Divorce-Blu-ray-critique

« Divorce » : Richard Burton et Elizabeth Taylor unis dans la désunion

Jonathan Fanara Responsable des pages Littérature, Essais & Bandes dessinées et des actualités DVD/bluray

LCJ Éditions propose en blu-ray le Divorce de Waris Hussein, sorti en 1973. Richard Burton et Elizabeth Taylor y interprètent un couple sur le point d’imploser.

Divorce est un téléfilm qui se décompose en deux parties d’environ 75 minutes chacune. La première d’entre elles adopte le point de vue de Martin Reynolds, la seconde celui de sa femme Jane. Les deux personnages se voient en quelque sorte unis dans la désunion : avec leur propre sensibilité, ils vont livrer un témoignage partiel et partial sur la séparation et les affects qu’elle occasionne. Le réalisateur britannique Waris Hussein et le scénariste John Hopkins expriment ainsi deux regards subjectifs, auxquels tout un chacun peut s’identifier, et qui, ensemble, forment un diptyque s’inscrivant au plus près de l’histoire vécue par le couple et ses enfants.

Les relations amoureuses se lestent toujours de nuances. La langue grecque emploie ainsi trois vocables pour en déterminer la teneur : éros, philia et agapè. Le premier caractérise un désir passionnel, le second désigne un amour profond et le dernier relève plutôt d’une relation mi-amicale mi-sentimentale. Pris dans sa globalité, Divorce dissémine des indices renvoyant à chacun de ces trois états amoureux. Mais lorsque l’on y regarde de plus près, le caractère passionnel affleure surtout dans les moments de possessivité/jalousie, tandis que les attributs philia et agapè semblent plus pertinents au regard des représentations offertes par Waris Hussein.

La distinction fait d’autant plus sens que Divorce s’appréhende comme une longue introspection psychologique des deux principaux personnages, Martin et Jane. Le récit est plus patient que spectaculaire, plus observationnel que dynamique. Il est façonné à partir de tranches de vie accolées les unes aux autres et scrutées selon deux points de vue différents et complémentaires. Si Richard Burton et Elizabeth Taylor retiennent l’attention, c’est avant tout pour la dimension universelle des situations qu’ils campent. Divorce tient davantage du mariage qui se consume à petit feu que du couple calciné au lance-flammes.

Divorce est un numéro d’équilibriste. Pour Waris Hussein, il s’agit de tenir le spectateur en haleine pendant 150 minutes en proposant des événements parmi les plus communs inhérents à la séparation et sans jamais recourir à quelque artifice théâtral. Il y a bien quelques effets visuels çà et là, tels que ces brusques hiatus sonores et séquentiels. Mais l’essentiel du film repose sur les relations adultères, la jalousie, les réminiscences amoureuses, les rapports filiaux, les articulations entre vie privée et vie professionnelle, la difficulté de s’épanouir dans et en dehors du mariage. Lui signifiant son départ prochain pour l’Afrique, Martin avance à sa femme : « Il y a longtemps que tu as envie de me quitter, je t’en offre la possibilité. » Dans le segment lui étant consacré, Jane se verra pourtant rétorquer : « Tu considères la vie passée avec ton mari comme si c’était le paradis. »

La réalité se situe dans les interstices de ces deux assertions. Le couple, désormais séparé, se remémore avec affection et nostalgie certains moments de tendresse passés. La complicité n’a pas pour autant disparu. Une rencontre dans une soirée occasionne un peu d’embarras, mais Martin et Jane commentent finalement ironiquement, en évoquant les regards curieux : « Nous ne faisons que rompre leur monotonie. » Preuve qu’une telle relation n’est jamais vraiment refermée, les trahisons dévoilées tardivement généreront douleurs et ressentiments. Et les appels nocturnes ou les réclamations incessantes des enfants ne paraissent pas non plus de nature à normaliser la situation.

Divorce est un témoignage précieux sur le mariage, son ciment et ses carcans. D’ambition modeste, la mise en scène de Waris Hussein passe au second plan en ce sens qu’elle s’efface derrière le portrait de couple et les tensions qui le sous-tendent. Le long métrage n’est toutefois pas exempt de forces d’appoint : son ouverture présente par exemple de somptueuses vues extérieures de Rome, du Colisée à la Piazza Navona en passant par le Foro Romano, tandis que les activités professionnelles de Martin sont l’occasion de découvrir les rapports conflictuels entre les nations africaines et les multinationales occidentales, notamment celles actives dans l’extraction minière.

TECHNIQUE & BONUS

Le film est restauré d’après un master 2K. L’image est stable, le grain homogène et bien géré, et il y a finalement peu à redire sur la qualité technique du disque. Il est par contre difficile de taire sa déception devant l’absence de bonus, surtout en considérant que le film demeure méconnu et qu’il est difficile d’en trouver des commentaires pertinents ou des descriptions étayées dans la littérature consacrée au cinéma.

Langues : français/anglais (aucun sous-titre)
Format image : 1080p HD – 4/3 – 1.33
Durée (mn) : 2 x 80 minutes
couleur/noir blanc : Couleur
Son : Dolby Digital Stéréo 2.0 (dual layer)

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