Voici du cinéma jubilatoire et totalement improbable venu des antipodes, en l’occurrence la Finlande, une cinématographie très rare dans nos contrées. SISU, de l’or et du sang dispose de gros moyens utilisés à bon escient pour un plaisir coupable assumé et généreux, entre le bis et le Z haut de gamme en plus d’être doté d’un contexte peu commun.
Un film finlandais sur nos écrans, ce n’est pas si souvent, il faut l’avouer. Et qui, de surcroît, se positionne comme un film d’action se déroulant durant la Seconde Guerre Mondiale, nanti de gros moyens, et parsemé de quelques pointes d’humour noir… Voilà donc une proposition peu courante, voire totalement inédite.
C’est donc avec une grande curiosité mêlée d’une pointe d’appréhension que l’on se rend à la projection de cet OFNI (Objet Filmique Non Identifié). Et on peut clairement affirmer en sortant de la salle que la note d’intention est bien tenue et que SISU : de l’or et du sang coche toutes les cases de la réussite, si on veut bien le circonscrire uniquement à ce qu’il entend proposer. Ni plus, ni moins, mais c’est déjà pas mal. On en sera donc quitte pour une très bonne série B, pleine d’idées et dont le côté exotique (même si elle vient du froid) lui donne un cachet particulier.
Néanmoins, on ne peut pas vraiment dire que l’intrigue soit très développée. Cependant, elle n’est pas exempte de surprises propres à la folie intrinsèque du projet. Linéaire et écrite pour que ce long-métrage hors de sentiers battus ait le plus de scènes d’action possibles, elle tient la route sur son heure et demie top chrono. Car dans SISU : de l’or et du sang, le but affiché est de tuer le plus de nazis possible sur un postulat qui en vaut un autre.
Celui-ci se résume d’ailleurs comme suit : un ancien soldat finlandais, devenu chercheur d’or et à la réputation confinant au mythe, tente par tous les moyens (surtout violents) de récupérer son trésor que lui ont pris des allemands croisés sur sa route. Des nazis en pleine débâcle à la fin de la guerre. Il n’y aura guère plus de surprises et de développements narratifs que cette entame claire et simple et c’est peut-être aussi bien la faiblesse du film que sa force.
En effet, on n’en demandait pas plus. Des circonvolutions, sous-intrigues et autres approfondissements auraient aussi peut-être pu rendre cette curiosité encore plus jouissive tout comme la rendre indigeste. Alors oui, on aurait peut-être secrètement aimé que ce soit encore plus fou et imprévisible mais en l’état c’est déjà vraiment bon et Sisu : de l’or et du sang agirait presque comme un outil de catharsis cinématographique tant il est bon de voir de vilains nazis se faire dézinguer par tous les moyens possibles et surtout les plus improbables. Comme on dit, il faut savoir se réjouir de ce que l’on a et ne pas trop pinailler. Et en ce qui concerne cette œuvre improbable, c’est clairement le cas.
Le cinéaste Jalmari Helander n’en est pas pour autant à son coup d’essai en ce qui concerne ce type de projets complètement azimutés mais revigorants. Enfin, quand ils sont exécutés avec amour et soin. On lui doit également le fameux Père Noël origines au postulat tout aussi barjo. On sent qu’il a une affection toute particulière pour ses personnages hors du commun et les films bis. Il aime à donner au public des histoires amusantes et folles.
Et l’homme n’est pas un manchot tant son nouveau film est formellement abouti. Du laisser-aller sur le plan visuel aurait pu faire loucher la chose encore plus vers le Z. Que nenni! Il y a de l’idée à chaque plan, un sens du cadre irréprochable et une empreinte esthétique forte. C’est ce qu’on appelle un film beau à regarder et même s’il ne fait pas réfléchir – on est pas là pour cela – il flatte la rétine agréablement.
On pourra reprocher que le cinéaste ait choisi de situer la majeure partie de son histoire dans des paysages qui s’avèrent un peu lassants à force et ne permettant pas la surabondance d’idées au niveau de l’action et des mises à mort. Il n’empêche, on a malgré tout le droit à quelques moments croquignolets et totalement dingues et ces étendues de plaine glaciales donnent un charme singulier à l’ensemble. On pense parfois à Mad Max : Fury Road sur le principe de la mobilité de ce convoi ou à (oui encore) la saga John Wick avec ce héros increvable et à l’aura presque mythologique. Une aura qu’on aurait d’ailleurs aimé voir davantage exposée et creusée.
Notons que Sisu : de l’or et des braves enchaîne ses morceaux de bravoure à une vitesse de croisière tout de même bien rythmée et qui ne nous laisse pas souffler. Sa croisade vengeresse et nos chers soldats nazis en prennent en effet pour leur grade avec une régularité métronomique. Et on le droit à quelques séquences plutôt impressionnantes et qu’on n’aurait jamais cru voir dans une production finlandaise, comme par exemple le final dans l’avion. Si pas mal d’idées sont piochées un peu partout, le rendu final de la plupart des séquences spectaculaires est vraiment bon.
Voilà donc une série B de luxe où tout le monde ou presque parle anglais (les visées d’export international du film sont plutôt voyantes) et il faut avouer que, encore une fois, ce n’est pas très crédible voire plutôt ridicule, à l’instar des films d’époque français faits par les américains. Mais ce procédé n’est pas nouveau. Hormis cela et un script très linéaire qui manque un peu de développements, Helander nous convie à une purge nazie hautement jubilatoire à la fois drôle, violente et référencée. Un film que ne renierait pas Tarantino pour sûr. Du cinéma rare, un tantinet bis mais fait avec amour et une envie de faire plaisir à son public comme on en voit que trop peu.
À noter que si le public français découvre le film maintenant et après un film Netflix similaire mais bien moins bon (Blood & Gold), le public outre-Atlantique a eu la chance de le voir fin avril, Alors ne vous fiez pas au synopsis très similaire, celui-ci est bien meilleur!
Bande-annonce : SISU, de l’or et du sang.
Synopsis : Finlande, 1944. Dans la nature sauvage et hostile de la Laponie, alors occupée par les nazis, un ancien soldat découvre un gisement d’or. Prêt à tout pour sauver son précieux butin, il ne reculera devant rien, quitte à devoir assassiner jusqu’au dernier SS qui se trouverait sur son chemin.
Fiche technique : SISU
Réalisation : Jalmari Helander.
Avec Jorma Tommila, Aksel Hennie, Jack Doolan, …
Production : A24.
Pays de production : Finlande.
Distribution France : SND.
Durée : 1h31.
Genre : Action – Guerre.
Date de sortie : 21 juin 2023