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« Le Boucher de Stonne » : éloge des blindés français

Jonathan Fanara Responsable des pages Littérature, Essais & Bandes dessinées et des actualités DVD/bluray

La collection « Machines de guerre » des éditions Delcourt accueille Le Boucher de Stonne de Jean-Pierre Pécau, Senad Mavric et Filip Andronik. Les auteurs se penchent sur le char français B1 bis, le meilleur en son temps, dont le blindage chrome-colbalt résistait à toutes les armes antichar et dont les canons venaient à bout des Panzer ennemis.

La performance des blindés français durant la Seconde guerre mondiale a rarement été saluée. Au contraire, l’histoire a tendance à ne retenir que les faits d’armes des Panzer allemands. Dans Le Boucher de Stonne, c’est pourtant bel et bien le char B1 bis que Jean-Pierre Pécau, Senad Mavric et Filip Andronik mettent à l’honneur. La machine, presque indestructible, ne semblait craindre que la pièce anti-aérienne 88mm ; assemblée à partir d’éléments provenant des quatre coins de France, elle était dotée d’une carapace chrome-colbalt, d’un moteur Renault et de redoutables capacités offensives, caractérisées par ses canons et mitrailleuses sophistiqués.

Gourmand en carburant, nécessitant de l’huile de ricin industrielle, le B1 bis a fait l’objet de mésusages dus à l’incurie militaire française. Cet état de fait est parfaitement énoncé par les auteurs, au détour d’un personnage complexe, symptomatique de cette époque, un Juif allemand exilé dans l’Hexagone, ayant œuvré dans les usines Renault avant de rejoindre le front sous une fausse identité. Fred Rosenfeld, puisque c’est de lui qu’il s’agit, se pose en seul protagoniste de chair capable de rivaliser avec le B1 bis dans la construction narrative du scénariste Jean-Pierre Pécau. Les autres protagonistes demeurent en effet secondaires et fonctionnels.

Le Boucher de Stonne alterne les mises en situation du char B1 bis et des parenthèses moins spectaculaires, permettant notamment de narrer les relations dysfonctionnelles entre l’armée française et les villageois qu’elle s’emploie à protéger. Les territoires pris et repris, les problèmes d’approvisionnement, l’impréparation des troupes et de l’état-major, les machines détournées par l’ennemi trouvent également leur place dans un album où l’ingénierie technologique rime avec l’horreur guerrière. Ce dernier se complète d’un important cahier technique sur le B1 bis, ses caractéristiques et ses batailles.

Machines de guerre : Le Boucher de Stonne, Jean-Pierre Pécau, Senad Mavric et Filip Andronik
Delcourt, janvier 2023, 56 pages

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