Six ans après la sortie de Mother! (ce qu’il nous aura fallu pour le digérer), Darren Aronofsky est de retour avec son huitième long-métrage The Whale : un film à huis clos au service du pathétique.
Une catharsis aristotélicienne ratée
Darren Aronofsky est connu pour son cinéma dérangeant et son goût des sujets complexes. Ainsi, l’addiction (Requiem for a dream) ou encore les troubles psychologiques (Black Swan, Mother..) sont des thèmes récurrents dans le travail du réalisateur. Avec The Whale, le réalisateur dresse le portrait de Charlie, un professeur d’anglais souffrant d’obésité morbide, qui dans une volonté d’expiation, tente de renouer avec sa fille Ellie, avant de mourir. Le film ne déroge pas aux choix antérieurs d’Aronofosky et s’adresse à des problématiques complexes : les troubles alimentaires et la dépression mais également la grossophobie. Le personnage de Charlie apparaît dès lors comme un paradoxe : Il est à la fois morbide et sensible.
La solitude et l’état physique de Charlie viennent nous donner un personnage au service du pathos et susciter une sorte de catharsis ratée. Charlie est dépeint comme un personnage monstrueux qui engloutit de la nourriture jusqu’à l’étouffement, transpirant et qui se déplace de manière presque robotique. Le costume créé spécialement pour le film contribue à accentuer cet aspect monstrueux. S’ajoute à cela la violence implicite du regard des personnages secondaires qui viennent moquer et presque déshumaniser Charlie. Finalement, c’est un message qui se voulait honorable qui devient presque dérangeant tant peu d’explications sont données. Le film semble être une représentation froide de l’obésité, dépourvue d’empathie. Dès lors, il faut attendre le milieu du film pour comprendre au détour d’une phrase comment Charlie en est arrivé là. Tous ces détails grotesques ne permettent pas au film d’éveiller les consciences mais inspirent plutôt un sentiment d’inconfort.
Un film paradoxal
L’angle minimaliste choisi par Darren Aronofsky dans ce nouveau long-métrage à huis clos semblait initialement suggérer un renouveau dans le travail de l’artiste. Malheureusement, c’est un film paradoxal et désorganisé que nous retrouvons à l’écran. Le paradoxe réside dans le décalage entre la beauté du film (du jeu des acteurs, de la mise en scène) et la faiblesse du scénario. D’une part, nous assistons à la mise en œuvre du talent incontestable d’Aronofsky qui réussit à maintenir une ambiance claustrophobique et à susciter mille émotions contraires chez son audience (particulièrement lors de la scène de fin). D’autre part, c’est une intrigue décousue et des personnages secondaires sans profondeur qui s’organisent autour de Charlie et qui contribuent à rendre le film indigérable et à désacraliser le message initial par manque de justesse.
En dépit de cette critique exacerbée, il serait injuste de ne pas ajouter une petite phrase pour saluer la performance captivante et émérite de Brendan Fraser dans le rôle de Charlie (The Whale). Loin de ses rôles les plus célèbres (George de la Jungle, Rick O’connell), il nous offre ici une interprétation dramatique de grande qualité. Ceci est particulièrement vrai dans la scène de fin, une scène emprunte de claustrophobie, qui étouffe le spectateur au sens propre tant il est insoutenable d’observer tant de souffrance et de congestion. Une performance nommée au Oscars et à raison ! Mais une performance qui ne suffira pas à faire oublier le caractère problématique et simpliste du film.
The Whale : Bande-annonce
The Whale : Fiche Technique
Réalisation : Darren Aronofsky
Par Samuel D. Hunter, Samuel D. Hunter
Avec : Brendan Fraser, Sadie Sink, Hong Chau, Samantha Morton, Ty Simpkins
Genre : Drame / 1h 57min
Distributeur : ARP Sélection