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Un pont au-dessus de l'océan |Copyright Ecransud Distribution

Un Pont au-dessus de l’Océan : quand l’amitié entre les peuples cesse d’être un rêve constamment repoussé

Qui connaît les Osages ? C’est pourtant vers cette tribu amérindienne d’Oklahoma que nous entraîne le fascinant documentaire de Francis Fourcou, sur les pas d’une ancienne amitié née en novembre 1829 et liant ce peuple aux Occitans de Montauban.

Il est des pages d’Histoire qui restent largement méconnues, alors qu’elles offrent de si réconfortantes raisons de croire en l’humain… Ainsi de ces trois membres de la communauté Osage qui, errant en Europe après une éphémère notoriété jusque dans la cour de Charles X, eurent l’idée de rejoindre Montauban pour la bonne raison qu’un évêque, anciennement de leur connaissance, y résidait. Bien leur en prit. Cet homme, aidé du maire de la ville, leva auprès des habitants une collecte qui permit le retour des Indiens sur leurs terres nord-américaines et fonda l’amitié des deux peuples.

En 1989, sous l’impulsion de Jean-Claude Drouilhet et de son épouse, une association voit le jour, désireuse de raviver la flamme de cette amitié, qui n’avait pas non plus été oubliée outre-Atlantique. Le réalisateur, lui-même occitan, puisque né en 1955 à Toulouse, est informé du projet et se joint à une expédition qui lui permet de tourner ses premières images auprès des Osages en 2002. Il peut ainsi filmer, deux ans avant sa mort, un précieux entretien avec Lucile Robedeaux, l’une des trois dernières locutrices de la langue osage qui semble alors vouée à disparaître, tout comme a pu l’être, naguère, l’occitan.

C’était compter sans la puissance des rêves, leur énergie propre, et le sursaut de plusieurs Indiens de la communauté qui, ayant sondé le précipice qui les lorgnait, entreprirent, avec succès, de sauver leur langue. On rencontre ainsi l’universitaire Herman Mongrain Lookout qui, soutenu, en 2014, par le chef osage Jim Gray, entreprend de créer tout un alphabet propre à la langue osage et apte à transcrire ses phonèmes singuliers, faisant ainsi de cette langue jusqu’alors exclusivement orale une langue accédant à l’écrit, donc promise à une plus ample longévité et une plus vaste diffusion. De fait, depuis 2002, les locuteurs osages se sont multipliés et leur langue n’est plus menacée de disparition.

Respectant une équité parfaite, le documentaire entremêle deux axes, à la fois parallèles et conjoints : une visite de la poétesse Osage Chelsea Tayrien Hicks en Occitanie ; une visite de la comédienne et chanteuse Isabelle François en Oklahoma. Les langues occitane, Osage et américaine, prononcées par ces deux narratrices en voix off, accompagnent des images souvent somptueuses par leurs mélodies et leurs rythmes envoûtants, comme un phylactère délicat et volontiers poétique, louant, au féminin, la résistance linguistique.

S’ouvrant sur les hauts plateaux lunaires de l’Aubrac, qui nouent sans difficulté le dialogue avec les plaines ondulées de l’Oklahoma, le long-métrage fait affleurer comme naturellement les profondes proximités qui relient les deux peuples. Ainsi, au-delà deux langues aux sonorités fascinantes, menacées puis sauvées, surgit soudain une évidente parenté entre les bisons peints de la Grotte de Niaux, en Ariège, et ceux, encore tout de chair, d’os et de longs poils, qui paissent tranquillement les terres états-uniennes. Les danses de fêtes populaires occitanes paraissent soudain bien proches des danses rituelles osages, dans lesquelles les Indiens tressautent au rythme saccadé de leurs chants.

À l’heure où des communautés humaines s’entre-déchirent, où règne la haine, et où Scorsese évoque cette même communauté Osage, mais sous l’angle de la violence, dans Killers of the Flower Moon (18 octobre 2023), il est bienfaisant d’être témoin d’une telle fraternité et entente entre des peuples. Sans doute, certes, le rapprochement est-il plus aisé, moins risqué, lorsqu’un océan sépare ces peuples, nécessitant qu’un pont soit jeté, plutôt que lorsque ceux-ci vivent en voisins, tombant dans le sinistre schéma des  frères ennemis.

Synopsis du film : Des grandes plaines osages d’Oklahoma aux montagnes d’Occitanie, deux cultures autochtones se parlent et se répondent. Deux femmes nous racontent ces cultures  aux langues menacées. Isabelle l’Occitane chez les Osages, Chelsea, l’Osage chez les Occitans, parcourant les paysages et l’histoire des plaines d’Amérique et des montagnes d’Occitanie. 

Un pont au-dessus de l’océan : Bande-annonce

De Francis Fourcou
Par Francis Fourcou
25 octobre 2023 en salle / 1h 40min / Documentaire
Distributeur : Ecransud Distribution

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