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Masters of Sex, une série de Michelle Ashford : Critique saison 4

Masters of Sex, la série de Showtime revient pour une quatrième saison qui renoue avec l’esprit des deux premières, et laisse une fois de plus les sentiments prendre le dessus sur les corps.

Nous avions laissé le couple Masters/Johnson dans une mauvais passe à l’issue de la saison 3. Il faut dire que la saison 3 n’a pas été très sympathique avec le personnage de William Masters notamment, entre son mariage qui s’effondre, ses enfants qui le rejettent, son amour pour Virginia qui ne trouve toujours pas de réponse. Sur le  plan émotionnel, ça n’allait vraiment pas fort pour le docteur en sexologie. Par ailleurs, sur le plan professionnel, la clinique s’est retrouvée affublée d’une attaque en justice pour proxénétisme et prostitution. Virginia de son côté avait accepté la demande en mariage de Dan Logan, grand vendeur de parfum et associé de la clinique. C’est donc avec Virginia jeune mariée, et Masters porté sur la bouteille que l’on retrouve Masters of Sex pour une 4ème saison.

Qu’on se le dise d’emblée, si la saison 3 avait paru très faible, comparée aux précédentes , notamment dans sa première partie un peu ronflante, cette quatrième saison renoue très clairement avec la superbe de la série et de son excellente entame.

Les Apparences

Le début de cette saison est un véritable jeu d’apparences. Bill essaie de faire bonne figure alors que sa barbe et son allure débraillée en disent beaucoup sur l’état du personnage. Noyant son désespoir dans l’alcool, le médecin va devoir assister à des réunions d’alcooliques anonymes, même si selon lui il n’a pas de problème avec la bouteille. A côté de ça, il se présente quand bon lui semble à une clinique en pleine désintégration, depuis que Virginia a quitté le bateau pour aller vivre avec son nouveau mari, laissant la pauvre Betty croulant sur des demandes de rendez-vous ne pouvant aboutir. Revenons donc à Virginia, qui soi-disant vit la vie parfaite avec son nouveau mari. Là encore, tout n’est qu’apparence, car si on regarde de plus près, la jeune femme est dans une passe aussi mauvaise que Bill. Certes, elle se balade avec ce beau diamant au doigt, mais la vérité est un peu moins romantique. Virginia enchaîne en effet les coups d’un soir avec des hommes rencontrés dans divers bars et hôtels. De plus, elle a l’air résignée à ne plus travailler avec Bill, ce que le docteur a l’air de plus ou moins partager. Une proposition de Hugh Hefner va cependant changer les choses.

On se retrouve donc dans cette première partie de saison à essayer de colmater les dommages apportés par la fin de la saison précédente, en redonnant un coup de boost à la clinique, en mettant en chantier d’un nouveau livre, et surtout en travaillant une véritable réformation du duo iconique et d’avant-garde Masters/Johnson. De nombreuses techniques vont être mises en place pour faciliter cette relance de la clinique. L’une des plus importantes est l’arrivée de deux nouveaux médecins, le Dr Leveau, ancienne élève de Barton Scully qui va devenir la nouvelle partenaire du Dr Masters. Une jeune femme blonde qui se pose directement comme une sorte d’alter ego à Virgina, que ça soit au niveau physique (blonde/brune) ou  professionnel ( Nancy Leveau étant un véritable docteur  ce qu’elle n’hésitera pas à relever à certaines reprises). De son côté, Virginia va elle aussi engager un nouveau docteur en la personne de Art Dreesen, qui est quant à lui psychologue. Ces deux nouveaux personnages vont également prendre part à ce jeu d’apparences. Ils sont particulièrement mystérieux et ambitieux.

Voilà donc le point de départ de cette quatrième saison. Une saison qui malgré ses 10 épisodes, soit 2 de moins que d’habitude, va être particulièrement riche et va savoir conjuguer  à la perfection le côté sentimental des deux personnages principaux mais également le point de vue professionnel/historique et les avancements dans les diverses recherches et notamment l’homosexualité. Dans un premier temps, nous allons nous intéresser à l’axe professionnel, laissant tout ce qui tourne autour des relations entre les personnages pour la suite, étant donné que c’est certainement la partie la plus riche et la plus intéressante.

Maintenant que Masters/Johnson est une sorte d’institution renommée dans le milieu de la sexologie, il est évident que tous les projecteurs sont braqués sur elle. Cela peut donc avoir des effets particulièrement bénéfiques comme ce partenariat avec Hugh Hefner, mais également un certain revers de la médaille. La saison 3 avait introduit ce procès pour proxénétisme et prostitution dont l’intrigue sera poursuivie dans cette nouvelle saison. Paradoxalement, ce procès va permettre à Bill de  connaître une certaine renaissance, notamment grâce à des mots qu’il va prononcer au cours de celui-ci. Un discours tolérant et marquant, qui va permettre à certaines personnes de mieux assumer leur sexualité et qui va faire du bien à l’image de la clinique. Comme dit plus tôt, cette célébrité croissante qui fait de Masters/Johnson la clinique numéro un attire des convoitises, il n’est donc pas étonnant de voir des cliniques du même genre qui commencent à pulluler un peu partout. Une fois n’est pas coutume, le thème des apparences va entrer en jeu, dans un premier temps ce sont des concurrents qui vont se faire passer pour des clients et qui vont venir espionner les activités de la clinique. Bill et Virginia vont donc décider de combattre le feu par le feu, en se faisant passer pour un couple dans une clinique de Topeka. Les deux personnages vont se prendre au jeu, et cela va amorcer une deuxième partie de saison où les sentiments vont se révéler. Nous reviendrons sur ce point plus tard, lorsque nous nous intéresserons un peu plus en détail aux enjeux relationnels de cette saison.

Pour finir sur la partie professionnelle, l’arrivée des deux nouveaux docteurs va elle aussi grandement impacter l’avenir de la clinique Masters/Johnson. Ces deux personnages vont dans un premier temps éloigner Virginia de Bill, Bill préférant notamment travailler avec Nancy, mais très vite l’alchimie Bill/Virginia va reprendre le dessus, et on va assister à une véritable lutte entre les deux « couples ». Et cela va se jouer notamment au travers des deux personnages féminins. Ces personnages féminins particulièrement forts et qui laissent peu de choix à Bill et Art qui se retrouvent parfois spectateurs de cette petite lutte. Lutte d’ego, lutte de conviction, ce duel entre Virginia et Nancy est l’un des arcs qui va alimenter quasiment toute la saison. Comme dit plus tôt, ces deux personnages sont de véritables alter ego, ce sont également des personnages féminins très libérés, véritable archétype de cette femme moderne qui s’émancipe de son mari ou des hommes de son entourage. La série a toujours mis en avant ce genre de personnage féminin, notamment au travers de Virginia. Libby Masters prenant elle aussi cette direction dans les dernières saisons, où elle devient très éloignée de son personnage de saison 1. Cela s’est vu de façon exponentielle depuis la séparation avec Bill, et le personnage continue sur sa lancée dans cette quatrième saison, où elle se lance dans une nouvelle carrière.

La confusion des sentiments

Passons désormais au gros morceau de la saison, tout ce qui a trait aux relations entre les personnages. Depuis le début, Masters of sex a fait de la relation entre ses deux personnages principaux le point d’orgue. De la relation strictement professionnelle qui va se transformer en rencontre secrète dans un hôtel, jusqu’à l’aveu des sentiments ressentis de la part de Bill, la série a toujours été très juste sur le traitement et l’évolution du duo Masters/Johnson. La saison 4 ne déroge pas à la règle et tout va très vite être chamboulé. Si Bill a paru pendant toute la série comme le personnage le plus fragile de cette relation sentimentale, s’ouvrant avec Virginia comme jamais il ne l’a fait avec personne, les cartes vont êtres redistribuées dans cette quatrième saison. L’échec de Bill en fin de saison 3 vis-à-vis de Virginia va le détacher de tout ça. Virginia va quant à elle subir un tournant décisif dans l’un des meilleurs épisodes de la série où elle est invitée avec Betty et Lester à une soirée échangiste orchestrée par Nancy et Art, « Coat for keys ». Et c’est là également que Lizzy Caplan déploie toute l’étendue de son talent, et montre bien qu’à défaut de percer au cinéma, le rôle de Virginia Johnson restera le rôle de sa carrière. La sensibilité de son personnage, est ce qui fait sa force, et la séquence avec Art dans l’épisode 4 en est certainement la preuve irréfutable. Jamais Lizzy Caplan n’a été aussi touchante et juste. C’est elle qui va devenir plus vulnérable à partir de ce moment, et Lizzy Caplan est parfaite dans cette situation de personnage vulnérable mais ne laissant rien paraître et continuant à lutter. C’est peut-être là aussi que sa confrontation avec Nancy prend encore plus de sens. La relation entre Nancy et Art pèse énormément sur ce dernier, et il développe une complicité avec Virginia qui possède une vision de l’amour similaire.

Bill est quant à lui toujours en pleine confusion. Divers chemins vont alors être empruntés par le docteur Masters pour essayer de dépasser ses échecs récents. Une exploration du passé, au travers de Libby dans un premier temps va être mise en œuvre, mais également celle d’un passé plus lointain. Revenant à son amour de jeunesse, Bill va essayer de mette le doigt sur ce qui a pu influencer sur ses relations postérieures. Il va à travers ça essayer de trouver une explication  à l’échec de son mariage, cette attirance pour Virginia qui l’a guidé pendant les saisons précédentes. Comme Lizzy Caplan, Michael Sheen est depuis le début impeccable. Son côté un peu perdu dans ses sentiments contraste à merveille avec son côté professionnel où tout est sous contrôle. Si le sexe peut-être le sujet de nombreuses recherches scientifiques, l’amour échappe à toute rationalité, et même le plus grand chercheur en sexologie de la planète n’est qu’une simple créature à la merci de ce sentiment sans pitié.

Depuis le début la série évolue dans un contexte de révolution sexuelle, cette quatrième saison suit donc ce credo . En se concentrant notamment sur l’homosexualité, déjà abordé au travers des personnages de Barton et Betty dans les saisons précédentes. Ici c’est la famille avec parents de même sexe, son acceptation dans la société, les difficultés juridiques qui vont offrir un arc particulièrement émouvant. L’homosexualité va également entrer pour la première fois dans le corps des études conduits par Masters. Grâce à ses études, ils vont pouvoir aborder le sujet très polémique des conversions. Masters of Sex arrive donc très bien à retranscrire une société au travers de sa sexualité et comment celle ci est perçue dans cette période de la fin des années 60, près de 10 ans après la première saison.

Les femmes ont également toujours été au centre de la série. Virginia bien sûr, dont on a déjà parlé, mais également Libby. Libby est un vrai modèle de cette émancipation de la femme car au contraire de Virginia, c’était au départ la femme au foyer rigide. Le chemin parcouru depuis cette première saison est important et aujourd’hui c’est une femme qui prend véritablement son destin en main, n’hésitant pas à s’imposer face à ses nouvelles conquêtes. Cette émancipation s’accompagne de son épanouissement sexuel survenu au cours de la saison précédente, et dont elle va directement expliquer l’importance à Bill. Si les passages avec Libby peuvent paraître à première vue déconnectés de la série et parfois un peu ennuyants, elle n’en reste pas moins le témoin  de cette libération de la femme au cours des années 60 et est un marqueur très important du côté social de la série.

Masters of Sex est sans conteste la meilleure série actuellement en diffusion sur Showtime. Le period drama se fait toujours aussi raffiné et malgré son sujet qui peut paraître tape à l’œil, il est d’une très belle pudeur. Au travers d’une reconstitution impressionnante que ça soit au niveau des décors ou des mœurs, la série de Michelle Ashford explore bien évidemment la place du sexe, mais se concentre avant tout sur des personnages et leurs sentiments troublés. Masters of Sex montre bien que l’amour n’est pas mécanique et qu’il restera toujours un mystère scientifique.

Masters of Sex Saison 4 : Bande Annonce

Synopsis : La clinique Masters/Johnson subit une mauvaise passe. D’un côté Bill Masters s’est trouvé un nouvel ami avec l’alcool, et de l’autre Virginia semble couler une paisible nouvelle vie avec son nouveau mari. Mais tout n’est qu’apparence est le duo va devoir passé outre leur passé pour remettre la clinique et leurs recherches sur de nouveau rails. L’arrivée de nouveaux docteurs va compliquer les choses.

Masters of Sex : Fiche Technique

Création : Michelle Ashford
Casting : Michael Sheen ( Bill Masters) , Lizzy Caplan ( Virginia Johnson), Caitlin Fitzgeral ( Libby Masters), Annaleigh Ashford ( Betty DiMello), Beau Bridges ( Barton Scully), Betty Gilpin ( Nancy Leveau), Jeremy Strong (Art Dreesen)
Musique : Michael Penn
Producteurs : Michelle Ashford, Sarah Timberman, Carl Beverly, Amy Lippman, Judith Verno, Michael Sheen, Lizzy Caplan, Thomas Maier
Genre : Drame, Historique
Format : 10 épisodes de 50 minutes
Diffuseur : Showtime
Première diffusion : 29 septembre 2013

Etats-Unis 2016