La 37ème édition du Festival International du Premier Film d’Annonay a ouvert ses portes le 7 février 2020. En cette occasion, LeMagDuCiné a posé quelques questions à son directeur artistique, Gaël Labanti.
Pourriez-vous présenter le festival d’Annonay ?
Le Festival international du Premier Film d’Annonay a été créé en 1983. Il s’agit donc de sa 37ème édition. Il a la particularité d’être l’émanation d’une MJC. Le festival est dédié à la révélation de jeunes cinéastes du monde entier, puisqu’il présente des premiers longs métrages de fiction. Notre objectif est d’être un tremplin pour des cinéastes qui font leurs premiers pas.
La seconde particularité, c’est que le choix de films en sélection est fait par un comité de sélection composé de bénévoles : tout un chacun peut intégrer le comité. Les visionnages sont collégiaux et coordonnés par le directeur artistique.
Au total, nous avons entre 50 et 55 films par édition, et nous totalisons 20 000 spectateurs.
Et vous faites une première pré-sélection ?
Oui, j’effectue un premier tri. Dans la section compétition, nous avons dix longs métrages, dix films inédits qui n’ont pas de sortie prévue en France. Je fais donc le tour des festivals de cinéma, surtout Cannes et son marché du film. Je fais un travail de démarchage auprès des producteurs pour qu’ils nous envoient des premiers longs métrages.
Nous recevons ainsi 200 films du monde entier. Un premier tri se fait par mes soins en amont du comité.
Depuis quelques temps, nous remarquons un nombre de plus en plus important de films reçus, qui atteste d’une démocratisation des moyens de productions. Avant, faire un film était l’apanage d’une classe aisée et privilégiée, mais maintenant tout le monde peut le faire avec son portable.
Vous venez de parler de la section « compétition ». Il y a donc d’autres sections ?
Le festival a 5 ou 6 sections, toujours liées aux premiers longs métrages.
Nous avons ainsi une section « Premiers films hors compétition ». Pourquoi « hors compétition » ? Parce que ces films ont déjà été distribués en France. Nous organisons ainsi des avant-premières en présence des équipes.
Le festival a aussi une section « Nouveaux visages du cinéma français », qui se tient le premier week-end du festival et présente de jeunes réalisateurs et comédiens. C’est ainsi que nous avons présenté au public des jeunes comédiens comme Pierre Niney ou Anaïs Demoustiers.
Nous présentons aussi une section tout-public, puisque beaucoup de scolaires viennent assister à une projection. Nous organisons donc des projections pour tous les niveaux, depuis la maternelle jusqu’au lycée.
Avez-vous un souvenir marquant ?
Oui, c’était lors de ma première année au Festival, en 2004. Nous avions alors une section VHS : on recevait les films sur un support VHS. Nous avions reçu un film qui venait d’Iran. Je regarde la VHS et découvre qu’il s’agissait de la captation d’un film projeté dans une salle de cinéma. La qualité de l’image et du son était médiocre, mais on voyait facilement les qualités d’écriture et un jeu formidable. Du coup, je me renseigne auprès du producteur pour savoir si on pouvait avoir le film pour le festival.
Le premier obstacle, c’est que le film n’avait pas de sous-titres français. Il a donc fallu traduire les sous-titres anglais en français, puis les envoyer un par un au moment de la projection.
Ensuite, je voulais inviter le réalisateur en France, mais il n’avait jamais quitté l’Iran. Nous avons donc oeuvré pour lui fournir un visa, qu’il a obtenu la veille de son départ. De plus, il ne parlait ni français, ni anglais : nous avons dû trouver un traducteur perse.
Finalement, le film est projeté et plaît au jury. Il obtient le prix spécial du jury, ce qui m’a fait très plaisir. Puis le réalisateur retourne en Iran et réalise A Propos d’Elly et Une Séparation.
Le premier film d’Asghar Farhadi s’appelait Dancing in the dust.
En plus du travail de pré-sélection dont vous nous avez déjà parlé, quel est votre rôle en tant que directeur artistique du Festival International du premier film ?
Dans un premier temps, je suis en effet celui qui va chercher la matière première du festival. Puis je coordonne la venue des invités : je prends contact avec les réalisateurs et comédiens. C’est moi qui leur annonce qu’il n’y a pas de gare SNCF à Annonay, ce qui étonne toujours, mais après ça je les rassure : nous sommes civilisés en Ardèche !
Ensuite, je fais la conception du catalogue et la grille des projections. Et pendant le festival je mène les échanges avec les équipes des films après les projections. C’est un boulot à l’année !
Enfin, pouvez-vous nous parler de la prochaine édition ?
La 37ème édition du festival du Festival international du premier film d’Annonay se tiendra du 7 au 17 février. En plus des fondamentaux, c’est-à-dire nos sélections habituelles, cette édition comportera deux particularités.
Tout d’abord, dans les films sélectionnés, nous avons noté un retour vers le mélodrame. D’habitude, pour leur premier film, les réalisateurs sont assez pudiques. Mais cette année, nous avons bien 3 ou 4 films sur les 10 de la section Compétition qui ont fait pleurer le comité de sélection.
Enfin, l’autre particularité de cette édition, c’est que nous allons dédier une journée au collectif 50/50, qui milite pour une plus grande parité dans le cinéma français. Il y a deux ans, au Festival de Cannes 2018, ce collectif s’était fait remarquer en organisant une montée des marches par des réalisatrices et comédiennes. Nous voulons donner un coup de projecteur sur leurs actions en présentant des films de réalisatrices. D’ailleurs, sans que cela ne soit le fruit d’une quelconque politique de « discrimination positive », sur les dix films en compétition cette année, cinq sont réalisés par des femmes.