Les blockbusters coréens défient leur concurrent Hollywoodien avec une facilité déconcertante depuis quelques années. Project Silence en fait partie, en assimilant tout le bon jus d’une série B et toute l’âme d’une œuvre destinée au grand public.
Synopsis : Le brouillard cause un gigantesque accident sur un pont. Alors que celui-ci menace de s’effondrer, des bêtes inconnues se retrouvent libérées au milieu des survivants.
Les séances de minuit ont toujours eu une place importante dans le cadre du festival de Cannes. Il s’agit du sas de décompression par excellence pour les festivaliers qui ne parviennent pas à tromper leur sommeil. Et en échange, cette séance promet le divertissement vénéneux que l’on espère. Que l’on rie, que l’on pleure ou que l’on encaisse des décharges d’adrénaline, on a envie d’y être plus que tout.
Kim Tae Gon capitalise sur ses éléments de tension dans un film catastrophe, en prenant d’assaut un pont, où plusieurs destins se croisent. Le charme de cette fiction ultra nerveuse tient dans son approche des personnages, tellement différents les uns des autres que la collision semble inévitable. Toute cette problématique constitue le point de départ. Les habitants d’une nation sont divisés par leur égocentrisme, que l’on effleure dans une exposition qui ne traine absolument pas en longueur. Et ce n’est qu’après un malheureux carambolage que leur union aura un sens.
Lâcher les chiens
Impossible d’arrêter la mèche; elle entraîne une série d’incidents qui vont convoquer les codes du genre, notamment autour d’un portrait de famille, que ce soit en entre un père (Sun-kyun Lee, qui nous a réveillé plus tôt dans la journée avec Sleep, à la Semaine de la Critique) et sa fille (Kim Su-an), entre deux sœurs, un couple âgé ou un dépanneur (Ji-hoon Ju) avec tout ce qui lui tombe dessus. Leur survie devient leur priorité. Et la galerie s’enrichit alors avec l’irruption de l’armée, d’un scientifique un peu trouillard et des cobayes qui n’auront plus rien à voir avec les meilleurs amis de l’homme.
Les chiens ne sont plus les mignons animaux domestiques, mais bien des machines de guerre d’un état militaire et où il semble vain de lutter contre une telle menace. Le projet secret de cette unité canine et féroce va croiser la route des automobilistes qui n’auront le temps de décoller ni de débarquer. La liaison avec l’aéroport est rompue, de même que les communications avec les proches. Le récit nous invite ainsi à savourer chaque moment de bravoure, où le nationalisme triomphe toujours. Nous savons d’avance dans quelle direction nous allons, mais dans le fond, ce n’est pas le point de chute qui compte, mais bien l’atterrissage.
Secondé par Kim Yong-hwa (saga Along With the Gods et à la barre du très attendu The Moon) et du précieux Joo-Suk Park (Dernier Train pour Busan) à l’écriture, Kim Tae Gon n’hésite pas à sacrifier frontalement ses figures du troisième âge, comme pour nous rappeler que le gouvernement a bien du souci à se faire avec cette tranche démographique, de plus en plus vieillissante et, a fortiori, coûteuse. Il est également enclin à laisser sa jeunesse s’épanouir au-delà de ses frontières, ce qui justifie parfaitement le mépris pour les artistes ou les loyaux fonctionnaires. Tout le monde en prend pour son grade, mais c’est à la force du collectif et de quelques actes solidaires qu’on trouve une issue à ce drame national.
C’est bourré de clichés et de générosité, malgré un rythme qui préfère les à-coups à une bonne accélération en ligne droite. C’est pourquoi Project Silence est un film qui aboie plus qu’il ne mord, mais qui dépanne honnêtement en fin de soirée.
Project Silence de Tae-gon Kim est présenté en Séance de Minuit au Festival de Cannes 2023.
Titre original Talchul : Project Silence
Avec Sun-kyun Lee, Ji-hoon Ju, Hee-won Kim..
Prochainement en salle / 1h 41min / Thriller, Epouvante-horreur, Fantastique
Distributeur : KMBO
Bande-annonce : Project Silence