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X de Ti West : Glaçant et hilarant à la fois, un slasher prometteur pour ce FEFFS 2022!

Dans le cadre du Festival Européen du Film Fantastique de Strasbourg, le nouveau film de Ti West, X, a été projeté en Midnight Movie. Croyez-le ou non mais malgré la dénomination classique de Midnight Movie, celui-ci faisait salle comble et l’audience était en communion autour de ce film.

Le temps se rafraichit enfin et Halloween n’est pas très loin. Fidèle à sa programmation annuelle, Strasbourg nous offre une nouvelle édition du Festival Européen du Film Fantastique (FEFFS). Cette année, nous avons à l’affiche, Nosferatu de Murnau qui fête son centenaire, mais aussi le remake de Werner Herzog. La Belle et la Bête de Jean Cocteau et le Vampire de Dusseldorf de Robert Hossein sont aussi au programme, tout comme le Dracula de Coppola. Mais le film qui retient notre intérêt aujourd’hui est X de Ti West.

Tourné durant l’épidémie de COVID en Nouvelle-Zélande, peu touchée grâce à son statut insulaire, le film nous offre un slasher qui fleure bon les 70’s. Il est le premier volet d’une trilogie. Pearl, le 2e volet arrivera plus tard dans l’année. Puis MaXXXine, viendra compléter l’histoire en 2023.

Synopsis : Houston, Texas, 1979. Wayne, Maxine, RJ, Lorraine, Bobby-Lyne et Jackson sont sur la route vers un nouveau petit tournage porno. Ils atterrissent dans un trou paumé, dans la ferme d’Howard qui n’a plus toute sa tête. Ils avaient loué le local pour le tournage sans dire exactement ce qu’ils y font. Mais ce qui s’annonçait comme un tournage intéressant pour le groupe va virer au cauchemar à cause de l’épouse du fermier, Pearl…

Ti West a été aux manettes de plusieurs séries d’horreur comme L’Exorciste et Scream. Sa filmographie est essentiellement composée de films d’horreur tel que The Innkeepers, le found footage V/H/S et The ABCs of Death. Avec X, il nous refait découvrir un slasher intéressant, descendant direct de ceux de l’âge d’or.

Une esthétique travaillée

Le film est un petit bijou vernis. L’esthétique choisie est fascinante. Les tons pastels et délavés des années 70 fondus dans un grain d’image nette sont magnifiques. Cela rappelle bien évidemment les filtres instagram actuels dénués de tons jaunes et très bucoliques. Jouant à fond la carte 70’s, West use des transitions type « power point » de l’époque pour passer d’une scène à une autre avec un balayage horizontal.

Le bleu et le vert sont omniprésents dans le paysage, accentués par le ciel nuageux dénué de soleil. Il y a toujours comme un léger film grisâtre. Ces couleurs accentuent la noirceur des protagonistes dans les moments nocturnes et de solitude. Cela se vérifie avec les moments où Maxine rencontre Pearl ou lorsqu’elle est seule face à ses démons.

Les seuls moments où une vraie couleur jaune se manifeste sont les moments « humains » de la troupe, lors du tournage des « filles du fermier », où les acteurs s’amusent réellement à faire leur métier, ou encore à la fin, lorsqu’ils partagent des moments de convivialité. Durant ces moments, la lumière du soleil, sur les champs ou sur l’eau, et les lampes ramènent un semblant de vie.

Le rouge reste prédominant dans les scènes de massacre, où il est projeté directement en lumière ou sur une lumière jaunâtre qui vire au carmin, ce qui donne un aspect macabre poussé aux scènes. C’est aussi une couleur de mauvais augure pour les personnages qui en portent.

Jouer avec les symboles

Loin d’être malsain, cela donne un arrière-goût presque « littéraire » au film. En effet, ce n’est pas sans rappeler les figures de style littéraires. À l’instar d’un Edgard Allan Poe lorsque qu’il écrit Le Masque de la Mort Rouge, ce rouge est une couleur d’alerte presque prophétique de la tournure que prendra l’histoire.

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Maxine dans une scène centrale

Lors d’une scène centrale du film, la panoplie lumineuse de Maxine est le bleu, le blanc et le rouge du drapeau américain. Le blanc est reflété sur son visage et son corps de manière diaphane et le bleu des paupières est irisé. Le rouge du bandeau est illuminé comme une auréole sur la tête. Nous pensons que cela a un lien direct avec  les facettes multiples de l’Amérique, celle d’une société prude mais qui comme n’importe quelle autre a un attrait pour le sexe.

Ce qui est d’ailleurs intrigant est l’omniprésence du blanc que portent les acteurs de X, Wayne, Jackson et Bobby-Lyne censés pourtant être des personnes assez peu « pures ». Même Maxine porte du blanc mais d’une autre manière, à travers la cocaïne et la lumière.

Le bleu que porte en permanence Maxine sur les yeux, les ongles et la salopette, même pendant son sommeil est une métaphore du regard différent qu’elle porte sur le monde qui l’entoure. D’ailleurs, bien qu’étant le personnage principal du film, elle n’a pas beaucoup de texte. Mais lorsqu’elle parle, Maxine est incisive, notamment sur sa vision de la pornographie, lorsque Lorraine porte un jugement sur son travail. Mais ce bleu est comme un coup de stabilo sur un texte, il vient mettre en lumière qu’elle est le personnage sur lequel le film est centré, la cible principale du massacre et qu’elle est le centre de l’intrigue.

Les dialogues sont aussi très intéressants car ils concernent leur statut de « paria » dans la société. Ils sont acteurs de X, ils représentent les fantasmes les plus refoulés des « pervers » comme ils les appellent, même de ceux qui se retrouvent dans les discours des évangélistes et des prêcheurs. Ils désacralisent et normalisent la sexualité qui est le besoin qu’ils estiment le plus humain. Au bout du compte, ce qui compte est leur vision d’eux-mêmes plus que celle des autres qui cherchent à les avilir, plus que leurs propres actions.

Un sens de l’humour léger qui tranche avec l’intrigue

Il n’est pas inhabituel d’avoir quelques petits traits d’humour dans les films d’horreur, mais chez celui-ci, il est assez spécial. Ce n’est pas un comique de mots, ni réellement un comique de situation, mais il y a quelque chose de très subtil qui fait que nous rions au visionnage.

L’exemple le plus convainquant que nous ayons trouvé est celui de la scène de Bobby-Lyne en fille de fermier, accueillant Jackson en lui disant « Would you like to…come inside? » et lui de répondre « It would be a pleasure. » Le double sens que relève ce court dialogue chapeauté par la prestation très moyenne de Bobby-Lynn rappelle cette époque Porno Chic où la pornographie se voulait plus sophistiquée qu’un scénario de deux pages mais ne réussissait pas toujours.

C’est d’ailleurs ce que cherchait le réalisateur de « la fille du fermier », le personnage de RJ Nichols, qui a une grande culture cinématographique (ce qui n’a pas manqué à faire rire le public) et cherche à rendre le film équivalent à un Emmanuelle ou un Gorge Profonde. Par ce trait, la passion de RJ Nichols pour le cinéma d’auteur et le cinéma de qualité n’est pas sans rappeler le personnage d’Harvey Wasserman dans The Deuce, qui était un réalisateur très cultivé et qui comprenait le cinéma en dépit des films de mauvaise qualité qu’il devait réaliser.

Le réalisateur nous a aussi joué des tours durant le film, des scènes de massacre comme celle de Wayne où il savait que nous ne supporterions pas la manière dont il serait tué. Il fait donc en sorte de couper la scène et de la remettre à un autre endroit afin de nous surprendre. L’humour réside réellement dans la façon dont les personnes sont tuées, parce qu’à chaque fois nous ne nous y attendons absolument pas. L’élément d’humour sera surtout un comique de situation comme la manière dont la victime se tait à cause du meurtre ou tombe. Nous n’arrivons pas vraiment à le formuler, de ce fait nous conseillons de regarder le film pour comprendre en quoi il est drôle. Cette façon indirecte par laquelle le réalisateur communique avec les spectateurs est d’ailleurs assez amusante.

Conclusion

X est un film réellement étrange pour 2022. Il est réellement très bon. Il n’est pas dans l’excès d’effet spéciaux mais il n’est pas non plus brouillon ou excessivement propre. Il y a un juste équilibre entre le massacre des personnages et l’ambiance angoissante et frissonnante que Ti West prépare en vaguelettes.

Quelque chose de très simple et sans extravagance se dégage de ce film. Le casting est réduit, les divers lieux de tournage aussi. On dirait presque un film indépendant ou étudiant à petit budget. Pourtant, les acteurs sont connus et ont déjà fait des films connus. Jenna Ortega qui joue Lorraine, tient le rôle principal de Wednesday de Tim Burton qui sort bientôt et joue Tara Carpenter dans le nouveau film Scream par exemple.

Nous le conseillons comme un petit échauffement avant Halloween, surtout si vous voulez revoir des slashers comme Massacre à la tronçonneuse par exemple. Peut-elle faudra-t-il juste le regarder parce que Ti West est un réalisateur prometteur dans le genre de l’horreur. Nous sommes très excités à l’idée que ce film soit le 1er d’une trilogie en espérant qu’elle sera aussi bonne que ce premier volet.

Bande-annonce : X

Fiche Technique : X

Réalisateur: Ti West
Scénario: Ti West
Musique: Chelsea Wolfe et Tyler Bates
Durée: 106 minutes
Langue: Anglais
Casting: Mia Goth (Maxine Minx/ Pearl), Martin Henderson (Wayne Gilroy), Owen Campbell (RJ Nichols), Jenna Ortega (Lorraine), Brittany Snow (Bobby-Lyne), Kid Cudi (Jackson Hole), Stephen ure (Howard)

Sources de la rédaction de l’article:

X- imdb ; X- wikipédia , porno chic – wikipédia, the deuce – wikipedia 

Crédit image: X- imdb