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Haut et court

Lieux et Cinéma : la salle de classe

Pendant ce mois de juillet, Le Mag du Ciné vous propose des promenades dans des lieux emblématiques du cinéma. Aujourd’hui, même si nous sommes en vacances, faisons un petit retour dans la salle de classe.

Pour faire simple, il y a deux façons de considérer une salle de classe : comme un lieu d’apprentissage, ou comme un lieu de conflit.

Salle de classe : lieu de transmission

L’apprentissage se fait, bien entendu, dans le rapport entre professeur(s) et élèves. La salle de classe est en priorité le lieu où se déroule le cours, même si le cinéma s’intéresse finalement très peu aux cours ordinaires. Bien entendu, nous avons cette formidable description du quotidien d’une classe dans Entre les murs, de Laurent Cantet, qui a obtenu la Palme d’or à Cannes en 2008. Nous y suivons un professeur, interprété par François Bégaudeau (auteur du livre dont le film est l’adaptation). Il s’agit de faire cours, de transmettre du savoir, mais aussi d’intéresser des élèves, et, d’un certain côté de participer, en partie, à la construction de leur avenir, d’où les interrogations qu’un professeur se doit de se poser, les remises en cause, etc. d’autant plus qu’il s’agit de transmettre bien autre chose que du savoir : c’est la question du « vivre ensemble » qui se pose à chaque heure. C’est avec beaucoup d’intelligence et de sensibilité que Cantet et Bégaudeau nous proposent cette chronique d’un collège parisien.

Un professeur peut transmettre bien autre chose que du savoir : une manière de vivre, une philosophie de la vie. Nous avons la figure du professeur charismatique qui apporte une influence durable sur ses élèves. L’exemple le plus célèbre est sans conteste celui du professeur Keating, personnage principal du Cercle des poètes disparus, de Peter Weir. Moins connu, nous avons l’instituteur incarné par Roberto Benigni dans le film de Marco Ferreri  Pipicacadodo. Les deux enseignants n’hésitent pas à bouleverser les méthodes pédagogiques : l’école est alors vue comme une institution sclérosée que des professeurs innovants et courageux essaient de révolutionner.

Dans cet objectif de transmission  de valeurs et/ou de savoirs, il est évident que la salle de classe reflète les valeurs de son époque, pour le meilleur ou pour le pire. Même si, théoriquement, la salle de classe devrait être coupée des préoccupations extérieures, il n’en est hélas rien, et ce qui se joue entre professeurs et élèves est bien souvent tributaire d’enjeux extérieurs. C’est le cas, par exemple, dans La tempête qui tue, de Frank Borzage, film de 1940 qui raconte la montée du nazisme en Allemagne. Nous y voyons les membres du NSDAP s’affirmer de plus en plus, jusqu’à exiger qu’avant chaque heure de cours tout le monde, élèves comme professeurs, fasse le salut hitlérien. Tous ceux qui avaient laissé faire jusqu’alors, se rendent compte qu’il est trop tard pour protester…

La salle de classe comme lieu de conflit

La salle de classe peut aussi devenir le théâtre d’un conflit, que ce soit entre professeur et élèves ou entre élèves eux-mêmes.

Ainsi, les élèves peuvent être confrontés à des professeurs cancres, profondément ennuyeux, vieux jeux, voire sadiques qui n’hésitent pas à ridiculiser les adolescents dont ils ont la charge. On peut penser évidemment à la galerie d’enseignants qui peuple le superbe Amarcord de Fellini. Du coup les élèves en profitent pour s’amuser en classe. Dans une veine plus dramatique, nous avons la vision sombre de l’enseignement comme une machine à broyer les élèves, dans Pink Floyd – The Wall, d’Alan Parker. La salle de classe est alors le lieu où l’élève doit s’affirmer non pas grâce au professeur, mais face à lui.

Plus rarement, c’est le professeur qui rejette son élève et s’oppose frontalement à lui, comme le fait Rogue, le plus fascinant et ambigu des professeurs de Poudlard, face à Harry Potter…

Le conflit se fait aussi souvent entre élèves. La salle de classe devient alors un lieu d’humiliation ou de harcèlement qui reproduit les discriminations du monde extérieur. La jeune Carrie White en fait les frais dans le film de Brian de Palma adapté du roman de Stephen King. Laissée dans l’ignorance des transformations du corps féminin lors de l’adolescence, elle va faire une crise de panique à l’apparition de ses premières règles et sera la proie des rires et humiliations de ses camarades de classe.

Au-delà encore de ce simple conflit entre élèves, il y a l’expérience ultime, celle qui consiste à faire de la salle de classe l’enceinte d’une dictature d’ordre totalitaire. Un régime forcément basé sur l’exclusion violente de ceux qui n’y adhèrent pas. C’est la fameuse expérience racontée dans le film allemand La Vague, de Dennis Gansel. La salle de classe s’affirme alors pour ce qu’elle ne cesse d’être : un monde politique où il est sans cesse question de pouvoir. Le pouvoir du professeur, qui lui est conféré par sa place institutionnelle, son savoir disciplinaire et/ou son charisme, ou le pouvoir des élèves, pouvoir d’un futur leader ou celui d’un groupe en formation.