Premier long-métrage très remarqué de Shane Atkinson, LaRoy part grand favori dans la compétition du Festival de Deauville 2023. Thriller sombre à l’humour noir, porté par des personnages savoureux, une intrigue à rebondissements et une réalisation maîtrisée, LaRoy s’inscrit dans l’héritage des frères Coen et de Quentin Tarantino.
Une route désertique, un bar isolé, une musique country secondée par quelques notes de western dans le style d’Ennio Morricone, LaRoy plante très vite son décor authentique. Dès sa première scène magistrale, prenant une tournure inattendue, Shane Atkinson nous promet une histoire riche pleine d’imprévus. Ray, qui vient de découvrir l’infidélité de sa femme, s’apprête à se suicider lorsqu’un inconnu surgit dans sa voiture, le prenant par erreur pour un tueur à gages. Séduit par l’opportunité de prouver qu’il est un dur à cuire, Ray accepte la mission. Ce choix étonnant le plonge progressivement dans une suite d’évènements incontrôlables.
No country for loosers
Dans son quotidien, Ray passe couramment pour un faible et un idiot. Petit vendeur dans un magasin qu’il gère en famille, il ne parvient pas à imposer son autorité. Naif, il laisse également son frère l’arnaquer et sa femme le tromper. Ainsi, lorsqu’il rencontre de façon inopinée un homme qui l’accuse d’être un lâche, Ray décide de risquer le tout pour le tout : accepter un contrat de meurtre pour voir ce dont il est capable et obtenir l’argent nécessaire pour reconquérir sa femme Stacy. Quoi de mieux en effet, pour raviver la flamme, qu’une bonne poignée de dollars ? Surtout quand celle-ci permettrait de réaliser le rêve de sa femme ?
Dans un bar perdu, Ray rencontre Skip, un détective privé amateur, aux accents comiques d’un Better call Saul, risée de tous les policiers en uniforme. Tout comme Ray, Skip est en quête de respect et de reconnaissance. L’association des deux protagonistes forme un duo particulièrement déjanté et permet à ces deux loosers moqués de prendre enfin leur revanche tant espérée sur le monde.
Cette relation d’amitié et de fraternité rappelle des duos mémorables de l’oeuvre de Quentin Tarantino, notamment Jules Winnfield/Vincent Vega dans Pulp Fiction et Django/le docteur Schultz dans Django Unchained. Animés par des intérêts communs mais de caractères différents, Ray et Skip se partagent les rôles et prennent chacun confiance en eux. Contre toute attente, ces ratés deviennent donc ensemble une équipe gagnante, affrontant sans peur des malfrats et des tueurs, tout en résolvant un puzzle complexe dont les pièces s’assemblent progressivement. Ray et Skip vivent alors une véritable épopée digne d’un mythe de western.
Il était une fois au Nouveau-Mexique…
Une mallette de billets, un tueur implacable, un duo de choc et des malfrats, les ingrédients semblent communs à biens des westerns et thrillers. Pourtant, la recette de LaRoy est diaboliquement prenante et efficace. Evidemment, le scénario, également écrit par Shane Atkinson, y contribue très largement. Dialogues travaillés, souvent désopilants, intrigue à ressorts, retournements de situations s’unissent pour construire une histoire aussi solide que jouissive.
Thriller décalé à l’humour noir, LaRoy n’hésite pas à flirter avec les références du western, tant dans son traitement, ses plans et ses notes de musique appuyées. C’est au coeur du Nouveau-Mexique, Etat montagneux et désertique, que le réalisateur a trouvé le cadre de son récit palpitant brillamment mis en scène.
Devant une réalisation aussi fluide et mature, on peine presque à croire que LaRoy demeure un premier film tant la prouesse technique impressionne. Certes, Shane Atkinson a déjà filmé plusieurs courts-métrages mais chacun sait que l’exercice reste bien différent. La photographie, la bande-originale exceptionnelle et les décors convainquent tout autant. Après Quentin Tarantino et les frères Coen, le genre du thriller sombre, comique et décalé a-t-il enfin trouvé son digne successeur ?
LaRoy : fiche technique
Réalisation : Shane Atkinson
Scénario : Shane Atkinson
Interprétation : John Magaro (Ray), Steve Zahn (Skip), Dylan Baker, Jared Harris …
Photographie : Mingjue Hu
Musique : Rim Laurens, Delphine Malaussena, Clément Peiffer
Producteurs : Sébastien Aubert, Jeremie Guiraud, John Magaro, Caddy Vanasirikul
Sociétés de production : Adastra Films, The Exchange
Durée : 1h52
Genre : thriller, comédie, drame
Date de sortie : prochainement