorti en 2014, ni la récente saison 4 ne répondent à cette question, tant la série n’a résisté qu’à son charme adolescent. Une chose est sûre, on n’échappe pas aussi facilement à Neptune, dont la réputation n’est pas prête de s’enjoliver. Terminons (presque) par cette phrase qui résume si bien ce qui fait le sel de la série et de son personnage, marquant pour celui ou celle qui grandit devant, « Veronica n’est jamais aussi bien que lorsqu’elle est outsider (…) si elle avait une relation parfaite, il n’y aurait pas de série ». L’occasion de donner la parole à la formidable interprète de cette héroïne, qui n’a jamais été aussi formidable que dans ce rôle d’ailleurs auquel elle apporte fraîcheur et pugnacité, même son rôle dans The Good place paraît fade à côté, c’est dire ! Ou alors peut-être qu’on a simplement grandi… Ce qui ne nous empêchera pas d’être présents, excités et peut-être même déçus en cas de saison 5… Une fin sans fin on vous a dit ! On ne se débarrasse pas si facilement de ses vieux amis, surtout quand « we used to be friend ». Ce portrait passionnant d’une jeune fille puis femme avec des enquêtes tenaces et bien documentées, n’est donc pas près de nous quitter, quel que soit son avenir télévisuel.