Des voix se lèvent, s'élèvent pour dire "stop", pour dire que nous ne voulons plus de ce monde-là. A l'image du "on se lève et on se casse" de Despentes, on veut que ces voix portent et ne soient plus isolées, meurtries, détruites. On veut du "love gaze" partout, pas d'oppositions trop faciles, de violence, de pièges à la Polanski. On ne veut pas désigner des monstres, on veut une société qui se regarde en face. On ne vous donnera pas notre haine, mais on ne va pas se taire.
Carte blanche
« Carte blanche » est un espace d’expression sans rivages : chaque rédacteur y aborde ce qu’il veut avec le ton qui lui plaît.
De véritables déclarations d’amour au Portrait de la jeune fille en feu de Céline Sciamma en passant par les livres de Jules Verne ou encore le poétique Aurélien de Louis Aragon qui ont façonné notre culture, les rédacteurs y livrent leurs humeurs, leur colère, leurs coups de cœur ou bien de sang quant aux films de Lars Von Trier ou encore Quentin Tarantino. Qu’ils traitent d’un sujet d’actualité ou d’un vieux dossier poussiéreux. Ils le font avec une liberté de ton absolu. Et ça n’engage qu’eux.
La Fille au bracelet est comme un embrasement. C'est un moment suspendu, parfois dur, tendu. Mais c'est aussi un vivier d'émotions rentrées dans laquelle l'adolescence est vue comme ce qui échappe toujours à notre regard et devrait échapper à nos jugements. Une petite merveille pour la conseillère principale d'éducation qui sommeille en moi.
Scandale se pose d'emblée comme LE film américain de l'ère qui suit #MeToo et ses révélations en pagaille sur un monde du cinéma/de la finance/de la musique/du journalisme (pas de mention inutile à rayer ici) perverti par le désir des mâles (blancs et riches la plupart du temps ici) qui le dominent. Cependant, cela ne suffit pas à en faire un bon film car cette révolution dans la parole des femmes, cet instant inédit et inouï, mérite une vraie réponse de cinéma. Mais malheureusement nous sommes trop prompts à accueillir toute forme de parole comme de l'eau bénite, une preuve que tout s'arrange d'un coup de baguette magique...
Sorti depuis quelques semaines déjà, Star Wars : L'Ascension de Skywalker subit déjà le feu d'un certain nombre de critiques. Depuis son rachat de la franchise en 2011, la firme aux grandes oreilles est toujours soupçonnée de vouloir épuiser la poule aux œufs d'or. Mais Disney est-il seul responsable? Et si l'évolution de la saga initiée par George Lucas en disait plus sur notre époque ?
Sur un strict plan cinématographique, J’accuse n’est pas plus tributaire de ce qu’a pu faire ou non Polanski que ses précédents travaux. Au final, c’est moins à la culture du viol dont la polémique J’accuse se fait l’écho qu’au blanc-seing dont jouissent ceux qui passent toujours à travers tout, et dont Polanski est devenu un symbole reconnu.
Dans cet édito il ne s'agit pas de raviver la controverse sur la séparation entre une œuvre et l'artiste, ni même de parler du film J’accuse de Roman Polanski, mais de constater la naissance d'une nouvelle vague moralisatrice réclamant à cor et à cri, le boycott d’artistes à la vie parfois dépravée et condamnable.
Drôle de manière de voir un film qu'en fermant les yeux. J'accuse de Roman Polanski, réalisateur fugitif et poursuivi pour abus sexuel sur une enfant, vient de signer le meilleur démarrage du réalisateur depuis 1986. Alors j'accuse aussi. Ceux pour qui la pédophilie est soluble dans le temps, ceux qui dissocient les hommes des artistes, et ceux qui cultivent le viol. Si ce n'est par leurs actes, par leurs mots.
Lorsqu’Adèle Haenel s’exprime le lundi 4 novembre, elle ne le fait pas seulement pour parler d’elle et des faits qu’elle reproche au réalisateur Christophe Ruggia, mais pour s’adresser à la société. Cet acte politique fort est à l’image de la carrière de l’actrice qui s’inscrit lui aussi dans l’espace public pour dire quelque chose de la société. Nous avons donc décidé de revenir sur l’itinéraire de l'actrice et sur la capacité du cinéma, de la société à entendre sa parole avant de lui adresser une lettre ouverte.
Repu de son irrévérence et de son hybridité à l'atmosphère hypnotique, la brume épaisse et indescriptible de Knives And Skin nous a-t-elle enveloppé ou laissé sur le bord de la route ? Réponse en une carte blanche qui a hérité de sa rage salvatrice...
Jérémy Clapin manie le médium de l'animation pour réaliser le tracé bouleversant de simplicité et d'épure des membres qui se retrouvent. Il nous fallait bien l'espace de liberté d'une carte blanche pour retranscrire, autant que possible, la trace qu'a laissé J'ai Perdu Mon Corps...
Sam Levinson continue, dans Euphoria, de rendre compte de l'état malade d'une génération marquée par la nervosité d'une souffrance rance et l'intensité d'un besoin d'amour inconditionnel. Sous l'amas de paillettes sublimes, attend patiemment la plus solaire des noirceurs...
D'un bout à l'autre de la chambre, les souvenirs et les choix qui les ont scellés s'entrechoquent et se chamaillent le devant de la scène du moi intérieur. Fidèle amant de ses personnages, Honoré les invite à l'apaisement d'un passé qui se dérobe et d'un présent qui s'assume. Récit d'une deuxième rencontre...