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Green Boys : parce que c’était toi, parce que c’était moi

Chloé Margueritte Reporter LeMagduCiné

Green Boys est la rencontre entre deux enfants qui construisent une cabane. Un peu comme dans Le Havre de Aki Kaurismäki (une pointe de burlesque en moins), il s’agit pour eux d’aller l’un vers l’autre, tout en douceur. On comprend à demi-mots, la traversée de deux ans qu’à été le « voyage » d’Alhassane. Cette rencontre est comme celle de deux planètes qui entrent tout à coup dans le même orbite, simple et poétique.

Synopsis : Green Boys pourrait être un “Petit Prince” du millénaire de l’exil. Alhassane, 17 ans, a quitté la Guinée et arrive seul en France après un éprouvant périple. Accueilli dans un village en Normandie, il rencontre Louka, 13 ans. Entre les deux garçons une amitié naît et s’invente jour après jour. Ce qui les sépare les lie tout autant que ce qui les unit. Durant l’été, ils construisent une cabane sur la falaise qui surplombe la mer. Comme une zone de liberté, elle sera un lieu secret de l’enfance et le refuge des blessures.

Rencontre au sommet des arbres 

Green Boys n’est pas l’histoire de deux petits hommes verts qui se croisent sur une planète lointaine. Pas de sabres lasers ici mais un arbre majestueux et la plaine qui l’entoure (qui surplombe la mer) et qui sera le terrain idéal de construction d’une cabane. On ne sait pas trop si les deux enfants y passeront un jour la nuit, ils ne sont pas trop d’accord pour savoir si le Diable viendra ou non. Alhassane ne convainc pas Louka même en poétisant sur l’air invisible qui nous entoure. Les questions du jeune Louka sont d’une belle douceur et d’une douce naïveté parfois : il veut savoir quel temps il faisait quand Alhassane est arrivé en France. Lui, se souvient surtout du « croissant au chocolat » que lui avait donné une dame. Sa vie depuis la France est une succession de moments où la main est tendue vers lui et d’autres où la justice le questionne, l’observe, le décortique. Alhassane pourtant avec Louka est comme un petit enfant qui pêche des crabes dont il a peur, qui rêve de devenir indépendant et mécanicien. Rien de plus que des instants suspendus où l’avenir est encore à tracer. La réalisatrice du documentaire, Ariane Doublet, pose sa caméra et ne dit rien, elle observe. Parfois d’autres protagonistes entrent dans le champ et construisent un moment avec Louka et Alhassane, toujours il est questionné sur son parcours, inlassablement. La réalisatrice pourtant s’attache à filmer la nature florissante, les bruits des animaux qui entourent les deux garçons et qu’ils commentent… Pas de téléphone portable, de jeux en ligne : juste deux enfants et la nature autour, à perte de vue.

Se savoir aimé 

La douceur qui se dégage de cette rencontre, associée à une chanson qui dit simplement « aimé et être aimé en retour », est une petite merveille. Parfois Louka raconte comment il aime la neige mais pas l’hiver, l’espoir que là-bas, en Afrique, il fasse toujours beau. Il essaye d’expliquer comment Alhassane et lui auraient pu se rencontrer en colonie de vacances et y construire ensemble des cabanes avant de camper dans la forêt. De Louka, on sait peu de choses sinon que la vie lui est douce. Pour Alhassane les choses sont un peu différentes mais il inspire tout de même le calme et la sérénité dans ce moment suspendu qu’est pour les deux garçons l’été qui vient. Plus tard, il lui faudra retrouver la jungle urbaine et se construire enfin une vie qui lui ressemble, qu’il désire ardemment. Et faire, peut-être, mais ce n’est pas pour maintenant lui dit une des rencontres, des choix difficiles. Pour le moment, la marée est descendante et sur la plage tout paraît suspendu à la rencontre entre un crabe apeuré et un homme qui l’est tout autant. La cabane devient une rose merveilleuse, une construction aussi solide qu’éphémère comme une métaphore de la vie que ces deux jeunes garçons construisent, enrichis de la rencontre qu’aura été leur fugace amitié (le film ne dit pas s’ils se recroiseront un jour, mais j’en doute). Clôturons avec les mots de Françoise Hardy : « On est bien peu de chose. Et mon amie la rose. Me l’a dit ce matin »

Au-delà du film

Le film doit son existence à l’association Des lits solidaires, voici un extrait du dossier de presse du film, pour en savoir plus:

« Des jeunes qui arrivaient de l’étranger dormaient dans la gare du Havre. Des gens ont commencé à les accueillir chez eux et
nous nous sommes rendus compte que nous étions plusieurs à le faire. Nous avons alors créé l’association Des lits solidaires.
C’est par ce biais que j’ai rencontré Alhassane que nous avons accueilli chez nous (…) Mais à partir du moment où ils m’ont ouvert la porte, on a formé un petit trio. Nous avons réfléchi au film que nous pourrions faire ensemble, de ce qu’ils voulaient y mettre ou pas. »

Le film est disponible en VOD depuis le 6 mai 2020.

 

Green Boys : Bande annonce

Reporter LeMagduCiné