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Cinemania 2023 : Bilan du plus francophone des festivals canadiens

Le festival de films francophones Cinemania en est déjà à sa 29e édition ! Un festival alliant majoritairement des long-métrages, mais aussi des documentaires et des courts. Une organisation à but non lucratif, destinée à faire connaître et rayonner le cinéma produit dans la langue de Molière et dont le succès ne se dément pas avec les années. Comme chaque automne, Montréal accueille les festivités à travers ses cinémas les plus emblématiques. Du Québec à la Suisse, de la France au Luxembourg en passant par le Maroc, des films pointus venus de tous horizons vont égrener les dix jours de la manifestation entre avant-premières nord-américaines et parfois mondiales. Retour sur dix jours intenses, entre anecdotes, palmarès et tendances de la compétition sur le plus grand festival de cinéma francophone d’Amérique !

Cinemania a dévoilé sa programmation le 18 octobre, seulement quinze jours avant le début des hostilités. Et le programme est alléchant : près de cent films seront présentés. Ce sont deux films français qui vont ouvrir et fermer la programmation 2023 : « Le procès Goldman de Cédric Kahn en ouverture et Second tour d’Albert Dupontel en clôture. De nombreux artistes, producteurs, comédiens ou réalisateurs seront présents pour présenter leurs films. Il y a aussi de nombreuses conférences de presse ou tables rondes qui sont organisées en marge du festival. Un festival qui ne s’est jamais arrêté depuis sa création puisqu’il s’est fendu d’une version numérique en 2020, ainsi qu’une version hybride en 2021 (entre films en salles et films en téléchargement payant). Une affaire qui roule et un rendez-vous culturel attendu chaque mois de novembre par de nombreux québécois et festivaliers venus de tous les pays de la francophonie.

Malheureusement l’auteur de ces lignes, moi en l’occurrence, était en France avant son retour à Montréal où je vis, durant les deux premiers jours du festival. Accrédité pour le couvrir par votre site de cinéma préféré, je n’ai pu arriver que le troisième jour. Récit d’une course comme peut l’être n’importe quel festival. Tel que Cannes en bien plus grand bien sûr, un festival que j’avais couvert tout jeune en tant qu’attaché de presse lors de mes années d’étudiant. Car, un festival ce n’est pas une sinécure ! C’est un vrai marathon de films, où parfois la fatigue ou la lassitude prennent le dessus. Quand on est à son quatrième film de la journée par exemple et qu’on tombe sur un film d’auteur particulièrement exigeant, il est naturel de fléchir un peu…

Retour sur un programme dense et près de trente films vus !

Vendredi 3 novembre :

J’arrive à peine de l’aéroport, je rentre chez moi en vitesse, le temps de prendre une douche et d’aller récupérer mon accréditation qui m’attend au bureau du cinéma Impérial, quartier général du festival et surtout plus bel édifice dédié au cinéma de Montréal.

En effet, je ne voulais pas louper la projection du très attendu Je verrai toujours vos visages de Jeanne Herry. Car Cinemania c’est aussi à peu près la moitié des films qui sont déjà sortis dans leur pays d’origine. Et celui-là, j’en avais entendu parler et en bien. Et effectivement, il restera mon principal coup de cœur du festival. La cinéaste était là pour parler du film à la fin de la projection et son discours sur le sujet du film, la Justice Restaurative, fut passionnant. Un véritable coup de cœur que ce petit bijou, malgré la fatigue et le décalage horaire !

Samedi 4 novembre :

La honte m’habite. Décalage, fatigue et retour à la maison ont fait que je n’ai pas eu le courage d’assister à la projection de « Le temps d’aimer ». Ce qui est bien avec ce festival, comme on ne peut pas tout voir, on nous propose des liens pour rattraper certains films chez nous. Ce que je fis avec celui-là quelques jours plus tard et j’ai bien fait : une nouvelle petite perle !

Dimanche 5 novembre :

Les choses sérieuses commencent ! Je découvre en avant-première internationale Les Rois de la piste, le nouveau film de Thierry Klifa qui ne m’emballe pas. Le réalisateur devait être présent, mais il est absent et s’en excuse pour cause de maladie. Celui qui nous avait offert de beaux mélodrames tels que Tout nous sépare ou Le Héros de la famille livre une comédie poussive et peu drôle avec un casting mal assorti.

On enchaîne sur Soudains seuls qui sort en France le 6 décembre et s’avère une belle petite surprise. Un film de survie et d’amour maîtrisé de bout en bout. Le réalisateur Thomas Bidegain se fond d’un message vidéo complètement perché qui a bien fait rire la salle avant la séance.

Lundi 6 novembre :

Première grosse journée à trois films ! Café, motivation et envie de découverte m’anime en ce beau jour ensoleillé mais frais ! La journée débute par De grandes espérances, déjà sorti en France. Un bon thriller. S’ensuit de Le livre des solutions devant une salle comble et totalement hilare. Personnellement si Pierre Niney excelle, j’ai trouvé le film sympathique et amusant, mais finissant par tourner en rond.

Le soir, c’est la projection de Le retour de Catherine Corsini que je vais rencontrer le lendemain en interview. Elle présente le film devant une salle tristement vide, mais ne s’en formalise pas. Peu emballé par le résumé, j’y allais juste pour savoir de quoi je parle durant l’entretien. Et bien j’ai eu tort, c’est un joli film et une belle surprise.

Mardi 7 novembre :

La journée débute donc par l’interview passionnant avec Catherine Corsini qui revient sur sa carrière, son film, sa place de femme et la polémique cannoise sur son long-métrage qui l’a beaucoup affectée. Vingt minutes top chrono qui ne m’ont pas permis de terminer mes questions, mais une petite discussion en off sur le monde de la techno qu’elle connaît bien, tout comme moi. Surprenant.

Je file ensuite assister à une conférence sur la place de la langue française dans la diffusion des œuvres au Québec. Un rendez-vous parmi d’autres dans le cadre de Cinemania Pro. Une heure trente de discussions à bâtons rompus sur la schizophrénie linguistique du Québec à ce niveau. Un animateur, rédacteur en chef au Film français est présent, ainsi que quatre intervenants du monde culturel canadien : la directrice de la chaîne publique Télé Québec, la directrice des cinémas art et essai montréalais, le directeur de Cinéplex (l’équivalent du circuit UGC ou Pathé-Gaumont en France) et une personne de chez Bell Média (en gros, un Canal+ québécois). Peu de temps pour les questions, mais je parviens à poser l’une des miennes sur la problématique du sous-titrage français…

On enchaîne avec la projection du très réussi Rien à perdre avec Virginie Efira. Un premier film convaincant. Et la journée se poursuit avec le tout mignon àma Gloria que vient présenter son distributeur québécois (K Films) qui a eu un véritable coup de cœur pour le film. Et on continue avec l’âpre mais convaincant Un silence, le dernier film de Joachim Lafosse.

Mercredi 8 novembre :

La journée commence tôt au Cinéma impérial avec la projection du très anecdotique mais mignon La plus belle pour aller danser de Victoria Bedos, qui vient présenter le film pour sa première à Montréal, en précisant qu’elle n’attend que du bien de la ville.

Petite pause déjeuner avant d’attaquer la seconde interview de la semaine. Et une rencontre qui me tenait particulièrement à cœur moi qui suis français de sang, mais belge de cœur, puisque c’est l’incomparable Yolande Moreau que je rencontre. Un moment inoubliable avec une grande dame, simple et qui me nourrit d’anecdotes savoureuses et parle de son film, de son pays et de ma ville, Lille, avec passion.

S’ensuit en fin d’après-midi, le film le plus surprenant que j’ai vu du festival : Le Successeur de Xavier Legrand qui nous avait gratifié de la claque Jusqu’à la garde en 2018. Un film qui m’a fait bondir de mon siège plusieurs fois ainsi qu’une bonne partie de la salle. Et un bon film qui plus est tourné au Québec et qui a obtenu le prix du meilleur film québécois.

En revanche, la journée se termine sur la projection agitée de Le jeune imam en présence de Kim Chapiron, l’un des plus mauvais de la sélection et de son auteur.

Jeudi 9 novembre :

Cette journée va être ardue et la concentration devra être à son paroxysme ! En effet, trois films à la suite en une après-midi. C’est beaucoup ! C’est trop… Heureusement que la qualité était majoritairement au rendez-vous ! On commence avec Captive, un beau film jumeau de Le Bal des folles de Mélanie Laurent.

S’ensuit la projection de Magnificat. Karin Viard, que j’aurais rêvé d’interviewer, présente trois films à Cinemania cette année (avec Nouveau départ et Une nuit). Et on peut dire que son speech était sincère et très rock’n’roll ! En prime une Yolande Moreau venue assister à la projection dans la salle pour un film décevant qui passe à côté de son beau sujet.

Le soir, c’est un film très attendu de la compétition qui est présenté. Le tapis rouge traîne et le photo call est long, ce qui retarde la projection. Il s’agit d’une production entre le Québec et la Belgique pour un premier film qui fait le buzz Quitter la nuit. Et il ne décevra pas en plus d’être maintes fois couronné.

Vendredi 10 novembre :

Journée un peu plus calme ce vendredi puisque j’assiste à seulement deux projections (en salle en tout cas puisque j’en ai rattrapé deux autres à la maison, un vrai festivalier n’est pas là pour enfiler des perles comme on dit). On commence avec Une nuit que Karin Viard présente toujours en grande forme. Et la journée se poursuit avec l’éclat de rire du festival : la comédie / polar totalement déjantée Bonne conduite qui est un peu la bouffée d’air frais de cette édition avec Iris et les hommes que je vois le lendemain, les deux étant avec Laure Calamy.

En parlant de films en ligne, j’ai donc rattrapé le magnifique Le temps d’aimer et La Voie royale. En revanche, d’autres visionnés à la maison m’ont beaucoup moins convaincu. C’est le cas de Les âmes sœurs, de Le Paradis et du film Suisse Foudre. A rappeler que le pays à l’honneur cette année était la Suisse, après le Luxembourg l’an passé. Enfin le sympathique Making-of clôt cette liste de films vus hors salle, car ratés en début de festival ou parce que les heures ne correspondaient pas.

Samedi 11 novembre :

Dernier jour de festival pour moi, car je reprends le travail le lendemain et que ce sont les films de clôture (que j’ai déjà vu en France) et des rappels le dernier jour. Me voilà donc parti pour un autre de mes coups de cœur que je n’ai pas senti venir : le film d’époque Rosalie.

En revanche, ma dernière projection était peut-être l’une des moins plaisantes : je me suis copieusement ennuyé devant le dernier film de Stéphane Brizé, Hors saison. Quant à la conférence de presse et les questions journalistes avec Emmanuelle Béart, la présidente du jury, c’était malheureusement complet.

Petit bilan personnel :

Mes favoris du festival, mon podium, sera constitué de Je verrai toujours vos visages, Le temps d’aimer et Rosalie. S’ajoutent ensuite quelques petits coups de cœur et surprises que sont Le Successeur et Quitter la nuit et le joker Bonne conduite.

Grosse déception en revanche pour Les Rois de la piste et Hors saison très attendus. Quant à Le jeune imam, Foudre, Les âmes sœurs et Le Paradis, ce sont les cartons rouges me concernant.

Palmarès des différentes sélections et catégories :

Cette édition a pris fin hier soir de la plus belle des manières, après 12 jours de festivités mêlant projections, soirées et événements, en établissant un nouveau record d’affluences en salles. Avec 45 séances à guichets fermés et des revenus de billetterie de 25% supérieurs aux précédentes éditions, CINEMANIA se réjouit de ce succès auprès des spectateurs de plus en plus fidèles et qui ont été plus de 100 000 cette année à participer aux festivités.

COMPÉTITION VISAGES DE LA FRANCOPHONIE

Le Jury Compétition Visages de la Francophonie était co-présidé par Emmanuelle Béart (actrice et réalisatrice) et Philippe Falardeau (réalisateur). Sophie Mousel (actrice), Manon Barbeau (cinéaste et fondatrice du Wapikoni Mobile), Geneviève Albert (réalisatrice et scénariste), Anne-Élisabeth Bossé (actrice et humoriste) et Eric K. Boulianne (réalisateur et scénariste) ont composé ce Jury.

Prix du Meilleur Film TV5 Québec-Canada
Remis au meilleur film de la compétition
LE PROCÈS GOLDMAN de Cédric Kahn
Prix du Jury Marc-André Lussier
Remis par La Presse au coup de coeur du Jury pour souligner l’originalité d’une oeuvre
QUITTER LA NUIT de Delphine Girard
Prix Sofitel Montréal de la Meilleure Interprétation
Remis à un.e artiste pour souligner la qualité de sa performance de jeu dans une oeuvre
LAISSEZ-MOI de Maxime Rappaz pour la comédienne Jeanne Balibar
Prix SACD du Meilleur Scénario
ANIMALIA pour la réalisatrice et scénariste Sofia Alaoui
Prix Colombier-Dompierre de la Meilleure Musique
Remis par ÉCHO SONORE, en partenariat avec le Consulat Général de France à Québec
FOUDRE de Carmen Jaquier pour le compositeur Nicolas Rabaeus
Prix Elle Québec de la meilleure réalisatrice
Prix transversal aux compétitions Visages de la francophonie et Films du Québec
IL PLEUT DANS LA MAISON pour la réalisatrice Paloma Sermon-Daï

COMPÉTITION FILMS DU QUÉBEC

Le Jury Compétition Films du Québec était composé de Amaury Augé (Responsable de la section Acid du Festival de Cannes), Alex Moussa Sawadogo (Délégué général du Fespaco, le Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou, Burkina-Faso), Claire Diao (Programmatrice au Festival International du Court-Métrage de Clermont-Ferrand et au Lincoln Film Center à New York) et Hugo Latulippe (Directeur général du Festival de Cinéma de la Ville de Québec).

Prix du Rayonnement Banque Nationale
Remis au meilleur film de la compétition
LE SUCCESSEUR de Xavier Legrand
Prix du Jury Post-Moderne
SUCRÉ-SEIZE d’Alexa-Jeanne Dubé
Prix SARTEC du Meilleur Scénario
QUITTER LA NUIT pour la réalisatrice et scénariste Delphine Girard
Prix UDA de la Meilleure Interprétation d’un film québécois
Remis à un.e artiste pour souligner la qualité de sa performance de jeu dans une oeuvre
LES RAYONS GAMMA de Henry Bernadet pour l’ensemble des jeunes interprètes du film
Mention spéciale à KANAVAL d’Henri Pardo pour Rayan Dieudonné

COMPÉTITION DOCUMENTAIRES

Le jury Compétition Documentaires était composé de Luce Grosjean (Miyu distribution), Nerimen Hadrami (Toni Films), Manon Kerjean (Lost in Frenchlation) et Marie Prouzet (Time Art).

Prix du Meilleur Documentaire Planète+
Remis au meilleur film de la compétition
JE SUIS LA FRANCE de Sarah El Attar

COMPÉTITION COURTS-MÉTRAGES

Le jury Compétition Courts-Métrages était composé de Gabrielle Boulianne-Tremblay (actrice et écrivaine), de Nicolas Gendron (critique montréalais) et de Justine Lévêque (directrice du Champs-Elysées Film Festival).

Prix de la Critique AQCC du meilleur court-métrage
ANGIE de Anthony Conveney
Mention spéciale à MAMINA de Massimo Riggi
Prix Télé-Québec du Meilleur Court-Métrage Québécois
UN TROU DANS LA POITRINE de Alexandra Myotte et Jean-Sébastien Hamel.
Prix Francophonie des Amériques
En partenariat avec le SQRC (Secrétariat du Québec aux Relations Canadiennes)
LE DERNIER RHINOCÉROS de Guillaume Harvey
Prix du Public AIR CANADA
KANAVAL de Henri Pardot

À l’année prochaine Cinemania !