FEFFS 2016 : Caméléon, Kebabs et zombies tamouls

La 6ème journée du FEFFS propose à nouveau des films de tous horizons, et pour la première fois du festival un quasi sans-faute.

Il est très facile de placer cette sixième journée du FEFFS comme la meilleure du festival, grâce à sa programmation à la fois variée et réussie. On y retrouve donc Alec Guiness qui endosse 8 rôles, un justicier des fast-foods et la première incursion de Kollywood dans le film de zombies.

[Rétrospective M for Murder] Noblesse Oblige

Réalisé par Robert Hamer (UK, 1949) Date de sortie 10 février 1950

Synopsis : Un jeune aristocrate condamné à mort rédige ses mémoires. Il raconte son ascension au sein de la famille d’Ascoygne. Famille qui les avait reniés lui et sa mère après le mariage de celle-ci avec un roturier.

Si pour le moment la rétrospective M for Murder était surtout le théâtre de films oscillant entre le malsain et le psychologique, la présence de Noblesse Oblige lui offre un autre souffle. Réalisé en 1949, Noblesse Oblige fait partie de ces classiques de la comédie britannique nous gratifiant de cet humour raffiné so british. A première vue, en lisant le synopsis, on ne s’attend pas à rire, mais c’est ça qui fait toute la réussite de ce petit bijou.

L’ascension de Louis d’Ascoygne est en effet remplie de cynisme et d’humour noir. Le plan calculateur et vengeur de son personnage principal, la vénalité de son amie d’enfance, le mépris de la famille d’Ascoygne, tant d’éléments qui rendent l’humour omniprésent. Le film est remarquable aussi grâce à la performance d’ Alec Guiness campant à lui tout seul l’intégralité de la famille d’Ascoygne. Du vieux patriarche, en passant par le prêtre sénile, et même une femme, Guiness nous offre un véritable récital. Avec sa liberté de ton et son aspect grinçant, Noblesse Oblige reste l’un des emblèmes de la comédie anglaise.

[Compétition Crossovers] Creative Control

Réalisé par Benjamin Dickinson (USA,2015) Date de sortie inconnue.

Synopsis : Dans un futur très proche, David travaille dans une agence de pub pour promouvoir un nouveau produit de réalité augmentée. Le désir qu’il éprouve pour Sophie va le pousser à créer un avatar de cette dernière. Cela va engendrer une descente en enfer pour David.

Her de Spike Jonze avait déjà incorporé la technologie dans la comédie sentimentale. Avec Creative Control, Dickinson va proposer un angle plus froid et pessimiste. Mettant en avant David dont le couple avec Juliette bat de l’aile, le réalisateur va s’intéresser à cette perte de contrôle vis à vis de la technologie. En effet David éprouve une certaine attirance pour Sophie, la fiancée de son meilleur ami. Afin de combler ses désirs, il va, à l’aide de lunettes à réalité augmentée, créer un avatar de cette dernière.

A partir de ce moment, David va commencer à perdre de plus en plus le contrôle de sa vie. Au niveau professionnel ou affectif, le monde réel et le monde virtuel vont fusionner. La perte de repères va se faire de plus en plus importante, David pensant réellement vivre les moments avec l’avatar. Le parallèle avec Juliette, professeur de yoga en quête d’un bien-être intérieur, est une idée bien exploitée. Tourné en noir et blanc, le film dispose d’un esthétique très arty. Quant à la musique classique, elle convient très bien au ton du film. Creative Control est une œuvre à la thématique intéressante, et bien moins éloignée de la réalité qu’on ne le pense.

[Compétition internationale] K-Shop

Réalisé par Dan Pringle (UK, 2016) Date de sortie inconnue.

Synopsis : Salah, jeune étudiant est contraint de reprendre en main le fast-food de son père après que celui-ci se soit fait assassiner par une bande de Hooligans. Peu après, Salah va partir en croisade vengeresse afin de débarrasser Londres de sa vermine et les transformer en viande à kebab.

Le postulat de base du premier film de Dan Pringle fait penser au vigilante movie. Le film est avant tout un véritable cri de rage porté à la fois par son réalisateur et son personnage principal. Le jeune Salah, dont la vie a été ruinée par des hooligans, va donc faire régner sa justice dans son quartier. Pendant près de 2h, Salah va  faire le ménage et transformer des poivrots en kebabs. Mais K-Shop est bien plus qu’un film bourrin, c’est aussi un film avec une certaine dimension sociale.

Mettant en avant des immigrés travailleurs  opposés à des britanniques racistes, le film a d’autant plus d’impact par les temps qui courent. Malheureusement, Pringle se plante un peu dans son exécution. D’une linéarité trop complaisante, K-Shop peine à complètement convaincre. Une fois que le film a trouvé son rythme de croisière, il s’y tient tout du long. Manquant de véritables surprises, le film souffre sur la longueur. Il n’en reste néanmoins un film intéressant mêlant à la fois critique sociale et hommage au vigilante movie.

[Compétition internationale] Another Evil

Réalisé par Carson Mell (USA,2016) Date de sortie inconnue.

Synopsis : Dan et Mary décident de faire appel à un exorciste afin de débarrasser leur chalet des fantômes qui l’habitent. Après un premier entretien peu concluant, Dan va entrer en contact avec un exorciste loufoque et inquiétant.

Another Evil est l’archétype du film dont on n’attendait pas grand chose mais qui se révèle être une excellente surprise. Revisitant un sous-genre  du film d’horreur, le film d’exorciste, Another Evil s’avère être une comédie complètement absurde. Ici, l’exorciste est loin d’être un vieux prêtre très sérieux, il s’agit d’un loser complètement timbré persuadé d’avoir couché avec Satan. Mark Proksch (vu dans The Office) va exploiter tout son potentiel comique. Entre rituels avant-gardistes et anecdotes salaces, Oscar l’exorciste va livrer un véritable one-man show.

Mais derrière son aspect loufoque se cache un homme en quête d’amitié. Amitié qu’il va essayer de cultiver avec Dan,  qui va alors ressentir une certaine gêne vis à vis de l’exorciste. Ce dernier va alors devenir de plus en plus dangereux. Revisitant les codes du film d’exorciste, Another Evil arrive à allier subtilement comédie et réflexion sur le malaise social. Servi par des acteurs habités par leur rôle, il ne serait pas étonnant de voir le film de Carson Mell repartir avec un prix du public.

[Midnight Movies] Miruthan

Réalisé par Shakti Sounder Rajan (Inde, 2016) Date de sortie inconnue

Synopsis : Un flic, accompagné de sa petite soeur et d’une jeune médecin dont il est secrètement amoureux, se voit obligé de faire face à une armée de zombies.

Si les derniers midnight movies n’étaient pas à la hauteur des espérances, Miruthan a très vite réconcilié les festivaliers. Venu directement de Kollywood, l’industrie du cinéma indien qui produit des films en langue tamoul, Miruthan est leur première incursion dans le film de zombies. Que ça soit avec son message de prévention contre le tabac, ou encore son aspect sitcom, Miruthan ne perdra pas de temps pour obtenir l’adhésion des spectateurs. Véritable mélange de genres, le film  va flirter avec la comédie romantique à de nombreux moments avec des scènes kitschissimes.

Mais ce qui le fait vendre surtout, c’est son étiquette film de zombies. Et le film ne sera pas en reste pour faire plaisir au spectateur. Bagarres bien musclées sur de la musique ultra-rythmée, Miruthan est le midnight movie qu’on attendait tous. Qui dit cinéma indien, dit chansons, et encore une fois Miruthan n’est pas avare sur ce point, poussant à plusieurs reprises la chansonnette avec des morceaux entraînants et qui vont rester en tête. On pourrait s’amuser à chercher la critique sociale classique derrière le film, mais honnêtement Miruthan est surtout un concentré de fun à 100%.