Il en aura fallu du temps pour que Steven Spielberg puisse enfin se lancer dans un projet qui lui tenait à cœur depuis de nombreuses années, l’adaptation des aventures de Tintin, le reporter le plus connu de la bande dessinée franco-belge. C’est donc avec une équipe de prestige parmi laquelle on retrouve également Edgar Wright, Steven Moffat et Peter Jackson, que Le Secret de la Licorne débarque sur les écrans en 2011. Grâce à la technologie de motion capture, Spielberg donne naissance à un film d’animation virtuose rendant pleinement hommage au journaliste à la houppette.
Figure emblématique du 9ème art, Tintin est né sous la plume d’Hergé à la fin des années 20. Au fil de 24 albums, le reporter du petit vingtième aura vécu des aventures rocambolesques qu’elles soient en Afrique, en Australie, au fond de l’océan ou sur la Lune, et rencontré des personnages haut en couleur comme le marin porté sur la bouteille et les jurons, le Capitaine Haddock, le duo de policiers gaffeurs, Dupond et Dupont ou encore une cantatrice à la voix très haut perchée, Bianca Castafiore. Un matériau très fertile donc pour une adaptation qui n’est bien évidemment pas le premier essai. Outre la série animée ayant marqué l’enfance de bons nombres de personnes, il y a eu quelques films lives racontant des histoires originales sorties dans les années 60 avec Jean-Pierre Talbot dans le rôle de Tintin. Des œuvres qui n’auront cependant pas marqué les esprits. Il aura donc fallu attendre le grand Steven Spielberg pour voir une adaptation digne de ce nom du monument de la bande dessinée sur les écrans de cinéma.
Le premier choix notable de la part de Spielberg et de son équipe de scénaristes est de ne pas adapter un unique album. Si le film reprend le titre et l’intrigue principale du Secret de la Licorne, de nombreux éléments d’autres aventures de Tintin y seront incorporés à commencer par Le Crabe aux pinces d’or par le biais du bateau Karaboudjan et de son capitaine, le fameux Haddock. Tout au long du film, Spielberg va égrainer un certain nombre de renvois à l’œuvre d’Hergé, avec par exemple une apparition de la Castafiore ou des allusions plus discrètes aux Sept boules de cristal, au Lotus Bleu ou encore au Sceptre d’Ottokar. Quand on regarde cette adaptation de Tintin, l’amour que porte Spielberg à ce personnage transparaît à chaque moment, et le cinéaste américain arrive à retranscrire à merveille ce qui fait le plaisir des tintinophiles depuis plus de 80 ans. Spielberg prend en effet au pied de la lettre le mot aventure du titre et lorgne très facilement du côté de sa propre saga d’aventure, Indiana Jones. En mêlant humour bon enfant et séquences d’action impressionnantes, le tout en voyageant à travers le monde pour résoudre un mystère autour d’une maquette de bateau, Spielberg offre un divertissement mené tambour battant sans temps mort et en mettant plein les yeux aux petits et aux grands.
À partir de là, il est fondamental de s’attarder sur la grande particularité de cette adaptation, le choix de l’utilisation de la capture de mouvements. Procédé qui aura eu son heure de gloire dans ce début de siècle avec le personnage de Gollum dans Le Seigneur des anneaux, ou encore l’œuvre visionnaire de James Cameron, Avatar. En utilisant les images de synthèse, Spielberg peut se rapprocher au plus près de la bande dessinée de Hergé, tout en lui offrant une modernité époustouflante. Ce travail sur l’animation a également l’avantage d’offrir des moyens quasi-illimités dans la mise en scène. C’est particulièrement à ce niveau que Les Aventures de Tintin se révèle être un film d’une virtuosité frappante. On l’observe notamment au travers de cette maîtrise des transitions dans l’espace, offrant une seconde jeunesse au fondu que cela soit de manière très ponctuelle avec cette poignée de main se transformant en dune de sable ou pour amorcer une identification au passé comme la fameuse séquence où un Haddock victime du soleil et du manque d’alcool dévoile l’histoire de son ancêtre le chevalier de Haddoque et de son affrontement face au terrible Rackham le Rouge. La fluidité est également l’un des maîtres mots de Spielberg, notamment en ce qui concerne ses scènes d’action. On repense forcément à la séquence citée plus haut avec ce duel aux sabres où la caméra se déplace avec une aisance insolente dans les différents niveaux de la Licorne tout en suivant une mèche qui se consume, mais là où la réalisation de Spielberg se fait encore plus ahurissante, c’est évidemment dans cette poursuite en plan séquence à couper le souffle. C’est la maestria des mouvements de la caméra suivant cette chasse effrénée entre Sakharine et Tintin dans un environnement où la richesse se trouve autant au premier qu’au second plan qu’on ne sait plus véritablement où donner de la tête.
En faisant entrer Tintin dans le 21ème siècle, Spielberg assure une nouvelle fois sa place de cinéaste visionnaire, et l’un des plus grands auteurs de divertissement. D’une modernité folle, tout en gardant cet aspect hors du temps propre au héros de Hergé, Les Aventures de Tintin : Le Secret de la Licorne a malgré cela reçu un accueil plutôt mitigé. 8 ans après, on attend toujours une suite qui devrait être confiée à Peter Jackson.
Les Aventures de Tintin : Le Secret de la Licorne – Bande-Annonce
Les Aventures de Tintin : Le Secret de la Licorne – Fiche Technique
Réalisateur : Steven Spielberg
Scénario : Steven Moffat, Joe Cornish, Edgar Wright
Interprètes : Jamie Bell, Andy Serkis, Daniel Craig, Simon Pegg, Nick Frost
Photographie : Janusz Kaminski
Montage : Michael Kahn
Société(s) de Production : Amblin Entertainment, The Kennedy/Marshall Company et Wingnut Films
Distribution : Sony Pictures Releasing France
Genre : Aventure, Animation
Date de sortie : 26 octobre 2011
États-Unis – 2011