On l’a constaté notamment à travers la collaboration entre Glénat et Ubisoft : les adaptations de jeux vidéo pullulent dans le monde de la bande dessinée. Super Pixel Boy #2 s’en démarque toutefois par son alliage entre le récit de jeunesse et l’expérience vidéoludique. Loïc Clément remet le couvert aux éditions Delcourt et propose au lecteur une nouvelle incursion dans l’esprit d’un adolescent ébahi par les consoles de salon.
Le choix de Loïc Clément de transposer l’univers du jeu vidéo en bande dessinée n’est pas qu’un simple exercice de style. Le scénariste et dessinateur rend hommage, dans une démarche introspective, aux expériences formatrices de son enfance. Le jeune Pixel, avatar de ces jeunes joueurs des années 1980, évolue dans un contexte social typique de l’époque et découvre, en même temps que le lecteur, des jeux tels que Golden Axe ou Duck Hunt, qui deviennent aussitôt les réceptacles d’un certain héritage culturel.
Chaque chapitre de Super Pixel Boy #2, comme son prédécesseur, passe par un dessin nostalgique rappelant l’esthétique propre aux jeux vidéo de l’époque. Le lecteur est ainsi immergé dans l’expérience elle-même, que Loïc Clément commente avec ses yeux de l’époque. Les transitions narratives permettent d’organiser le passage entre le monde « réel » de Pixel – ses amis, sa petite amie du moment – et le monde « virtuel » des jeux vidéo, source d’émerveillement et, parfois, d’agacement ou de déception. Ces éléments structurels agissent comme des passerelles entre deux univers qui, bien que distincts, s’enchevêtrent dans la mémoire et l’expérience du personnage.
Au-delà des quêtes virtuelles et des découvertes (de Dragon Ball à Super Mario 2), l’album soulève une problématique ô combien universelle : celle de l’amitié et de l’amour du temps de l’adolescence. Les maladresses de Pixel, qui néglige Elo pendant les vacances, deviennent rapidement le nœud dramatique qui tapisse l’intrigue. Il y a dans cette « reconquête » espérée une symbolique qui évoque, presque métaphoriquement, les « niveaux » à franchir dans un jeu vidéo. Et ça tombe plutôt bien, puisque Loïc Clément ne cesse d’entremêler les deux mondes.
Super Pixel Boy #2 en fait amplement état : les jeux vidéo, loin d’être de simples passe-temps, font partie intégrante de notre patrimoine culturel et même émotionnel. Loïc Clément parvient à orchestrer avec talent et humour, mais aussi nostalgie, une œuvre bidimensionnelle, jouant habilement entre passé et présent, réalité et virtualité. Il n’omet pas, chemin faisant, d’évoquer ce qui constitue l’attrait et les faiblesses des jeux mentionnés, ce qui demeure probablement la grande force de cette série.
Super Pixel Boy #2, Loïc Clément
Delcourt, octobre 2023, 96 pages