Dans ce troisième tome (sur quatre), Olive doit se faire violence : l’adolescente autiste part en Sibérie à la recherche de Lenny, l’astronaute avec lequel elle a partie liée, puisque tous deux sont les rescapés d’un même crash d’avion.
La formule est désormais consacrée : dans Olive, on évoque l’autisme et ses replis intérieurs avec une poésie dont seules Vero Cazot et Lucy Mazel ont le secret. Dans « Sur les traces du Nerpa », on va même le mettre à l’épreuve, puisque la jeune héroïne qui en est affectée se détache de ses habitudes rassurantes pour voyager seule jusqu’en Sibérie, à la recherche de l’astronaute Lenny, échoué quelque part près du lac Baïkal. Les conditions climatiques sont extrêmes, la batterie du téléphone presque à plat, les loups dans les parages, mais Olive se montre obstinée : elle doit sauver coûte que coûte celui qui était dans le même avion qu’elle il y a des années.
Si le dépassement de soi figure parmi les thèmes principaux de l’album, le voyage en Sibérie est aussi un prétexte aux décors naturels enneigés, représentés de manière aussi soignée que le monde intérieur d’Olive. L’humour perle aussi par moments, notamment en considérant les attentes de l’adolescente et le programme établi par son guide. Manifestement, les deux n’aspirent pas aux mêmes choses, mais Olive proteste comme si elle pouvait y changer quoi que ce soit. Enfin, l’amitié entre elle et Charlie, qui irrigue la série depuis le premier tome, atteint ici une forme d’apogée, sur laquelle on ne peut s’épancher sous peine de gâcher le plaisir des lecteurs. La relation entre les deux colocataires est méticuleusement tissée et l’intimité désormais partagée est d’une justesse remarquable.
Le charme de cette série tient aussi aux excentricités d’Olive. Cette fois, on la verra notamment concevoir un phoque avec du pain afin de le présenter à un professeur naturaliste capable d’en identifier l’espèce exacte. Dans son rythme et la construction de son récit, « Sur les traces du Nerpa » est peut-être l’album le plus abouti de la série. Il offre par ailleurs à Olive une nouvelle étoffe, qui enrichit le personnage et reconditionne sa relation aux autres (le mensonge à sa mère, par exemple). Sur le plan visuel, cela demeure un plaisir de parcourir les planches de Lucy Mazel. Appâté par la forme, le lecteur le sera aussi par le fond, puisque non seulement la narration du voyage est haletante, mais en sus le récit fait un bond non négligeable. On a hâte d’en découvrir la conclusion.
Olive – T.03 : Sur les traces du Nerpa, Vero Cazot et Lucy Mazel
Dupuis, septembre 2021, 56 pages