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Les meilleures lectures de 2020

Flora Sarrey Redactrice LeMagduCiné

Pour garder un bon souvenir de l’année écoulée, voici une modeste liste de romans découverts en 2020 que nous avons particulièrement appréciés.

L’année fut entamée en grande pompe avec un écrivain classique au style moderne : Octave Mirbeau avec Dans le ciel. Un roman fascinant où l’absence de fin, ou plutôt cette chute brutale et incisive du récit se conjugue au désespoir d’un homme. L’écouter en livre audio permet de décupler les émotions ressenties pendant la lecture. Entendre une voix réciter les dialogues, les pensées de ce personnage fort intrigué par le comportement étrange de son ami permet d’encore mieux se rendre compte de la virtuosité dont a fait preuve l’auteur. Difficile d’en faire le résumé tant sa narration est compliquée : une mise en abyme où on retrouve trois narrateurs différents. Il s’agissait surtout pour Mirbeau d’un travail alimentaire, d’un livre qu’il semble avoir renié, mais qui fait écho à sa situation de l’époque.

Le mois de janvier fut un mois chargé en belles découvertes puisque directement après le livre cité précédemment, nous fermions la dernière page du très bel ouvrage de Lionel Shriver : Big Brother. Loin d’être une parabole de 1984, l’autrice se concentre sur l’épidémie d’obésité qui gangrène les États-Unis en en faisant le cœur de son récit : celui d’une sœur qui, inquiète pour la santé de son frère, décide de lui faire suivre un régime drastique afin qu’il retrouve son poids de forme. À moins que… ?
Sans en dire trop, disons simplement que Lionel Shriver nous mène à la baguette pendant une grande partie du livre, pour mieux nous laisser cois à la fin. Une grande réussite.

Autre grand livre lu durant cette période : le très beau Virgin Suicides de Jeffrey Eugenides. Rendu célèbre par son adaptation cinématographique, il n’en reste pas moins un tour de force lyrique et mélancolique, dont le sujet grave n’est pourtant pas traité avec lourdeur. Le suicide des sœurs Lisbon n’est jamais expliqué, renforçant le triste constat de ne pas toujours pouvoir trouver des explications à tout, surtout à des actes aussi dramatiques.

L’année 2020 était plutôt bien partie, semblait-il, jusqu’à l’annonce du confinement général en France pendant le mois de mars. La crise sanitaire était devenue incontrôlable, il fallait donc essayer de l’endiguer au mieux. Coincés chez nous, ou en télétravail pour la plupart des Français, ce fut donc l’occasion de se replonger dans des loisirs qui ne demandent pas de sortir. L’occasion donc de lire, un peu, beaucoup, passionnément !
C’est pendant cette boulimie de lecture qu’eut lieu la découverte d’un auteur incroyable : Irvine Welsh, un Écossais sans concessions. Commencé avec son roman Glu, nous n’avons pas pu nous arrêter d’enchaîner ses livres, jusqu’à lire toute la saga Trainspotting, très connue grâce à son adaptation cinématographique. Welsh a un don pour faire aimer des personnages marginaux, détestables de prime abord mais dont les aventures rocambolesques arrivent à passionner. Ces personnages, originaires de la Leith Walk à Edimbourg, sont tous à la recherche du meilleur moyen de survivre, en se faisant des thunes ; de vivre également, en brûlant la chandelle par les deux bouts. On s’y attache car ce sont des feux d’artifices qui explosent mais ne s’éteignent jamais ; des gens à la rage de vivre qui leur permettent de dépasser tous les obstacles, sans remords ni morale. L’auteur dépeint aussi la société écossaise, ses quartiers malfamés, ses bars et les pauvres gens qu’on y croise avec la même rage que ses personnages. C’est cette façon d’écrire, crue, qui fait qu’on adore ou que l’on déteste son œuvre. En tout cas, elle ne laisse personne indifférent.

Un autre auteur nous a particulièrement ébloui cette année : le célèbre colombien Gabriel Garcia Marquez, avec L’amour aux temps du choléra. La plume est encore une fois particulière, intense tant elle fourmille d’idées et joue avec le format même du roman en explorant différentes temporalités tout en restant cohérente. L’histoire a certes un peu vieilli dans ses idées (un adulte qui devient obsédé par une jeune fille mineure, ça n’est franchement pas romantique mais plutôt inquiétant), mais l’impact émotionnel est toujours présent. Rien que pour la virtuosité de l’écriture, le livre vaut largement sa réputation.

Vers la fin de l’année, après avoir passé plusieurs mois à lire tout Trainspotting, nous avons fait la découverte d’un autre roman incroyable d’un auteur que nous ne connaissions pas : Le Tunnel, d’Ernesto Sabato. On pourrait le qualifier de chronique sur la jalousie amoureuse, obsessionnelle et violente d’un homme, un artiste, qui veut posséder une femme. Dans le contexte actuel, où l’on parle beaucoup de la place de la femme dans la société, et des violences qu’elle subit, ce livre est à relire pour comprendre comment, au nom d’une supposée passion, un homme peut arriver à tuer une femme. Ce n’est pas de l’amour, en vérité, mais de la possession. Vouloir que l’autre nous appartienne, ne soit que le reflet de ce que l’on voudrait qu’elle soit. Mais ce roman n’est pas juste cela, c’est aussi une réflexion sur le travail artistique et ses critiques.

Ce fut donc une année riche en rencontres littéraires, en réflexions intéressantes, et même si nous n’avons pas pu citer tous les romans que nous avons aimés en 2020, nous attendons avec impatience le nouveau livre qui va chambouler l’année à venir. Que cette année soit meilleure que la précédente !