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Kids Return, un film de Takeshi Kitano : Critique

Avant Hana-bi et L’Été de Kikujiro, Takeshi Kitano avait déjà fait parler de lui avec Kids Return. Sixième film de cette figure populaire nippone, c’est véritablement celui-ci qui l’asseoit comme un cinéaste des plus singuliers.

kids-return-ken-kaneko-masanobu-andoAu contraire de la majorité de ses œuvres comme par exemple Violent Cop ou Sonatine, Takeshi Kitano n’apparaît cette fois-ci pas devant la caméra. Avec Kids Return, Kitano met en lumière un duo d’amis dont la destinée va les séparer, tout en les gardant très proches. Masaru et Shinji sont deux amis de longue date. L’école n’est pas vraiment leur tasse de thé, et ils préfèrent passer leur temps à glander sur le toit du lycée ou à faire les 400 coups, quitte à provoquer le désordre dans la salle de classe. Ils possèdent par ailleurs leurs petits repères comme ce café où un des élèves vient chaque jour, espérant avoir un ticket avec la serveuse, ou encore un petit restaurant servant de lieu de réunion au groupe de yakuzas. Masaru et Shinji se déplacent libres comme l’air sur leur vélo, Shinji pédalant et Masaru assis sur le porte bagage. Tournant en rond dans la cour de récréation, ils défendent les opprimés ou se révoltent contre l’autorité.

Après que Masaru se soit fait passer à tabac, les deux jeunes gens vont se lancer dans un nouvel objectif : devenir boxeur. C’est à partir de ce moment que le chemin tracé par la vie va les séparer. Si Shinji s’en sort plutôt bien, devenant même boxeur professionel, les résultats ne sont pas les mêmes pour Masaru. Le jeune homme commence alors à fricoter avec les yakuzas du restaurant qu’il fréquente. Les amis vont donc évoluer dans deux milieux très différents, mais vont vivre tous les deux un certain succès. Shinji devenant très vite l’un des meilleurs éléments de son club, ce qui va le pousser à faire des matchs professionnels et Masaru de son côté, va lui aussi devenir une figure prometteuse de la pègre, inspirant une certaine confiance à son patron.

kids-return-masanobu-ando-ken-kanekoCela a déjà été dit, mais le cinéma de Kitano possède une poésie marquante qui se base très souvent par des petites séquences ou des sentiments du quotidien. Kids Return ne déroge pas à la règle, et la représentation de cette amitié par Kitano est peut-être l’une de ses plus abouties. Malgré le fait que Masaru et Shinji gravitent dans des univers diamétralement opposés, on remarque que cette amitié, cette complicité que Kitano a exposé au début de son film, reste toujours présente. Ce qui est fort c’est que Kitano va garder une certaine pudeur, loin de faire de grands éclats lyriques à base de saut dans les bras de l’autre, d’hurlements de joie, ou autre. Les rencontres entre le boxeur et le yakuza se font au détour d’un café ou d’une salle de boxe. Ils restent la plupart du temps très pudique tout en disant très long -que ça soit un regard ou une discussion banale- même si cela ne dure que quelques instants. Une fois n’est pas coutume, Takeshi Kitano cultive ce sentiment de mélancolie, de nostalgie. Les deux compères ayant fait de nombreuses facéties ensemble, se retrouve séparés et dans un autre monde que celui dans lequel ils évoluaient avant. Ce sentiment déteint très vite sur le spectateur qui s’est très vite attaché à Masaru et Shinji et qui ne peut s’empêcher d’avoir un pincement au coeur quand il les voit là où ils sont. Kids Return est une ode à l’amitié, délivrée de façon subtile mais d’une puissance non moins phénoménale.

Kitano mélange encore une fois les genres et les tons, car malgré cette mélancolie omniprésente qui teinte tout le long-métrage, les rires se font eux aussi présents. Les pitreries des deux personnages principaux, ou même des séquences de stand-up interprétés par deux élèves, ajoutent un peu de gaieté à une histoire qui s’avère au final assez dure. Bien que Masaru et Shinji connaissant un certain succès dans ce qu’ils entreprennent, la réalité va les frapper de manière intense comme un retour de bâton ravageur. Une descente aux enfers pour deux gamins complètement dépassés par les événements. C’est bien évidemment dans cette fin dévastatrice que Kitano révèle toute la puissance de son récit. Une lueur d’espoir scintille dans le pessimisme ambiant. En résulte alors une fin parmi les plus réussies de l’histoire du cinéma, une conclusion douce-amère, qui ouvre vers de nouvelles perspectives. Masaru et Shinji, le vélo, la cour de l’école, le thème de Hisaishi se relance. Est-ce la fin ? Non, c’est à peine le commencement.

Kids Return : Bande-annonce

Kids Return : Fiche Technique

Titre original : Kizzu Ritân
Réalisateur : Takeshi Kitano
Scénario : Takeshi Kitano
Casting : Masanobu Ando, Ken Kaneko, Ryo Ishibashi, Atsuki Ueda, Yūko Daike…
Musique : Joe Hisaishi
Genre : Drame
Distributeur : La Rabbia
Durée : 107 minutes
Récompenses : Prix de l’Académie japonaise du meilleur espoir
Date de sortie 16 avril 1997
Date de ressortie 9 août 2017 – Version restaurée

Nationalité : japonais