Sur OCS Géants, le 3 décembre, soirée Spéciale Censure à Hollywood
Préambule du Code Hays:
« Principes généraux :
- Aucun film ne sera produit qui baissera les standards moraux de ceux qui le voient. La sympathie du spectateur ne doit jamais être jetée du côté du crime, des méfaits, du mal ou du péché.
- Seuls des standards corrects de vie soumis aux exigences du drame et du divertissement seront présentés.
- La Loi, naturelle ou humaine, ne sera pas ridiculisée et aucune sympathie ne sera accordée à ceux qui la violent »
Il est difficile de croire que l’une des périodes les plus fastes de la (courte) histoire du cinéma était aliénée à ce point par une administration qui contrôlait tout ce qui était dit, tout ce qui était montré. Difficile de croire également, que pesait sur chaque réalisateur, sur chaque scénariste cette épée de Damoclès faite de morale et de bienséance. D’autant plus avec notre perception actuelle où les libertés d’expression, de pensée, et de création sont sacralisées, parfois même au détriment de principes tout aussi défendables… Pourtant, il faut admettre que la production de l’époque n’a pas forcément subi économiquement et artistiquement le diktat quasi prosélyte imposé à Hollywood. Car malgré cela, des années 30 à la fin des années 60, les grands studios accouchent des films les plus mythiques : les actrices ont réussi à rendre la pudeur suave, et les auteurs ont maquillé la violence et la débauche. C’est dans ce numéro d’équilibriste que nous entraînent Clara et Julia Kuperberg ; réalisatrices et productrices à la tête de WichitaFilms This is (Orson Welles, présenté à Cannes et à Deauville). Les deux sœurs continuent leur exploration du cinéma américain ; ici avec une approche sociétale : entre studios, politique, et population. Puisque ce que l’on acceptait de voir sur les toiles n’était que le reflet des dynamiques tantôt libérales tantôt conservatrices, qui agitaient les Etats-Unis
Le documentaire n’a à peine le temps de balayer ces 3 décennies de censure qu’il prend déjà fin, un film presque trop court donc (52 min), mais qui à le mérite d’être digeste en plus d’être éclairant. Le dispositif est simple : deux historiens du cinéma, des images d’archives, et des extraits des plus grands classiques, le tout retraçant chronologiquement l’influence de la censure sur la production hollywoodienne. Du pré Code à la déliquescence des tabous. Il nous est donc compté comment les cinémas ont été désertés à la fin des années 20, obligeant les auteurs à rendre leurs films plus subversifs, plus érotiques, plus attractifs pour le grand public. Au grand dam des instances religieuses et des populations très pieuses du pays, des ligues sont organisées qui entament une résistance endiguant réellement la fréquentation des salles, boostée par un cinéma plus corrosif. La réaction des studios ne se fait pas attendre, effrayés par la possibilité du boycott ou de la censure de leurs investissements (le cinéma n’était pas protégé par le premier amendement à l’époque, qui défendait la liberté d’expression), Hollywood accepte de se museler en interne. En mars 1930, le sénateur, et président de la Motion Pictures Producers and Distributors Association, William Hays établit le Code de Censure, un texte écrit un an plus tôt par deux ecclésiastiques. Un Code qui mettra du temps à s’imposer, puisque c’est seulement quatre ans plus tard qu’il deviendra vraisemblablement effectif, une application stricte qui coïncide avec l’arrivé à la tête de la Production Code Administration de Joseph Breen. Il dirigera d’une main de fer l’organisation pendant vingt ans, faisant prôner la sainte morale catholique sur le cinéma américain, prohibant tout ce qui pouvait choquer ou déranger l’audience. Une mise sous tutelle du 7ème art au bénéfice de l’ordre public et des bonnes mœurs.
Mais le documentaire s’affaire surtout à démontrer comment cette censure a finalement desservi le cinéma. Puisqu’un film ne pouvait sortir en salle sans le tampon de Joseph Breen, il fallait évidement se plier au Code ; mais cela n’empêchait en rien de s’aventurer sur le terrain du non-dit, et de l’implicite ! Les auteurs, les réalisateurs ont redoublé d’ingéniosité dans leur dialogue et leur mise en scène pour finalement améliorer considérablement la qualité de leurs œuvres, et contourner l’interdit. De Lubitsch à Hitchcock, de Wyler à Wilder, les plus grands cinéastes ont sévi durant l’apogée du Code Hays ; les sœurs Kuperberg nous proposent de découvrir comment leurs œuvres n’ont jamais pâtit des barrières dressées par la censure. De la même façon, les actrices parmi les plus sublimes du cinéma ont fleuri durant cette période, parfois même sans se conformer aux canons de la femme au foyer, bonne épouse et bonne mère. Le beau sexe devient mauvais genre, alors que la morale catholique tient toujours de main de fer les studios Hollywoodiens ! Les Audrey, Ingrid, Grace et autres Marylin trônent sur les affiches et deviennent des symboles de grâce et de disgrâce, dans leurs rôles de femmes fatales, irrévérencieuses, ou volages.
Un documentaire captivant mais auquel on peut reprocher un brièveté quelque peu frustrante, mais qui tombera sans doute à point lorsqu’il sera diffusé après Lolita de Stanley Kubrick, le 3 décembre sur OCS.
La censure à Hollywood – documentaire sur OCS géants
LA CENSURE A HOLLYWOOD : de l’hyper sexualisation des films « pré-code » au Code Hays, écrit et réalisé par Clara et Julia Kuperberg, documentaire de 52 minutes diffusé sur OCS Géants le 3 décembre à 22h30 dans le cadre d’une soirée spéciale Censure à Hollywood.
Avec : Thomas Doherty, Craig Detweiler
Montage : Julia Kuperberg, Clara Kuperberg
Production : Wichita Films
Photographie et Son : Peter Krajewski, Mitch Espe
Mixage : Thierry Moizan
Distribution à l’étranger : Poorhouse International
Avec la participation de OCS et du CNC
Code Hays
I- Crimes
Ceux-ci ne seront jamais présentés d’une telle façon à créer la sympathie avec le criminel ou inspirer d’autres avec un désir d’imitation.
- Meurtre
a. La technique du meurtre doit être présentée de manière à ne pas encourager l’imitation.
b. Des meurtres brutaux ne doivent pas être présentés en détail.
c. La vengeance n’est pas justifiée dans un film où l’action se passe dans l’époque actuelle (moderne).
- Les méthodes criminelles ne doivent pas être explicitement présentées.
a. Les techniques pour le vol, le cambriolage et le dynamitage de trains, de mines, de bâtiments, etc., ne doivent pas être présentées en détail.
b. L’incendie criminel doit être soumis aux mêmes sauvegardes
c. L’utilisation d’armes à feu doit être limitée.
d. Les méthodes utilisées dans la contrebande ne doivent pas être présentées.
- Le trafic de la drogue ne doit jamais être présenté.
- On ne montrera pas la consommation de spiritueux dans la vie américaine, sauf dans les cas où cela fait partie intégrante du scénario ou des caractéristiques d’un personnage.
II- Sexe
L’institution du mariage et l’importance de la famille sont primordiales.
- L’adultère, parfois nécessaire dans le contexte narratif d’un film, ne doit pas être présenté explicitement, ou justifié, ou présenté d’une manière attrayante.
2. Scène de passion:
a. Ils ne doivent pas être présentées sauf s’ils sont essentielles au scénario
b. Des baisers excessifs ou lascifs, des caresses sensuelles, des positions et des gestes suggestifs ne doivent pas être montrés
- Séduction et viol :
a. La suggestion est permise (rien de plus) et seulement lorsqu’il s’agit d’un élément essentiel du scénario
b. Ils ne sont jamais un sujet approprié pour la comédie.
- Toute référence à la perversion sexuelle est formellement interdite.
- L’esclavage de personnes de race blanche ne doit pas être présenté.
- La présentation de rapports sexuels entre les personnes de race blanche et celles de race noire est interdite.
- L’hygiène sexuelle et les maladies vénériennes ne sont pas des sujets appropriés au cinéma.
- La naissance d’un enfant (même en silhouette) ne doit jamais être présentée.
- Les organes sexuels d’un enfant ne doivent jamais être visibles à l’écran.
III. Grossièreté
La présentation de sujets vulgaires, répugnants et désagréables doit être soumise au respect des sensibilités des spectateurs et aux préceptes du bon goût en général.
IV. Obscénité
L’obscénité dans le mot, dans le geste, dans la chanson, dans la plaisanterie, ou même simplement suggérée est interdite.
V. Blasphème
Le blasphème (incluant les mots « God », « Lord », « Jesus », « Christ », « Hell », « S.O.B », « damn », « Gawd ») est strictement interdit.
VI. Costume
- La nudité (réelle ou suggérée) est interdite ainsi que les commentaires d’un personnage à ce sujet (allusions à…).
- Les scènes de déshabillage sont à éviter sauf lorsqu’il s’agit d’un élément essentiel du scénario.
- L’indécence est interdite.
- Les danses lascives et les costumes trop révélateurs sont interdits.
VII. Danses
- Les danses qui suggèrent ou représentent des relations sexuelles sont interdites.
- Les danses qui comportent des mouvements indécents doivent être considérées comme obscène.
VIII. Religion
- Aucun film ne doit se moquer de la religion sous toutes ses formes et de toutes les croyances.
- Les ministres ne peuvent pas être dépeints comme des personnages comiques ou comme des bandits.
- Les cérémonies de n’importe quelle religion définie doivent être présentées avec beaucoup de respect.
IX. Emplacement
La présentation de chambres à coucher doit être dirigée par le bon goût et la délicatesse.
X. Fierté nationale
- La présentation du drapeau se fera toujours de manière respectueuse.
- L’histoire des institutions, des gens connus et de la population en général d’autres nations sera présentée avec impartialité.
XI. Titres
Des titres licencieux, indécents ou obscènes ne seront pas employés.
XII. Sujets Répugnants
Les sujets suivants doivent être traités avec beaucoup de prudence et de bon goût :
- Les pendaisons et les électrocutions légales (punition d’un criminel).
- La brutalité et l’horreur.
- Le tatouage (marquer au fer) d’animaux et d’êtres humains.
- La cruauté envers les enfants ou les animaux.
- La vente des femmes et la prostitution.
- Les opérations chirurgicales.