Succès planétaire depuis son arrivée dans les foyers en 2015, la série animée Miraculous : Les Aventures de Ladybug et Chat Noir s’inscrit désormais dans l’imaginaire collectif d’enfants, d’adolescents et de parents. Le film adapté par Jeremy Zag ne manque donc pas de créer de l’engouement, avant que tout espoir de divertissement ne s’effondre dans ce qui semble être un gloubi-boulga musical, romantique et super-héroïque. Chacun de ces arguments échoue malheureusement sur le grand écran, dont le désastre est proportionnel à son budget pharaonique.
Synopsis : Ladybug va devoir unir ses forces avec Chat Noir, le charismatique justicier masqué qui n’a pas sa langue dans sa poche, pour affronter le Papillon et sa horde de super-vilains, alors que ceux-ci menacent de détruire Paris. Mais, alors que les deux héros se rapprochent, Marinette ignore que derrière son mystérieux complice se cache Adrien, le camarade de classe dont elle est amoureuse…
Rockstar de compétition sur la scène locale et internationale, nous sommes bien loin du miracle annoncé dans cette animation à la 3D bien léchée, qui en oublie l’identité sur laquelle la série a bâti son succès. Que l’on soit fin gourmet de cette sucrerie matinale sur TF1 ou un accompagnant qui découvre la première fois tout un tas de héros collégiens qui prennent d’assaut la capitale parisienne, il y a de quoi prendre à malin plaisir à diffuser une aura positive, afin de conquérir le cœur de nouveaux fans. Hélas, le résultat est consternant. Le producteur et compositeur français Jeremy Zag est seul à la barre d’un projet ambitieux et qui jongle constamment entre les genres sans réellement savoir quoi en faire. Sans Thomas Astruc, la dramaturgie est inexistante et ce vide laisse place à une chimère sans humour, sans émotion et sans saveur.
Cocci claque et chaton flop
Paris est menacé par tout un troupeau de vilains, mais les forces du bien ont souvent le dernier mot dans cette affaire. L’ouverture compte sur la voix-off du maître Fu pour mettre les choses au clair, une démarche qui ne s’éternise pas plus que ça en illustration et tant mieux. Mais pour que ce soit limpide pour tous, plusieurs chansonnettes, qui souhaitent emprunter à Disney son champ musical, freine tout envie de poursuivre cette aventure colorée et surstylisée dans des apartés qui ne font que répéter ce qui a déjà été dit un peu plutôt. Amplifier les émotions et mettre des mots sur les enjeux, voilà les véritables motivations de ces scénettes, dispensables et qui ne baignent pas dans un rêve bleu quand elles ne constituent pas un prétexte clipesque pour récupérer l’attention des plus jeunes spectateurs, ceux-là même qui ne vont fondamentalement rien apprendre de plus que dans leur feuilleton matinal.
Nous suivons le parcours de Marinette Dupain-Cheng, dont les parents ont l’air plus préoccupés à soigner le glaçage de leurs pâtisseries que d’assister leur fille en détresse. Mal dans sa peau, mal dans son environnement, la jeune collégienne enchaîne les maladresses jusqu’à ce que des boucles d’oreilles magiques lui apportent plus de chance dans sa vie. Elle devient ainsi la Ladybug et combat des individus remplis de haine aux côtés de Chat Noir, un Miraculous complémentaire. La première est mue part un désir de création, tandis que le second est possédé par un esprit de destruction. Pas étonnant, sachant que celui qui se cache sous le costume du félin, Adrien Agreste, est endeuillé par la récente disparition de sa mère. Il s’agit donc de leur alter ego, une personnalité opposée à leur humeur et dont le masque est trop fin pour que ne fasse pas le pont avec leur vie d’adolescent respectif.
Destruction d’une création
La Ville Lumière, cité romantique par excellence, difficile de croire en ces aspects avec des développements de personnages rushés, si bien que les transitions sont brutales, que les traumatismes sont apaisés d’une scène à l’autre et que les chansons aspirent tout le lyrisme des comédies musicales des films d’animation de la maison Mickey. Les voix ne sont plus les mêmes au chant et il n’y a aucun intérêt à rejouer un refrain aussi niais toutes les dix minutes. Pas non plus de fulgurance de mise en scène pour s’autoriser un peu d’air dans des séquences très statiques, avec des travellings timides, quand on n’assiste pas simplement à un champ-contrechamp. Viser un modèle hollywoodien enlève tout ce qu’il y a de frenchy dans ce monde qui n’a plus d’ambiguïtés pour le spectateur, à qui on sert un jambon-beurre en espérant le faire frémir. Seulement, nous connaissons déjà toutes ses subtilités et sa formule, bien qu’elle soit efficace, elle manque de nous faire découvrir une nouvelle saveur.
Dans la poignée de scènes marquantes, il n’y a que la catastrophe des Tuileries qui sort du lot. Mais une fois encore, plusieurs envolées épiques sont gâchées par une chanson agaçante ou par une résolution trop brusque. La mission de purification des âmes, le nœud romantique corsé et le rapport à la paternité, tout cela passe à la trappe dans cette aventure inoffensive. Ce programme aurait sans doute trouvé une meilleure place comme l’épisode spécial Miraculous World : Shanghai, la légende de Ladydragon, un genre de téléfilm qui ne trahit pas l’ADN d’une œuvre qui n’avait pas besoin que l’on vienne salir son image avec cet hommage honteux à 80 millions d’euros. Miraculous – le film est donc loin de satisfaire les attentes d’un public qui attendait un minimum de subtilités ou de renouer avec leurs héros favoris. Loupé, car Adrien a perdu ses neuf vies et son charisme, tandis que Marinette passe à côté de ses enjeux dramatiques. Rappelons que ces deux personnages s’aiment secrètement suivant le costume qu’ils portent. Hélas, il faut se résigner à rattraper le miracle qui s’est envolé.
Bande-annonce : Miraculous – Le film
Fiche technique : Miraculous – Le film
Réalisation : Jeremy Zag
Scénario : Jeremy Zag, Bettina López Mendoza, Thomas Astruc
Direction artistique : Jerôme Cointre
Musique : Jeremy Zag
Montage : Yvann Thibaudeau
Production : Lionsgate, Mediawan, ZAG Studios, The Awakening Production
Pays de production : France
Distribution France : SND
Durée : 1h39
Genre : Animation, Comédie, Action, Aventure
Date de sortie : 5 juillet 2023