Transcendance est une première réalisation pour Wally Pfister, dont le nom parlera malgré tout aux plus cinéphiles.
Le metteur en scène s’est en effet connaître en tant que directeur de la photographie, notamment chez Christopher Nolan, avec qui il a collaboré sur la trilogie du Dark Knight. Pour son premier film sous sa nouvelle casquette, il dirige Johnny Depp dans un thriller de science-fiction, s’interrogeant sur la place de la technologie face à l’être humain.
On retrouve un scénario proche de ce qui se fait depuis déjà un quart de siècle et l’apparition d’Internet, à savoir le problème de l’intelligence artificielle, et des risques que nous fait courir son développement non contrôlé. Skynet, Google, même combat. Un point de départ intéressant, mais qui n’est malheureusement pas bien servi dans le film. Car Pfister est avant tout un technicien pas un conteur, et cela se ressent dans sa façon de dérouler le scénario. Le défaut majeur du film est le manque d’empathie ressenti vis-à-vis des personnages. Trop vite introduits, pas assez incarnés, trop clichés, ils manquent cruellement de matière, pour ainsi dire.
Deppus ex machina
Le duo Depp-Hall n’arrive ainsi jamais à attirer la sympathie, ce qui rend leurs scènes en duo trop lisses, trop creuses. On peine à s’intéresser à leur histoire personnelle, encore plus lorsque celle-ci se désincarne au sens propre. Les réactions d’Evelyn Caster, incarnée par une Rebecca Hall très mal dirigée (un problème de direction d’actrice que l’on retrouve d’ailleurs chez Nolan), sont souvent incompréhensibles, variant d’une scène à l’autre. Quant à Will, joué par un Depp effacé, le spectateur manque de temps pour s’identifier à lui, et les enjeux de l’histoire ainsi que ses motivations personnelles sont trop souvent obscurs, ou au mieux mal définis.
Un problème que l’on retrouve chez l’ensemble des personnages secondaires, qui vont et viennent sans laisser le temps au spectateur de s’attacher. D’autant plus dommage que le casting est de haute volée, avec la présence de Morgan Freeman et Cillian Murphy, tous deux sortis des Dark Knight, mais aussi Paul Bettany ou Kate Mara. L’histoire prend vite trop d’ampleur, et Pfister ne parvient pas à lui donner de la chair.
D’un point de vue technique, en revanche, le résultat est de toute beauté, les images sont magnifiques, les cadres souvent travaillés, les effets spéciaux irréprochables. Pfister est un fervent défenseur de la pellicule, et lorsqu’on admire le résultat, on ne peut que souhaiter longue vie au support. Malgré tout, la mise en scène souffre parfois d’un manque d’idée. On ne s’improvise pas ainsi metteur en scène, et une succession de plans léchés ne suffit pas à faire un bon film.
Au final, avec Transcendance, on se retrouve face à un produit esthétiquement travaillé, mais manquant de vie et de sentiments. Le sujet s’y prête, et peut-être cette froideur est-elle recherchée, comme une forme de mise en abîme à échelle cinématographique. Ce serait un pari risqué, surtout sur 1h53. Le sujet est là, l’idée de base est bonne, mais le manque d’empathie pour les personnages empêchent de pleinement apprécier l’expérience.
Synopsis: Dans un futur proche, un groupe de scientifiques tente de concevoir le premier ordinateur doté d’une conscience et capable de réfléchir de manière autonome. Ils doivent faire face aux attaques de terroristes anti-technologies qui voient dans ce projet une menace pour l’espèce humaine. Lorsque le scientifique à la tête du projet est assassiné, sa femme se sert de l’avancée de ses travaux pour « transcender » l’esprit de son mari dans le premier super ordinateur de l’histoire. Pouvant désormais contrôler tous les réseaux liés à internet, il devient ainsi quasi omnipotent. Mais comment l’arrêter s’il perdait ce qui lui reste d’humanité?
Fiche Technique : Transcendance
États-Unis – 2014
Réalisation: Wally Pfister
Scénario: Jack Paglen
Interprétation: Johnny Depp (Will Caster), Rebecca Hall (Evelyn Caster), Paul Bettany (Max Waters), Morgan Freeman (Joseph Tagger), Kate Mara (Bree), Cillian Murphy (Anderson Buchanan), Cole Hauser (Colonel Stevens)…
Date de sortie: 4 juin 2014
Durée: 2h
Genre: Science-fiction
Image: Jess Hall
Décor: Chris Seagers
Costume: George L. Little
Son: Tim Walston
Montage: David Rosenbloom
Musique: Mychael Danna
Producteur: Kate Cohen, Broderick Johnson, Andrew A. Kosove, Annie Marter, Marisa Polvino, Aaron Ryder, David Valdes
Production: Alcon Entertainment, DMG Entertainment, Syncopy, Straight Up Films
Producteurs exécutifs: Christopher Nolan, Emma Thomas, Dan Mintz
Distributeur: SND
Auteur : Mikael Yung