L’Amour et les Forêts, un film édifiant de Valérie Donzelli sur l’horreur de l’emprise et de la violence conjugale

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L'Amour et les Forêts - Melvil Poupaud, Virginie Efira Photo ajoutée le 1 décembre 2022 |Copyright 2023 RECTANGLE PRODUCTIONS - FRANCE 2 CINÉMA - LES FILMS DE FRANÇOISE
Beatrice Delesalle Redactrice LeMagduCiné

L’Amour et les Forêts de Valérie Donzelli est une démonstration impeccable de l’horreur de l’emprise masculine et de la violence conjugale. Impeccable, mais un peu trop linéaire et didactique.

Synopsis de l’Amour et les Forêts :  Quand Blanche croise le chemin de Grégoire, elle pense rencontrer celui qu’elle cherche. Les liens qui les unissent se tissent rapidement et leur histoire se construit dans l’emportement. Le couple déménage, Blanche s’éloigne de sa famille, de sa sœur jumelle, s’ouvre à une nouvelle vie. Mais fil après fil, elle se retrouve sous l’emprise d’un homme possessif et dangereux.

L’Enfer

Un peu à la manière de Justine Triet, la fraîche lauréate de la Palme d’Or à Cannes, Valérie Donzelli trace un sillon discret mais certain dans le cinéma français. Des sujets intimistes, quand ils ne sont pas intimes ; mais surtout, la cinéaste sait mettre une touche de poésie à un endroit ou à un autre dans ses films. Certaines fois, le geste est malheureux, comme dans le récent Notre-Dame, trop pétri de digressions pour vraiment tenir la distance, mais dans l’ensemble cette poésie caractérise joliment le travail de la cinéaste.

L’Amour et les Forêts, une adaptation du roman éponyme de Eric Reinhardt, n’est pas différent. Le film, assez programmatique il faut l’avouer, est sombre par définition. On est dans l’histoire d’une terrible emprise qu’on voit gonfler sous nos yeux.  Et pourtant, une vraie trouée poétique surgit au milieu de ce chaos, au creux d’une forêt, parmi celles du titre du métrage : Blanche, la protagoniste interprétée par Virginie Efira, descend dans les affres de la violence conjugale, mais parvient à  s’offrir une aventure quasi-féérique dans un lieu et avec un homme idylliques (douceur ineffable de Bertrand Belin) : sans doute une réminiscence de ses débuts avec Grégoire (Melvil Poupaud), ….

Un film programmatique en effet, que l’Amour et les Forêts. C’est ce qu’on pourrait lui reprocher, malgré une interprétation impeccable de la part des acteurs, une Virginie Efira désormais en pilotage automatique mais maîtrisé, tant les rôles pleuvent sur elle, et un Melvil Poupaud qui rajoute brillamment le rôle du salaud pervers narcissique à son arc ; des décors léchés, et un rythme somme toute soutenu. L’histoire est déroulée d’une manière très linéaire, et la trajectoire du point A au point B est tracée au feutre indélébile. On découvre Blanche et Grégoire au début de leur histoire commune. Une belle histoire romantique et sensuelle, soulignée de néons rouges lors des scènes intimes, pour dire leur passion. On pense évidemment à Clouzot et aux effets de lumière de son Enfer inachevé. On ne sait rien de ce qu’ils étaient, mais les choses s’emballent très vite, peut-être un peu trop vite. Grégoire est muté à Metz, Blanche doit quitter sa famille, sa jumelle adorée, sa Normandie, et l’inéluctable point déjà ; Blanche est coupée du monde et se retrouve dans une maison grande, belle, mais totalement ouverte, sans aucun recoin pour échapper à Grégoire.

La tension aurait pu aller crescendo, mais la balise précède toujours la scène d’un cran, et annule tout effet de découverte. L’intention très louable de la cinéaste semble en effet de faire une démonstration implacable de l’emprise de Grégoire  sur Blanche, et plus globalement de mettre en lumière les violences conjugales et leur mécanisme (les questions faussement candides posées à Blanche par l’avocate qu’elle consulte semblent davantage être là pour l’édification du spectateur). Mais en suivant ce chemin ultra-balisé, la réalisatrice ne laisse jamais de la place à la surprise ni à l’imprévu. La scène dans les bois, déjà citée, sera le seul véritable pas de côté, et pour le coup, porte la fameuse signature poétique de Valérie Donzelli.

L’Amour et les Forêts n’est pas un film raté ;  annoncé notamment comme un thriller, il fait le job. Même si on devine les scènes, on ne manque pas de sursauter, on a peur de Grégoire, on a peur pour Blanche, on est impatient de connaître la conclusion de l’histoire. Ce n’est pas si mal, même si on attendait peut-être autre chose de la réalisatrice de La Guerre est déclarée, un film autrement plus intense…

L’Amour et les Forêts – Bande annonce

L’Amour et les Forêts – Fiche technique

Réalisatrice : Valérie Donzelli
Scénario : Valérie Donzelli  & Audrey Diwan, adapté du roman éponyme de Eric Reinhardt
Interprétation : Virginie Efira (Blanche Renard / Rose Renard), Melvil Poupaud (Grégoire Lamoureux), Dominique Reymond (L’avocate), Romane Bohringer (Delphineà), Virginie Ledoyen (Candice), Marie Rivière (La mère), Nathalie Richard (La gynécologue), Guang Huo  (Tony), Laurence Côte (Catherine, l’infirmière scolaire),Bertrand Belin (David)
Photographie : Laurent Tangy
Montage : Pauline Gaillard
Musique : Gabriel Yared
Producteurs : Alice Girard, Edouard Weil
Maisons de Production : Rectangle Productions, France 2 Cinéma, co-production : Les Films de Françoise
Distribution (France) : Diaphana Films
Durée : 105 min.
Genre : Drame, Thriller
Date de sortie : 24 Mai 2023
France – 2022

Note des lecteurs3 Notes
3.5
Redactrice LeMagduCiné