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La Page blanche : réinventer sa vie

Chloé Margueritte Reporter LeMagduCiné
2.5

Bien calibré « comédie romantique à la française », La Page blanche surprend rarement mais pioche du côté de la douceur (merci Sara Giraudeau) pour dire tout simplement qu’il est toujours possible de réinventer sa vie (même sans perdre la mémoire). Avec un personnage féminin jamais figé, toujours en mouvement, le film dresse un portrait souvent très drôle d’une fille qui se cherche. Dommage qu’il faille toujours en passer, pour l’héroïne, par la case « trouver l’amour ».

Se rencontrer soi-même

La Page blanche est un film bien ancré dans son époque. En perdant son téléphone, Eloïse perd « sa vie »,  ou du moins avec sa mémoire tout ce qui s’y cachait et renfermait ses échanges, ses amis, sa famille, bref son identité. D’abord en quête de son passé, elle fait une recherche effrénée et minutieuse pour se (re)trouver telle qu’elle était. Pourtant, très vite, Eloïse se rend compte qu’elle ne va pas spontanément vers ceux qui l’attirent vraiment, qu’elle est comme empêchée d’être elle-même. Le film tente alors de dresser le portrait d’une bande de potes dans laquelle personne ne pense pas par lui-même, chacun suit les goûts d’autrui. A ce moment, Eloïse est dans ses déplacements comme désarticulée, accélérée (le film accélère ces moments où elle déambule), car en train de se perdre, de faire les mauvaises recherches.

Peu à peu Eloïse va s’émanciper d’elle-même et décider que cette « page blanche » sera l’occasion de se réinventer ou du moins de se retrouver. A ce jeu-là, Sara Giraudeau est parfaite, pleine d’une fantaisie propre à en faire une héroïne de bande dessinée. Un peu tourné à la Frances Ha pour le côté spontané, quête et poésie, La Page blanche peine cependant à aller jusqu’au bout de ses choix. En effet, l’héroïne n’est tournée finalement que vers une quête amoureuse, c’est en tout cas ce vers quoi le film tend finalement. On voit alors Eloïse flirter au final plus vers une Emily in Paris (car le quartier du banc où elle perd la mémoire est comme le Paris fantasmé de la série) et donc se perdre dans cette quête d’identité radicale qu’on aurait pu espérer au début pour entrer dans un autre conformisme tout en croyant s’en libérer.

Un goût d’inachevé

Cet effet lisse serait-il la faute à des personnages secondaires trop caricaturaux et donc à une comédie un peu fade ? « Autant je trouvais l’histoire de Murielle (Magellan) et la personnalité d’Eloïse, très belles – on y lisait déjà ce côté à la fois mélancolique et solaire – autant je trouvais que le scénario s’égarait un peu avec les autres protagonistes. Je les sentais trop appuyés », déclare Sara Giraudeau qui explique avoir d’abord refusé le scénario avant une réécriture. Cependant, malgré le fait que Sara Giraudeau ait finalement vu un équilibre entre la personnalité multiple et désorganisée d’Eloïse et les autres personnages, il n’en demeure pas moins que le film souligne un peu trop les évidences. On se plait alors à voir Eloïse quitter Paris pour Montauban avec sa toute nouvelle copine (invisible à ses yeux auparavant) et s’émerveiller de sa famille, qu’elle rejetait avant. Là encore cependant tout est trop, même l’opposition entre le Paris branché et les petits provinciaux qui font des métiers « si utiles »… Bref, le film est doux, la quête de l’héroïne revigorante mais rien n’est assez radical et donc tout tombe un peu à plat. Certes, il faut perdre la mémoire au moins une fois dans sa vie pour tout réinventer comme dirait Eloïse, encore faut-il filmer le courage de tout changer, sans compromis scénaristique à la « happy end ».

La Page blanche : Bande annonce

La Page blanche : Fiche technique

Synopsis : Eloïse se retrouve assise seule sur un banc parisien. Qui est-elle ? Que fait-elle là ? Elle ne se souvient de rien ! Elle se lance alors dans une enquête, pleine de surprises, pour découvrir qui elle est. Et si cette amnésie lui permettait de trouver qui elle est, qui elle aime, et de réinventer sa vie ?

Réalisation : Murielle Magellan
Scénario : Murielle Magellan d’après l’oeuvre de Pénélope Bagieu et Boulet
Interprètes : Sara Giraudeau, Pierre Deladonchamps, Grégoire Ludig, Sarah Suco…
Photographie : Laurent Brunet
Montage : Christine Lucas Navarro
Distribution : SND
Durée : 1h40
Genre : comédie
Date de sortie : 27 août 2022

Reporter LeMagduCiné