critique-l-ete-de-kikujiro-takeshi-kitano

Les films de l’été : L’été de Kikujiro de Takeshi Kitano

Tout le mois d’août, les rédacteurs de CineSeriesMag vous font découvrir les meilleurs films de l’été. Aujourd’hui, ballade au Japon en compagnie de Kitano avec L’été de Kikujiro.

Quand on parle de l’été au cinéma, il y a forcément des titres qui viennent directement à l’esprit. Mais il y a surtout une évidence, une évidence aussi simple que le titre de ce film, L’été de Kikujiro de Takeshi Kitano. Considéré comme l’un des classiques de son auteur, le film sort en 1999 alors que Kitano est au sommet de sa popularité internationale, venant de remporter deux ans auparavant le Lion d’or à la Mostra de Venise pour son autre grande œuvre Hana-Bi. L’été de Kikujiro, c’est un véritable concentré de Kitano. Un yakuza interprété par le cinéaste, une mélancolie omniprésente, une réalisation composée de plans fixes, une lenteur calculée, des personnages hauts en couleurs, une bande-originale de Joe Hisaishi, tout cela se retrouve dans le 8ème film du réalisateur nippon.

l-ete-de-kikujiro-takeshi-kitano-yusuke-sekiguchiL’été de Kikujiro est une sorte de road-trip, un voyage à travers le Japon dans lequel on va suivre un duo des plus inattendus. Le jeune Masao s’ennuie pendant ses vacances d’été, sa mère dont il n’a plus de nouvelles depuis bien longtemps lui manque. À ses côtés, Kikujiro, un yakuza vieillissant ayant un penchant pour les jeux d’argent (personnage directement inspiré du père de Kitano), va lui venir en aide afin de retrouver sa mère. Les voilà partis sur les routes du pays du soleil levant. Si le voyage démarre mal, Kikujiro profitant de Masao pour essayer de gagner aux courses, le duo va très vite vivre de nombreuses autres péripéties se caractérisant par la rencontre de personnages divers et variés, vivant en marge de la société.

Le film est beau, tout simplement. C’est la magie Kitano. Cet homme arrive à faire des films magnifiques avec une histoire à première vue extrêmement simple, et tout fonctionne. L’été de Kikujiro est peut-être son plus beau film. Kitano capte des moments qui confinent au sublime avec sa caméra. La séquence des jeux sur la plage entre Masao, Kikujiro et les motards en est l’exemple parfait. Sous leurs aspects de jeux idiots à base de déguisements ridicules, c’est le bonheur que Kitano imprime sur ses images. Un bonheur si bien retranscrit que l’on est obligé de sourire bêtement devant notre écran, car le cinéma de Kitano possède cette impressionnante faculté communicative. Cela marche pour la joie, mais aussi la mélancolie. Grand cinéaste de la mélancolie, Kitano n’a pas son pareil pour cultiver ce sentiment. L’été de Kikujiro en est bien évidemment teinté. Cette histoire de garçonnet cherchant à renouer avec sa mère, aidé par un yakuza ayant vécu la même chose, donne ce caractère maussade aux personnages qu’on partage avec eux. Jovialité et morosité se télescopent dans L’été de Kikujiro. D’un côté cet amusement avec ces personnages eux aussi abandonnés par la société, et de l’autre cette quête qui restera inachevée, le film nous fait passer du rire aux larmes en peu de temps.

La mélancolie et la joie ne sont-ils pas non plus les sentiments parfaits pour décrire des vacances ? La joie du moment, la mélancolie de ceux passés, le film de Kitano c’est un peu tout ça à la fois. Quand Kikujiro voit qu’il ne peut rien faire pour aider Masao, il décide de lui donner le sourire. Le yakuza va comme le prendre sous son aile et lui faire oublier cet abandon de la part de sa mère. Ils vont faire les quatre cents coups ensemble, Kikujiro devenant un véritable clown cherchant à amuser n’importe comment le jeune Masao. Il deviendra même une figure parentale pour l’enfant, prenant soin de lui et le sortant d’une mauvaise passe, lui redonnant espoir concernant sa maman. Une véritable complicité se forme entre les deux. Et forcément, nous, spectateurs vivons tout cela avec eux. Quand tout est fini, on est comme Kikujiro, et nous n’avons qu’une seule envie, le refaire un de ces quatre. Les rires se manifestent une dernière fois, avant de que chacun ne parte de son côté, repensant aux moments inoubliables qu’ils ont passés ensemble, de véritables souvenirs de vacances.

Tout cela se finit alors que résonne une dernière fois cette mélodie entêtante de Joe Hisaishi, ces petites notes de piano résumant à la perfection ce tourbillon de sentiments que nous a fait vivre ce film. Summer, jamais un nom de morceau n’aura été aussi bien choisi et jamais un morceau n’aura aussi bien collé à un film et à ce qu’il renvoyait. Et si L’été de Kikujiro est aussi marquant, ce n’est pas seulement dû à Kitano, mais également à son fidèle acolyte Joe Hisaishi. Ce thème va revenir tout au long de ce voyage, ponctuant les aventures rocambolesques de Masao et Kikujiro. D’une simplicité n’ayant d’égal que sa beauté, Summer peut à lui seul faire tirer une larme ou esquisser un sourire sur un visage. Kitano et Hisaishi se sont compris, et leur œuvre aura résolument marqué les esprits. Ces petites choses de la vie, ces émotions, cette bonne humeur, cette nostalgie, L’été de Kikujiro est le film parfait pour l’été.

L’été de Kikujiro – Bande Annonce

L’été de Kikujiro – Fiche Technique

Réalisation et scénario : Takeshi Kitano
Interprétation : Takeshi Kitano ( Kikujiro), Yusuke Sekiguchi (Masao), Kayoko Kishimito (La femme de Kikujiro), Kazuko Yushiyuki (La grand-mère de Masao)..
Image : Katsumi Yanagishima
Montage : Takeshi Kitano
Musique : Joe Hisaishi
Producteur : Shinji Komiya, Masayuki Mori, Takio Yoshida
Société de production : Bandai Visuel, Tokyo FM
Durée : 121 minutes
Genre : Comédie dramatique
Date de sortie : 20 octobre 1999

Japon – 1999

Vous pourrez (re)voir le film en version restaurée ce mercredi 9 août 2017, dans le cadre du cycle « Chemins de Traverse »