The Get Down Saison 1 Partie 2 : Critique Série

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8 mois ! Il nous aura fallu attendre 8 mois pour enfin découvrir la suite des aventures des héros de The Get Down. Soit une éternité vu la bombe lancée par Netflix l’été dernier. Et soyez heureux d’apprendre que le BPM, déjà bien haut, passe à la vitesse supérieure pour la partie 2.

Bien entendu, l’avertissement est d’usage : Si vous n’avez pas vu la partie 1 de The Get Down, autant stopper votre chemin ici. Allez zou !

Pour les autres, on reprend le métro direction le Bronx prendre des nouvelles de Zeke, Mylene, Boo-Boo, Ra, Shaolin Fantastic, Dizee ou encore Papa Fuerte. Moins seconde partie (comme marketée) que vraie deuxième saison, cette nouvelle fournée d’épisodes opère une petite ellipse d’un an, marquant temporellement une scission réelle pour mieux retrouver toute la clique à des tournants décisifs.

Zeke poursuit son stage à Manhattan dans l’intention d’aller à Yale, Mylene gère sa carrière dans le disgospel et les Get Down Brothers rameutent les foules dans des clubs à la mode. Tout irait d’ailleurs bien dans le meilleur des mondes sans la pression des adultes, de la société, de la religion et la criminalité environnante de leur quartier.

Encore plus axée sur la prise en main de leur destin par ses protagonistes, la série bien que nantie d’événements sombres positive énormément sur la question du passage à l’âge adulte. Le hip-hop étant vu comme une saine mais difficile porte de sortie. L’histoire offerte de sa naissance dans les quartiers du Bronx remet ainsi en contexte universel une musique qui est d’abord venue des tripes de la rue avant de se vendre par palettes.

Un genre né des frustrations de ses instigateurs, des murs dressés face à eux et du rêve à saisir. Ce de façon salutaire quand on voit le genre dominant qu’est devenu le hip-hop et sa culture aujourd’hui, majoritairement vidée de sa substance pour répondre à une fonction publicitaire. Probablement ironique aussi quand on sait que la série n’aurait pas vu le jour sans cet essor phénoménal.

Bien sûr, le hip-hop n’est pas le seul sujet que la série traite puisque The Get Down tire sur plusieurs fils de son contexte historique. Le glissement de l’art vers sa marchandisation, la discrimination positive, l’identité afro-américaine, la drogue, l’idéologie de la street culture sont autant de clés de lecture d’une série chorale qui passe avec fluidité d’un sujet à l’autre. Nourrissant ainsi la richesse et la densité des personnages et des thèmes abordés depuis l’épisode pilote.

Les réelles imprécisions historiques et les anachronismes ne pèsent donc pas bien lourd dans une série qui n’a jamais (malgré son utilisation d’archives) la prétention de documenter l’époque avec exactitude mais bien d’en offrir un instantané subjectif et luxueux.

Cette deuxième partie opère d’ailleurs, pour son propre bien, quelques ajustements d’intrigue, délaissant notamment l’aspect politique pour se concentrer sur les storylines de chacun. On pourrait s’en émouvoir mais la densité de la narration est toujours au rendez-vous. The Get Down embrasse totalement son lyrisme, son romantisme et sa vision fantasmée de cette ère musicale pour construire un vrai crescendo émotionnel et narratif. Ce avec des enjeux solides et un nombre hallucinant de scènes qui restent en tête (mettant souvent en scène Mylene). Vous ne verrez pas passer ces cinq nouveaux épisodes à la force de divertissement brut.

Conçue en précipité pop des années 1970, The Get Down continue d’agencer ses références, piochant quantité d’idées dans la comédie musicale (ce qu’est fondamentalement le show), les comics, le cartoon, les films de kung-fu,…. En cela, elle recréé un espace de jeu en adéquation avec le travail cinématographique de Baz Luhrmann. Une rêverie sous multiples influences que la riche et colorée direction artistique soutient. Rappelons d’ailleurs que The Get Down est la série la plus chère de Netflix avec 120 millions de dollars au compteur. On ne peut que prier d’autres shows de faire la même chose tant le résultat est payant, palpable et passionnant pour qui sonde la pop-culture.

Nombre de spectateurs avaient pu être désarçonnés par la réalisation du pilote de la série, qui portait complètement la marque de son auteur. Un style volontairement excessif qui mêlait dans un montage rapide et très chargé images d’archives (vraies ou fausses) et fiction s’entrechoquant et se complétant. Fidèle à cette charte, la série continuait sur cette lancée tout en calmant un peu le jeu pour atteindre un vrai rythme de croisière. Rien à dire sur cette partie 2 qui bénéficie d’une réalisation parfaite, mêlant et alternant avec maestria les intrigues dans un éclectique défilé de tons, de styles et de rythmes.

Une idée cependant pourra diviser, non pas sur son concept qui est génial mais sur sa réalisation…

Absent de la première saison, cet ajout consiste en l’insertion de multiples passages animés, diégétiquement créés par Dizee. Ces inserts complétant ou surlignant l’histoire, la ré-haussant notamment d’un délire super-héroïque. Ne nous le cachons pas, ils aident aussi à raconter certains événements plus remuants et, probablement, non filmés par manque de temps, de moyens ou de budget. Or, s’il trace un parallèle amusant avec les cartoons The Jackson Five et The Harlem Globe Trotters, l’animation en mode webflash peine à convaincre. Sous-animé, trop lisse, trop propre, sans aspérités, la concrétisation de l’idée n’est pas à la hauteur.

Comment ne pas finir de parler de The Get Down sans parler de sa musique phénoménale et omniprésente qui compile standards de l’époque et créations inédites. Si les reprises sont toujours à propos et offrent de grands moments, c’est bien évidemment le neuf qui emporte ici le morceau. Fidèle à son credo dans le domaine, Baz Luhrmann applique la même démarche qu’à Gatsby Le Magnifique et Moulin Rouge ! : faire résonner le passé en écho par l’utilisation de la musique contemporaine.

Anachronique certes (qui s’en fout ?) mais brillant également dans son interpénétration des époques notamment le Rihannesque Toy Box. Car au-delà des moments jouissifs offerts, cette démarche est toujours vectrice d’un sens nouveau et d’un propos évident. Quand elle n’impose tout simplement pas un nouveau rythme passionnant au montage et à l’alternance des intrigues.

Pas d’infos réelles pour une éventuelle saison 2 (saison 3, bref vous saisissez…) si ce n’est que Luhrmann, éreinté par dix ans de travail dessus, tente de passer la main. Si on se réjouirait de voir une suite à la série la plus feel good des dernières années, la fin de cette seconde partie marque déjà un terme en soit. Bouleversante, ample, porteuse d’espoir comme de doutes, l’ultime scène du dernier épisode finit de nous arracher des larmes au son du magnifique The Other Side. C’est suffisamment rare pour être noté.

Bref, The Get Down est bien un chef d’oeuvre et on vous invite chaudement à céder aux sirènes du Bronx.

The Get Down, Saison 1, Partie 2 : Fiche Technique

Création : Baz Luhrmann, Stephen Adly Guirgis
Scénario : Seth Zvi Rosenfeld, Sam Bromell, Stephen Adly Guirguis, Nelson George, Aaron Rahsaan Thomas, Jacqui Rivera.
Réalisation : Ed Bianchi (8-10-11), Lawrence Trilling (7), Clark Johnson (9)
Interprétation : Justice Smith, Shameik Moore, Herizen F. Guardiola, Skylan Brooks, Tremaine Brown Jr., Yahya Abdul-Mateen II,Jimmy Smits…
Genre : Dramatique, Musical
Société de production : Bazmark Films
Format : 5 épisodes de 50 minutes (80 minutes dans le cas unique de l’épisode final)
Chaîne d’origine : Netflix
Diffusion à partir du : 7 avril 2017

États-Unis – 2017

Auteur : Adrien Beltoise