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Borgen, une femme au pouvoir : accéder au pouvoir et y rester, à quel prix ?

Chloé Margueritte Reporter LeMagduCiné

Borgen, une femme au pouvoir est une série danoise diffusée sur Arte entre 2010 et 2013. La série se verra prolongée par une saison 4 sur Netflix en juin prochain. Borgen s’infiltre dans les coulisses de la politique pour raconter l’accession au pouvoir d’une femme, et ce qu’il faut de sacrifices pour y rester. La série raconte surtout le rapport aux mots des politiques, à la communication et liens avec la presse. Passionnant.

 » Vous ne saurez pas ce qui vous frappe avant qu’il ne soit trop tard »

Birgitte est première ministre au Danemark. Un pays qui, en réalité, n’a jamais eu de première ministre femme, une façon pour les scénaristes de mettre cette réalité en lumière.  Cela pose d’abord la question du regard sur les femmes de pouvoir, parce que tout le monde se demande toujours naïvement comment elle va faire pour ses enfants. Ensuite, la série met en perspective (surtout à la fin de la saison 1) la question du couple : comment s’effacer pour l’autre, mettre entre parenthèse sa carrière, sa vie en quelque sorte, pour être au service de son épanouissement, de son ascension au sommet de l’Etat ? Parce que la vie de Birgitte reste simple, elle et sa famille gardent leur maison (bien qu’ils aient une résidence à disposition), les enfants commencent à avoir des problème parce qu’ils voient moins leur maman, et le fait qu’elle soit une femme entre forcément en ligne de compte. Or, la série mise surtout sur l’éthique et les principes de Birgitte en temps que femme politique. Borgen s’intéresse aussi aux relations au sein de la famille où, comme en politique, Birgitte doit toujours se remettre en question, satisfaire tout le monde, tout en gardant clairement en tête son idéal.

Communiquer

Là où la série est la plus pertinente, c’est dans le développement de ses personnages et de son côté purement politique et journalistique. Borgen traite en premier lieu des rapports entre le pouvoir et la presse. Katrine Fonsmark, jeune journaliste ambitieuse et vorace, prête à tout pour la liberté de sa profession, n’hésite jamais à aller trop loin. C’est une battante et son personnage évolue et gagne en profondeur tout au long des trois saisons. Elle met en lumière chaque contradiction de la politique, sans chercher à défendre les erreurs. Il y a aussi Kasper Juul, qui est certainement un des personnages les plus intéressants de cette série. Il est le lien entre la presse et le pouvoir. Cet homme de l’ombre met tout en œuvre pour que la politique du première ministre soit présentée au mieux. C’est celui qui règle les affaires les plus difficiles : la corruption, les menaces, les problèmes d’intégrité au sein du gouvernement. Il rédige les discours, parle avec la presse. Bref, il doit épouser parfaitement la manière de penser de Birgitte. Malgré quelques petits accrochages en début de saison, les deux personnages se complètent parfaitement bien, leur duo fonctionne à merveille même dans le conflit qui les fait avancer (on voit bien quand leurs idées sont opposées).

Intègre 

La série se développe surtout autour de la question de l’intégrité, comment la conserver au pouvoir (et pour y accéder), comment garder une vie, un mari, une famille et une politique intègre quand on est première ministre et qu’il faut sans cesse jouer entre idéalisme et réalité politique ?  Comment garder sa ligne de conduite entre alliances et discours télévisés ? On voit donc Birgitte négocier, être dans la tourmente, mais on la voit rarement renoncer. Elle est ballotée, décriée, à l’image des personnages de Baron noir, l’exercice du pouvoir n’est ici qu’une longue déconvenue pour ceux qui, au prix d’un long combat, y accèdent. Les obstacles d’ordres professionnel et privé se dressent donc face à Birgitte et la démonstration est toujours faite des questions qui la traversent et de la manière dont elle résout certains dilemmes qui ont une influence sur les choix qu’elle fait pour le plus grand nombre. Cela concerne des sujets aussi vastes que le retrait des troupes d’Afrique, la prostitution, la pénalisation des mineurs…

L’ivresse du pouvoir

Le scénario recèle de petites pépites, d’intrigues, et développe des personnages tous aussi complexes que passionnants. Ne tombant jamais dans le cliché facile, la série offre un regard pertinent sur la politique, ses mécanismes et sur le rôle de la presse. Tout au long des trois saisons, on découvre que la politique, tout comme la vie et le journalisme, est un combat, celui où l’on doit toujours anticiper des coups que, pourtant, on ne peut voir venir. Birgitte avait les pieds sur terre, elle cherchait toujours un équilibre dans sa politique, il semblerait que la saison 4 explore la question de « l’ivresse du pouvoir », voyons comment, neuf ans après, l’échiquier politique danois aura évolué. Surtout, la fascination pour la chose politique n’aura de cesse de construire, au cinéma, les liens entre ceux qui dirigent et la vie réelle. On pense ainsi au récent Les promesses avec Isabelle Huppert,  une autre manière de se confronter au réel en politique. C’est surtout le goût du pouvoir qui est sans cesse interrogé, puisqu’on avait laissé Birgitte, en fin de saison 3, prête à repartir à l’affrontement électoral.

Borgen : Bande annonce

Borgen : Fiche technique

Borgen décrit les batailles politiques pour le pouvoir au Danemark et les sacrifices personnels qu’elles entraînent. Le personnage principal, Birgitte Nyborg, est une femme politique qui a permis à son parti d’obtenir une victoire écrasante. Elle doit maintenant répondre aux deux plus importantes questions de sa vie : comment utiliser au mieux cette majorité et jusqu’où peut-on aller pour obtenir le pouvoir…

Créée par : Adam Price
Interprètes : Sidse  Babett Knudsen, Birgitte Hjort  Sorensen, Pilou Absaek, Mikael Birkkjaer, Thomas Levin, Soren Malling
Durée : 3 saisons / 30 épisodes de 52 minutes
Diffusion : Arte entre 2010 et 2013 et prochainement saison 4 sur Netflix

 

Reporter LeMagduCiné