Rédigé par Jean Serroy et dirigé par Anne Serroy, Les 1000 films culte de l’histoire du cinéma invite à un tour d’horizon d’un art, le septième, de masse et d’essai.
Professeur d’université émérite et critique de cinéma, Jean Serroy se livre dans Les 1000 films culte de l’histoire du cinéma à un exercice forcément subjectif et délicat : arrêter une sélection, partielle et personnelle, adoptant un point de vue français et contemporain, de films candidats à la postérité, de la naissance du septième art à la fin du XIXe siècle jusqu’à nos jours, de La Sortie de l’usine Lumière à Lyon, qui induit déjà une exploitation commerciale du cinéma, à Parasite, récente Palme d’or à Cannes et ambassadeur d’un cinéma sud-coréen singulièrement fécond.
L’ouvrage se compose de brèves notices sur les métrages choisis, de dizaines d’interviews (Woody Allen, Ridley Scott, Sylvester Stallone, Xavier Dolan, Sean Penn…), de courts textes introductifs décennaux et de « zooms » plus substantiels (sur Brigitte Bardot, Jean Gabin, D.W. Griffith ou encore Quentin Tarantino et les frères Coen). L’ouvrage n’est pas spécifiquement dédié aux cinéphiles : par leur format, ses évocations demeurent sommaires et peuvent avant tout s’apparenter à une mise en appétit. Thierry Frémaux en souligne une autre caractéristique dans sa préface : « Chacun à ses films culte, impossible de voler ceux des autres. » Il serait dès lors vain d’en déplorer l’une ou l’autre omission.
Jean Serroy souligne la paternité de D.W. Griffith dans la modernité du langage cinématographique. Il recueille les propos de Ridley Scott sur la mise en scène des aliens et un effroi indexé à l’économie de leurs apparitions. Il interroge Woody Allen sur le caractère tragicomique de son cinéma, George A. Romero sur l’illusion et la liberté induites par le genre horrifique et fantastique, Penelope Cruz sur sa relation avec Pedro Almodovar, « d’une grande intensité », où chaque tournage est une « aventure spéciale » et un « enrichissement ». De petits encadrés thématiques abordent des sujets aussi variés que les caméos d’Alfred Hitchcock, les chapitres de la mythologie Star Wars, les films tournés en un plan-séquence unique ou encore les destins croisés des deux John, Wayne et Ford.
Ces mises en perspective s’avèrent d’autant plus précieuses que les notices filmiques se résument souvent à l’essentiel et manquent parfois cruellement d’éléments contextuels. Ainsi, des films tels que Le Lauréat, M le Maudit, Dracula, Jurassic Park, Toy Story ou encore Citizen Kane auraient certainement mérité de voir leurs spécificités avant-gardistes, politiques ou séminales mises en exergue. Cette dimension historico-analytique lacunaire renvoie ce beau-livre à l’état de catalogue, sans que cela soit compris dans un sens péjoratif.
Ainsi, le lecteur pourra s’y promener à sa guise, lire l’une ou l’autre notice de manière sporadique, y puiser des idées de découvertes, y vérifier (ou pas) dans une interview ce qu’il a pu pressentir au sujet d’un film. Jean Serroy mêle le blockbuster d’action au drame intimiste indépendant, l’épouvante à la science fiction, la France à l’étranger. Il offre un panorama transversal du cinéma mais sans y adosser une lecture critique ou exhaustive. À certains égards, mais avec des textes moins étayés, Les 1000 films culte de l’histoire du cinéma pourrait se ranger entre 1001 films à voir avant de mourir (éditions Omnibus) et le Petit Larousse des films. Insuffisant pour le cinéphile désireux de creuser plus avant le septième art, mais idéal pour quiconque aspire à s’initier aux œuvres que l’Histoire a marquées d’une pierre blanche.
Les 1000 films culte de l’histoire du cinéma, Jean Serroy
Glénat, novembre 2021, 336 pages