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Pour le Réconfort de Vincent Macaigne, une lutte des classes hystérique

Portrait un peu gigogne d’une France qui vacille et qui part « en guerre civile », Pour le réconfort de Vincent Macaigne esquinte ses idéaux pour tirer à boulets rouges sur tous ses personnages et dessiner une lutte des classes acerbe entre « aristocrates » et « bouseux ».

Pour le réconfort n’est qu’un simple titre. Mais en aucun cas une réalité. Deux héritiers (Pascal et Pauline), qui vivent l’un et l’autre à l’étranger, vont revenir à Orléans, terre de leur enfance. Faute d’avoir payé les traites de leur domaine, ils voient leur maison et leur terrain mis aux enchères pendant qu’Emmanuel et sa femme souhaitent racheter la propriété pour étendre leur projet de complexe d’une maison de retraite. Les premières discussions, du simple gag au petit soupir, jusqu’aux regards instantanés dans le vague, font miroiter un combat ressemblant à un règlement de comptes hystérique. Les repas entre amis, les apéritifs de bienvenue ne sont que des prétextes à s’ignorer encore plus les uns les autres et à amplifier la différence de mentalité entre chacun.

Filmés dans un cadre resserré, qui accentue les convergences de vues et les divergences de positions, le film de Vincent Macaigne ne cherche absolument pas à diminuer sa charge de tension : les personnages soit s’ignorent avec complaisance soit se gueulent dessus avec véhémence. Alors qu’il est la tête de gondole d’un cinéma français qui lorgne vers le comique de situation aussi piquant que pince sans rire, l’acteur se mue cette fois-ci en réalisateur pour assombrir ses notes d’intention et porter aux nues une œuvre aussi ironique et drôle qu’extrêmement noire dans sa violence verbale : l’une des grandes qualités de l’œuvre étant de faire cohabiter ses grandes joutes verbales où ça hurle de tous les côtés à des moments plus introspectifs où les regards en disent long sur la colère intérieure qui animent certains protagonistes.

Bizarrement, malgré les quolibets, les querelles qui ne cessent de voir le jour, les éclatements de voix, une mise en scène presque documentariste faite à l’arrache, et cet aspect théâtral qui rend le film très physique et organique dans sa mise en image, les acteurs de Pour le réconfort ne sont jamais en sur-jeu, mais éclaboussent et malmènent le film à travers une emphase parfaite avec leurs personnages comme en témoigne l’interprétation magnifiquement émouvante et haineuse d’Emmanuel Matte. La récupération de la maison n’est qu’un fil rouge qui matérialise les antagonismes entre les « amis d’enfance » : le véritable problème, la réelle dramaturgie du film, provient de ce que représente ce terrain et l’opportunisme qui cogite autour de ce domaine.

Entre Pauline et Pascal, nés une cuillère en argent dans la bouche, puis Emmanuel et les autres qui sont nés dans la merde et la putréfaction de ces terres agricoles d’Orléans, le clivage se fait sentir et Pour le réconfort tournera autour de cette dichotomie politique. Entre ceux qui voient en la vieillesse un gain d’argent inespéré pour une jeunesse qui met les mains dans le cambouis, et ceux qui voient en l’héritage le prisme d’une richesse superficielle et profiteuse, Pour le réconfort prend les allures de repas de famille comme on en a tous connus : on ne doit jamais parler politique, sinon, ça dérape.

Certes, dit comme cela, on pourrait penser que Vincent Macaigne enfonce des portes ouvertes avec sa représentation des classes françaises un poil grossière : sauf que le film devient un jeu de ping-pong abrasif où tout le monde se renvoie la balle de façon péremptoire à l’image de l’une des plus poignantes séquences du film, cette balade en voiture entre Pascal et Emmanuel qui finit en dispute ombrageuse. Aussi horizontal que vertical, le positionnement de Vincent Macaigne distant, laisse apparaître cette part de folie satirique contagieuse qui alimente Pour le réconfort.

Synopsis:  Pascal et Pauline reviennent sur les terres de leurs parents après des années de voyage, et se retrouvent dans l’impossibilité de payer les traites du domaine. Ils se confrontent à leurs amis d’enfance qui eux, d’origine modeste, n’ont jamais quitté leur campagne. Et à Emmanuel surtout, qui veut racheter leur terrain au meilleur prix pour l’expansion de ses maisons de retraite. Entre les amitiés d’hier et les envies de demain, la guerre aura-t-elle lieu ?

Pour le réconfort : bande annonce

Pour le réconfort – Fiche technique

Réalisateurs : Vincent macaigne
Scénario : Vincent Macaigne
Interprétation : Emmanuel Matte, Laure Calamy, Joséphine de Meaux…
Photographie : Mauro Herce
Montage : Mauro Herce
Producteurs : Charles Gillibert
Maisons de production : CG Cinéma, Les canards sauvages
Distribution (France) : UFO Distribution
Durée : 90 min
Genre : Comédie, tragédie
Date de sortie : 25  Octobre 2017

France – 2017