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Jim Thorpe mis à l’honneur dans la collection « Coup de tête »

Jonathan Fanara Responsable des pages Littérature, Essais & Bandes dessinées et des actualités DVD/bluray

Les éditions Delcourt publient Jim Thorpe : La Légende amérindienne du football américain dans leur prolifique collection « Coup de tête ». L’athlète médaillé d’or aux Jeux olympiques de 1912 prend ainsi place aux côtés de Michel Platini, George Best ou Tony Estanguet.

Quand il quitte sa nation Sauk et Fox pour rejoindre le collège de Carlisle, Jim Thorpe est déjà en cours de redéfinition. Là-bas, en effet, on rééduque les Amérindiens pour les fondre dans une Amérique WASP au sein de laquelle aucune tête ne doit dépasser. Celle de Jim est pourtant en passe de devenir l’une des plus célèbres de son temps. Car l’enfant chasseur et facétieux aperçu dans les premières pages de Jim Thorpe : La Légende amérindienne du football américain se distingue rapidement en tant que sportif tout-terrain : rapide, agile, puissant, il fait des ravages sur les terrains de football mais aussi lors d’épreuves sportives plus diversifiées telles que le décathlon ou le pentathlon.

Kevin Lecathelinais, Emmanuel Michalak et Georges Chapelle racontent l’avènement d’un compétiteur de haut niveau, la place qu’il investit dans une Amérique encore ségrégationnée et les motivations profondes qui l’animent. Parmi ces dernières, on retrouve le deuil inconsolable de son frère jumeau, mort d’une pneumonie à l’âge de neuf ans, à qui il dédie secrètement chacune de ses victoires. Les auteurs mettent très bien en lumière les qualités athlétiques exceptionnelles du jeune Thorpe : il bat le record de saut en hauteur de son école un peu par hasard et sans l’équipement d’usage, il collectionne les médailles lors d’une journée sportive où il enchaîne les compétitions, il s’impose comme le leader naturel et technique d’une équipe de football américain sur laquelle, quelques mois plus tôt, personne n’aurait parié…

Tout n’est pourtant pas rose dans la vie de Jim Thorpe. Il se désintéresse tôt de l’école, vit mal les promesses non honorées de ses entraîneurs et se retranche même dans une ferme alors que ses performances sportives le prédestinent pourtant au terrain… Entier, plein d’abnégation, représentant de fait d’une communauté souvent malmenée, Thorpe donne cependant toujours le meilleur de lui-même et finira, comme le narrent brillamment Kevin Lecathelinais, Emmanuel Michalak et Georges Chapelle, par vaincre, lors d’un match retentissant, les cadets de West Point alors dirigés par Ike Eisenhower. Une victoire qui sonne comme une revanche. Une manière de déjouer le sort alors même que l’athlète était personnellement visé, par ses adversaires du jour, par des attaques sournoises et malveillantes.

Passionnant, l’album se clôture par un dossier didactique éclairant plus avant la vie, la psychologie et la carrière (contrariée) de Jim Thorpe. Ce dernier fera notamment les frais de l’hypocrisie de l’école industrielle de Carlisle, qui l’abandonnera lors de sa disgrâce et destitution, quand ses médailles olympiques lui seront retirées sous prétexte qu’il aurait concouru sans être véritablement amateur. Mais entre les lignes, par-delà sa relation avec le coach Pop Warner ou ses mérites sportifs, on comprend surtout à quel point Jim Thorpe était lié à son frère disparu et mû par cette promesse de faire son trou sur le terrain…

Jim Thorpe : La Légende amérindienne du football américain, Kevin Lecathelinais, Emmanuel Michalak et Georges Chapelle
Delcourt, octobre 2022, 104 pages

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