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Festival de Gérardmer 2021 : Sleep, Les Animaux Anonymes et Mosquito State

Pour cette nouvelle journée du Festival de Gérardmer 2021, petit tour d’horizon avec trois films plus ou moins inégaux : Sleep de Michael Venus, Les Animaux Anonymes de Baptiste Rouveure et Mosquito State de Filip Jan Rymsza.

Sleep de Michael Venus (Compétition) : 

Amenant le spectateur dans les travers du traumatisme et du refoulement de soi, Sleep de Michael Venus voit une fille voulant découvrir ce qui se trame derrière les cauchemars de sa mère, sans doute hantée par les démons de son passé, le tout se déroulant dans une forêt et un hôtel rappelant l’univers horrifique de Shining. Sauf que dès les cinq premières minutes, on comprend vite la volonté initiale du récit et malheureusement, c’est bien l’un des gros problèmes du film qui n’arrive jamais à s’enlever cette épine du pied et à faire respirer ses velléités fantastiques. Malgré un casting habité, un environnement naturaliste et une tension continue, Michael Venus s’avère bien trop démonstratif. Trop lisible dans ses intentions, trop maniéré dans l’imbrication de ses scènes oniriques cauchemardesques avec celles qu’on pense être réelles, balbutiant dans son écriture et son interprétation, Sleep ne trouve pas forcément le ton juste pour aborder son discours sur les violences faites au femmes et le visage nauséeux de l’extrême-droite qui parcourt ce village reculé. Tentant maladroitement de nous plonger dans des contrées proches d’un Twin Peaks, Sleep s’avère être généreux, louable mais très vite oubliable. 

Les Animaux anonymes de Baptiste Rouveure (Hors Compétition) :

Il est difficile de défendre complètement le film. Les idées sont là, l’envie aussi, mais le résultat s’avère vite bancal. De nombreux plans iconiques et malaisants viennent faire vivre une ambiance haletante, un soin particulier est donné au mixage sonore, les situations ajoutent de l’eau au moulin d’un propos maladroitement placardé sur chaque scène, et le film arrive tout de même à jouer visuellement avec les codes du survival. Malencontreusement, cette inversion entre le prédateur (les animaux) et les proies (les humains) qui se présente à nous, n’enclenche jamais la deuxième. Le processus n’en reste qu’au stade des idées, où le long métrage (1h) aurait du n’être qu’un simple court métrage, tant le récit ne semble pas avancer d’un iota, ni dans son discours ou sa narration. On mettra en cause notamment un montage et un cadrage parfois illisibles, des transitions répétitives qui coupent toute immersion au récit, et surtout un penchant pour faire durer les scènes avec une caméra mouvante, sans y apporter un contour sensoriel ni organique. Une proposition originale, sincère, qui demanderait sans doute plus de moyens pour dévoiler ses qualités notables. 

Mosquito State de Filip Jan Rymsza (Compétition) : 

Avec La Nuée, Teddy et ce Mosquito State, le Festival de Gérardmer 2021 met le paquet sur l’humain qui transite vers le bestiaire animalier et son visage à l’état de nature. Sous fond d’effondrement financier, d’algorithmes incontrôlables, de hiérarchisation sociale et verticale, de l’avidité de l’être humain, de son attirance pour la déchéance et le désordre, Mosquito State dresse un portrait acerbe et iconique d’un milieu financier qui ne se rend pas compte de ses actes et qui voit la société courir à sa perte. On pense beaucoup à Cosmopolis pour ce portrait du milieu bancaire, à La Mouche et à Bug pour cette maturation de la chair et de la pensée paranoïaque dans l’univers du huis clos et de l’amour contrarié. Même si le film ne parvient jamais à la hauteur de ses influences, Mosquito State se démarque par sa démarche jusqu’au-boutiste avec son ambiance nébuleuse, son ton cynique et son cadre chromatique qui marquent les esprits.