Adapté du long métrage de 2009 de Steven Soderbergh, le show Starz, diffusé en US+24 sur OCS Max, nous fait suivre en 13 épisodes l’univers sous-terrain et dangereux des escorts girls.
Synopsis : Christine Reade est une étudiante en droit qui, en parallèle de ses études, réalise un stage dans un grand cabinet d’avocats. Sur conseils d’une amie, elle rentre petit à petit dans le monde très particulier des escorts girls pour financer ses études.
Sujet peu traité en France en vue de son caractère subversif et amorale, citons Jeune et jolie d’Ozon en 2013 ou le documentaire Escort d’Hélène de Crécy en 2011, la prostitution étudiante devient par la caméra de Lodge Kerrigan et la plume d’Amy Seimetz une lutte existentielle pour le pouvoir, et qui dit pouvoir dit bien souvent argent (et vice versa). Le réalisateur est un habitué des plateaux. Ayant déjà réalisé pour Homeland, Longmire, The Killing, The Americans ou Bates Motel, il a dirigé également la scénariste/coproductrice et comédienne. Amy Seimetz, qui joue la sœur de Christine Reade, et lui ont par ailleurs coproduit The Knick aux côtés de Philip Fleishman. Elle décrit la série de la manière suivante : « The Girlfriend Expérience va amener le public au plus près de ce milieu, au point de le bousculer. Il aura l’impression d’être témoin de scènes qu’il ne devrait pas voir. […] Nous l’avons tourné comme un film indépendant. C’est esthétique et très réaliste. » Donner la parole aux créateurs est aussi inutile que demander à un restaurant si sa nourriture est bonne ou à une mère quel est le plus beau des enfants, mais en effet, la photographie assombrie du show et la mise en scène soignée comme un thriller romantique lui donnent raison. Mais est-ce que cette « plongée sans filet dans un monde tabou et intriguant où règnent le sexe et l’argent », comme le décrit OCS, parvient-elle a ébaucher suffisamment d’intérêt pour créer l’addiction ?
« Quand trois millions et demi de gens regardent une série sur le câble, c’est un succès, mais qu’autant de gens voient un film n’en est pas un. Je pense simplement que les films ne comptent plus autant, culturellement. «
Lodge Kerrigan met le doigt sur une problématique, certes culturelle, mais sociétale intéressante. Mais pour quel positionnement ? Vendre cette adaptation au format standard 45 minutes auraient été suicidaire, au nouveau format 60, la question aurait été légitime d’être posée, sur un nombre d’épisode réduit à 5 ou 6. D’autant plus que l’esthétique cinématographique est engageante. Le choix est porté sur l’ellipse et 13 épisodes de 30 minutes. Nous suivons la triple vie d’une belle et relativement jeune étudiante en droit / stagiaire dans l’un des plus gros cabinets d’avocats de Chicago et escort la nuit. Elle n’a qu’une amie, Avery Suhr (vu aussi dans House of Cards, sous le traits de Lisa Williams la petite amie de Rachel Posner) qui l’initie à ce mode de vie nocturne et singulier. Visage fermé, tailleur serré et courbes strictes et sensuelles, Christine incarné par Riley Keough, qui a débuté en tant que mannequin, ne dégage que peu d’empathie tant l’écriture de son personnage est en filigrane, par les conséquences de ses actes plus que par ses actes eux-mêmes. Si les 4 premiers épisodes ne posent que les bases maîtrisées de son périple vers plus de luxe, plus de conquêtes, plus de pouvoir, ils n’en restent pas moins partiellement attrayant. La faute à quoi ?
En faisant se succéder des bribes clichés du quotidien de Christine, bibliothèque, bureaux vitrés, canapés, la chronologie prend des allures pédantes d’un roman de gare et manque d’un souffle plus réaliste. Lorsque Shame de McQueen éblouit par son élégance invisible érotico-sensuelle, The GE peut séduire pour les mêmes raisons (beaucoup moins « invisible »), mais les 4 épisodes manquent de recul et de rythme, ce qui a pour effet de délaisser le spectateur qui pourrait tout à la fois vaquer à une autre occupation sans perdre le fil, peu trépidant, des activités de Christina Reade. Ses interactions avec Davis Tellis, associé au cabinet Kirkland & Allen, que l’on associe directement au pincé Mickey Doyle dans Broadwalk Empire et l’écrivain Thom Yates dans House of Cards, attisent le feu (courtes flammes et braises fragiles) d’un semblant de curiosité, mais c’est avant tout par son personnage joué par Paul Sparks que cela est dû. Cumulant les interactions à deux, Christine et Avery, Christine et son patron, Christine et la créatrice du site d’escorts, Christine et les hommes, l’échange bilatéral semble constituer à elle seule les tenants et les aboutissants du personnage trop lisse et parfait pour être du commun des mortels (entre Anne Hathaway et Linsay Lohan, bien loin de Mme Tout-le-monde).
Les 4 premiers épisodes ne suffisent pas à se faire un avis objectif sur l’ensemble de la série qui, nous n’en doutons point, doit être d’une excellente facture. The Girlfriend Experience ne joue que difficilement/rarement avec les nerfs du spectateur, mais prenons l’objet comme tel, une baignade en eaux tièdes à demi séditieuse dans l’excitation de se faire reconnaître. Bien que le show aurait gagné à être plus palpitant en jouant avec les codes du thriller, mais tout est encore possible…
The Girlfriend Experience : Bande-annonce
The Girlfriend Experience, épisodes 1 à 4 : Fiche Technique
Création : Steven Soderbergh, Lodge Kerrigan et Amy Seimetz
Réalisation : Lodge Kerrigan et Amy Seimetz
Scénarios : Lodge Kerrigan et Amy Seimetz
Interprétation : Riley Keough, Paul Sparks, Mary Lynn Rajskub, Kate Lyn Sheil, Alexandra Castillo…
Photographie : Steven Meizler
Montage: Greg O’Bryant
Musique : Shane Carruth
Casting : Carmen Cuba, Wittney Horton
Producteurs délégués : Jeff Cuban, Philip Fleishman, Gary Marcus, Cuban Jeff, Steven Soderbergh, Lodge Kerrigan et Amy Seimetz
Genre : drame
Format : 13 épisodes de 30 minutes
Diffusion: Starz, OCS
The Girlfriend Experience qui sera diffusé en exclusivité en France sur la chaine OCS MAX du 11 avril au 20 juin en US + 24. L’intégrale de la saison sera disponible à la demande sur OCS Go dès la diffusion du 1er épisode.
Etats-Unis – 2016