Outre la compétition dont le programme est déjà bien chargé, Cinélatino propose également de nombreux films dans des sections parallèles, en partie dans celle nommée Découverte. De la fiction au documentaire en passant par des courts-métrages en tout genre, les choix du festival montrent toute la diversité et la richesse du cinéma latino-américain. Arábia, de Joāo Dumans et Affonso Uchoa en est la preuve.
Presque inconnu du grand public, le film mérite pourtant une certaine reconnaissance parce qu’il possède au moins la qualité de traiter d’un sujet sérieux sans ennuyer. Avec une qualité esthétique qui met véritablement en valeur le cinéma d’Amérique latine, les cinéastes arrivent à tout apporter dans leur film. Œuvre sociale et pourtant profondément artistique, Arábia montre dès la première scène la beauté avec laquelle les plans vont être réalisés. Avec la liberté qu’elle projette, la scène d’ouverture capte tout de suite le regard du spectateur et lance directement le sujet. D’autant plus que le plan suivant voit se resserrer l’espace sur le lieu de vie et quotidien d’Andre, ouvrier dans une usine et vivant dans un quartier industriel. Tout le long du film, la nature brésilienne est opposée au huis clos des logements précaires toujours filmés à travers une porte. Les personnages apparaissent seulement comme enfermés dans un surcadrage délimité par des murs, des fenêtres ou bien encore l’encadrement d’une porte. En choisissant de filmer ces personnages en plan rapproché ou en gros plan, ils ne semblent jamais petits dans le cadre. Au contraire, ils occupent l’espace du plan de telle manière qu’ils donnent l’impression de s’imposer.
« C’est plus facile de croire au diable qu’en Dieu »
La force du film est de faire de cette vie précaire quelque chose de poétique et de former une rencontre invisible à travers des mots. La caméra est aussi sincère que les personnages et filme des images franches d’une grande qualité. Bien que la mise en scène soit sobre, tout y est élégant et beau. Les intermèdes musicaux donnent le rythme manquant au film et la guitare rassemble ces personnages qui manquent de moyens. La solidarité jaillit de beaucoup d’instants et l’humour prend le dessus lors de nombreuses scènes, comme celle où les deux ouvriers débattent sur les charges qu’ils considèrent les plus lourdes à porter. Cependant, la dimension poétique à laquelle on s’attend en allant voir le film manque de moments forts et le parallèle entre Andre et Cristiano aurait rajouté beaucoup d’intensité au récit mais la fin ne peut que satisfaire tant elle est forte. À partir de la rencontre amoureuse de Cristiano, l’écriture devient plus sentimentale et plus philosophique jusqu’à une scène finale totalement admirable. Plus aucun bruit n’émane du film, seule une voix off narre une histoire et les superbes images des flammes dans l’usine ne font que renforcer l’émotion. Les images se figent plusieurs fois pour contempler le personnage filmé comme un héros, un guerrier du quotidien qui tous les jours surmonte ce travail et cette vie précaire. Puis, comme durant tout le film, le son reprend avec une grande intelligence sur le bruit du feu que l’on voyait précédemment en image et le fondu au noir achève le film de la plus belle manière pour faire disparaître le personnage alors que la voix assure qu’il reste vivant.
Arábia : Bande Annonce
Arábia : Fiche Technique
Réalisateur : Joāo Dumans et Affonso Uchoa
Scénario : Joāo Dumans et Affonso Uchoa
Interprétation : Aristides de Sousa, Murilo Caliari, Renata Cabral
Brésil – 2017