Game of Thrones, saison 8, épisode 6 : And now, our watch has ended

Ça y est, Game of Thrones c’est fini ! La série la plus populaire de l’histoire fait ses adieux avec un ultime épisode déchirant qui n’en finira pas de diviser par ses choix, mais qui conclut en beauté ce phénomène planétaire.

All Good Things Come To An End, chantait Nelly Furtado en 2007. Douze ans plus tard, nous sommes bien d’accord, toutes les bonnes choses ont effectivement une fin. Game of Thrones tire sa révérence après neuf années où les passions se sont déchaînées, les spoils ont fusé, les discussions à la machine à café se sont enflammées. Un véritable phénomène de société à l’impact planétaire. Aucune autre série n’aura jamais rien réussi de tel. Jusqu’à repousser et redéfinir les limites de la série, à coup de spectaculaires batailles et de déferlements d’effets spéciaux.

Objet unique donc, qui, sans aucun doute, en appellera d’autres, au vu du succès tonitruant du show de HBO. Et comme tout phénomène de société, comme tout produit de masse, comme toute œuvre suscitant des passions déraisonnées : il y a division. Et pour sûr, ce final n’y échappera pas.

LE DEVOIR EST LA MORT DE L’AMOUR

Cet ultime épisode débute sur le visage horrifié et désespéré de Tyrion, errant entre ruines et cadavres calcinés par le barbecue de la veille déclenché par Daenerys. Kings Landing n’est que feu et cendres. L’hiver est bien terminé, mais l’aube est terne. Ce n’est plus de la neige, mais une cité en poussière. Le chaos va laisser des traces. Jon Snow essaye tant bien que mal de raisonner un Ver Gris plus déterminé que jamais à obéir aux ordres sanguinaires de sa reine. Tyrion continue d’errer jusqu’aux tréfonds du royaume déchu. Dans la seule lueur, la main d’or de son frère Jaime. Le dernier des Lannister retire les pierres et l’on aperçoit les deux corps de Jaime et Cercei. Magnifique séquence, d’une grande intensité émotionnelle, mettant en lumière encore une fois l’excellente partition de Peter Dinklage, implacable depuis la saison 1. Les larmes coulent des deux côtés de l’écran, et ce ne sera pas la dernière fois.

Daenerys, pas descendue de son égotrip libérateur et meurtrier, promet que la guerre n’est pas finie tant que les lances n’auront pas libéré « tous les peuples de Winterfell à Dorne, de Port-Lannis à Quarth, des îles d’Eté à la mer de Jade ». Le début de la tyrannie. Retour à la case départ à Westeros. Tyrion assume ses choix et défie la Mad Queen en jetant au sol son pin’s de Main du Roi. Passez par la case prison.

La scène de cachot qui s’ensuit entre Jon et Tyrion, scellera le sort de Dany. « L’amour est plus fort que la raison » lâche Tyrion. « L’amour est la mort du devoir » rétorque Jon Snow en citant Mestre Ameon. « Parfois, le devoir est la mort de l’amour ». Fin du game. Tyrion vient de planter une petite graine dans l’esprit de Jon Snow. « Vous devez choisir maintenant » lâche-t-il en dernier espoir. Jon Snow face à son destin.

LA LOYAUTÉ OU LA RAISON

Meurtri, Jon Snow rejoint sa douce-tata dans la salle du trône, enfin ce qu’il en reste. Alors qu’elle a à peine goûté au plaisir de s’asseoir sur le trône de fer et dans une dernière tirade passionnée et aveugle, Daenerys est poignardée en plein cœur. Jon nouveau régicide. Rage de colère, Drogon détruit le symbole ultime du pouvoir. Le trône n’est plus que lave et le dragon emporte le corps gisant de sa mère dans les nuages. La destinée Targaryen s’envole avec ses derniers espoirs de pouvoir.

RIEN N’EST PLUS PUISSANT QU’UNE BONNE HISTOIRE

Qui pour régner ? Le jeu des trônes n’est pas terminé, et dans son ultime demi-heure, la série va conclure ce qui nous animait depuis le début. La fin d’épisode est forcément troublante, déroutante. Il est en effet toujours délicat de faire face à ce que l’on a attendu depuis les premières heures. Lors d’un conseil animé par invectives et indécisions entre les derniers rois de Westeros, on rembarre le tonton relou et Samwell Tarly propose une démocratie directe – quelle drôle d’idée tiens-donc. C’est finalement Tyrion, clé de voûte de cette saga, qui opte pour Bran, « gardien de nos histoires ». Apprendre des erreurs passées pour envisager l’avenir. Qui de mieux que la mémoire incarnée pour gouverner ? Il n’est plus question de faire table rase du passé, mais de s’en servir. Plus que la loyauté indéfectible de Jon Snow, pourtant roi légitime, c’est l’Histoire qui apportera la paix. En ces temps troubles sur une autre planète, appelée Terre, le clin d’œil est astucieux, à défaut d’être subtil.

Tyrion récupère son statut de Main du Roi et Sansa obtient l’indépendance du Nord. Jon Snow, lui, est renvoyé à la garde de nuit où il retrouve Tormund et Ghost. Le jeu d’échiquier arrive à terme.

EN FINIR

Il est difficile d’admettre que finir une série, avec une telle densité narrative, en seulement six épisodes était une bonne idée. Partant de ce postulat, il était obligé d’enchaîner les raccourcis, d’accélérer les décisions (quid de certaines incohérences) quitte à ce qu’elles soient dures à digérer. Mais les choix de David Benioff et D.B. Weiss n’étaient résolument pas mauvais, bien au contraire : ils étaient malins et surprenants. Construits dans le sang et la sève de la série, avec un véritable sens du show. Mais, il est certain que l’ajout d’épisodes supplémentaires pour conclure la saga aurait mieux fait passer la pilule à bon nombres de déçus.

C’est la loi des phénomènes de masse, jamais incontestable et incontestée. Finir sur une note positive une série qui nous aura tant surprise par son sens de la cruauté, de l’injustice et de la surprise a de quoi perturber.

– « Personne n’est vraiment satisfait, j’imagine que c’est un bon compromis » explique Tyrion à Jon, comme ultime pied de nez.

– « Est-ce juste, tout ce que nous avons fait ? », demande Jon. ; « Redemandez-moi dans dix ans » rétorque Tyrion. Pari tenu.

En abandonnant définitivement son versant nihiliste, Game of Thrones propose un dernier tiers déchirant et inoubliable ; iconique à chacun de ses mouvements, magnifiant les destinées de chacun. Des adieux dignes. Sansa, Aryan, Jon, Bran et consort nous disent adieu et filent vers leur avenir en nous laissant orphelins. Arya la solitaire vogue découvrir de nouveaux horizons, Sansa devient la « Queen on the North ». La série débuta avec les Stark et se termine avec les Stark. La boucle est bouclée.

Désormais, il nous reste le souvenir d’un show unique en son genre qui aura su rassembler comme jamais auparavant, faisant des lundis une communion spéciale, un souvenir impérissable, qu’il sera dur de combler. « And now, our watch has ended. »