Indiana Jones et la Dernière Croisade de Steven Spielberg : le graal du divertissement !

Après un opus ayant prôné un exotisme quasi jusqu’au-boutiste (Indiana Jones et le Temple Maudit) et l’évocation d’une enfance meurtrie par la Seconde Guerre Mondiale (Empire du Soleil), Steven Spielberg avait comme qui dirait besoin de rêver. A nouveau. Et quand le plus grand entertainer de la planète s’empare d’une relique mythique – le Graal – et en fait la clé de voute d’une réunion père-fils déterminante pour le salut du monde, ça donne Indiana Jones et la Dernière Croisade, divertissement habile, haletant & doublé d’une malice incroyable !

La carrière de Steven Spielberg a souvent été émaillée de films aux airs de réponses. Des réponses aussi bien adressées aux traumas que lui réalisateur a vécus, mais aussi à la société et ses dérives. Et si on peut citer son tout récent Pentagon Papers comme l’oeuvre incarnant la réponse à l’ère Trump sclérosée par les mensonges et fake news massivement véhiculés, il ne fait aucun doute que Indiana Jones et la Dernière Croisade se veut comme sa réponse à l’industrie dans laquelle il est né. Car dans les années 80, l’entertainer déjà bien dans ses bottes se cherche une certaine légitimité ; étant encore pour la critique ce golden-boy certes doué mais encore très puéril. Suivront alors deux films : La Couleur Pourpre (1985) et Empire du Soleil (1987). Deux opus à ranger dans la case sérieux du réalisateur qui n’auront toutefois pas l’accueil espéré et laisseront l’américain amer pour ne pas dire dépité. Et de ce désaveu naîtra paradoxalement l’un de ses meilleurs divertissements, sachant allier figure prégnante de sa filmographie – la quête du père- à tout ses talents de story-telling, le tout correctement assaisonné de malice : Indiana Jones et la Dernière Croisade.

Le top du divertissement !

A l’époque, son objectif était clair : clore la trilogie. Et après un opus qu’il estime rétrospectivement raté – l’humour tache du personnage de Kate Capshaw et la veine sombre/horrifique étant trop éloignée de sa sensibilité-, Spielberg s’est mis en tête de revenir aux racines de son personnage. Le mythe de 1981 trouve ainsi un point de départ en une intro tonitruante grimée en flashback qui a vite fait d’illustrer avec toute la malice qui le caractérise, le génie du réalisateur pour la narration. Car en l’espace de 15 minutes, sublimées par un River Phoenix grimé en un jeune Indiana Jones, on apprend tout du personnage : sa peur chronique des serpents, l’origine de son Fedora, son attrait pour l’archéologie, sa faculté à foncer tête baissée et même l’origine de son fouet. Le tout emballé dans un montage énergique et déjà imprégné de la folie de son auteur. Car si on pouvait juger un certain réalisme dans les deux premières moutures de l’archéologue, ici, il semble délaissé au profit de l’humour. Et comme souvent chez lui, quand il injecte avec la même emphase, malice et humour, ça donne un cocktail furieusement drôle dans lequel il s’autorise tout, même des gros morceaux d’action à la limite du cartoon entre une poursuite en bateau dans un Venise de carte postale et une bagarre sur un char en état de marche. Mais l’immixtion du rire est surtout dûe à ce qui fait le sel du métrage et l’insère surtout dans la filmographie de son auteur : la relation au père.

La quête du père comme moteur narratif

Car là ou ce troisième opus innove, c’est en privilégiant l’effort de groupe et en joignant à la quête principale – celle du Graal- une autre éminemment plus personnelle pour Indy : celle de son père. Incarné par Sean Connery, il est au même titre que le Graal, un pivot narratif du film. Non seulement il motive l’intrigue générale (c’est son enlèvement au début du film qui convainc Indy de se rendre à Venise) mais en plus, c’est sa réconciliation avec Indy et leur duo qui procure les plus belles scènes (et les plus drôles). Rien qu’à l’écriture de ces lignes, on n’en oublie ainsi pas de penser à ces répliques scandées avec malice par Connery (« Ces gens essaient de nous tuer !  C’est nouveau pour moi ! », « Qu’est-ce qui se passe à 11h ? », « Elle parle en dormant »), ou la verve comique qui se dissimule un peu partout. Certains argueront que cette propension à insuffler un esprit de groupe et même de l’humour dessert le personnage, mais Spielberg fait tout l’inverse pratiquement : il injecte une dose d’humanité et de trauma à un personnage déjà passablement éprouvé par les pires rebuts de l’humanité – les nazis- ; tout en distillant au sein d’un divertissement populaire et accessible, son thème de cœur. Un bon moyen pour rendre le film non seulement drôle, ludique, accessible et son héros, universel et légendaire.

En injectant une dynamique de buddy-movie à une quête effrénée à un artefact légendaire, Steven Spielberg réussit à faire de Indiana Jones et la Dernière Croisade, l’opus le plus drôle, ludique, barré et accessible de la saga. Coup de maître !

Indiana Jones et la Dernière Croisade : Bande-Annonce

Indiana Jones et la Dernière Croisade : Fiche Technique

Titre français : Indiana Jones et la Dernière Croisade
Titre original : Indiana Jones and the Last Crusade
Réalisateur : Steven Spielberg
Scénario : Jeffrey Boam avec la participation non créditée de Tom Stoppard, d’après une histoire de George Lucas et Menno Meyjes
Casting : Harrison Ford, Sean Connery, Denholm Elliott, Julian Glover, Michael Byrne, River Phoenix, John Rhys-Davies, Alison Doody
Chef décorateur : Elliot Scott
Costumes : Anthony Powell et Joanna Johnston
Directeur de la photographie : Douglas Slocombe et Paul Beeson
Montage : Michael Kahn
Musique : John Williams
Producteur : Robert Watts
Producteurs délégués : George Lucas et Frank Marshall
Productrice associée : Kathleen Kennedy
Sociétés de production : Lucasfilm et Paramount Pictures
Sociétés de distribution : Paramount Pictures, United International Pictures
Budget : 48 000 000 $
Langue originale : anglais (quelques dialogues en allemand)
Format : Couleurs — 2,35:1 — Dolby — 35 mm
Genre : aventure, fantastique
Durée : 127 minutes

Etats-Unis – 1989

Rédacteur LeMagduCiné