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« Nouvelle vie », la suite de « Pitcairn » paraît aux éditions Glénat

Jonathan Fanara Responsable des pages Littérature, Essais & Bandes dessinées et des actualités DVD/bluray

Les scénaristes Mark Eacersall et Sébastien Laurier et le dessinateur Gyula Németh donnent une suite à l’album « Terre promise », qui initiait la série Pitcairn, L’île des révoltés du Bounty aux éditions Glénat.

« Terre promise » racontait la destinée des mutins du Bounty, prompts à investir des espaces sauvages et à y semer la discorde, voire le chaos. La narratrice Mary Ann Christian revenait sur « une histoire de sang et de malheurs » qui allait contrarier les plans idylliques de son père, désormais en rupture avec la Royal Navy. « Nouvelle vie » s’inscrit évidemment dans la continuité de ce récit. Au début de l’année 1790, les mutins débarquent sur une île déserte et isolée, Pitcairn. Ils s’y établissent, démontent leur navire, se partagent les femmes et tentent de faire face à tous les événements qui ne manqueront pas de mettre à mal leur communauté.

Parmi ces derniers, on compte bien entendu les désaccords organisationnels, les conflits culturels, mais aussi les questions filiales, familiales et sexuelles. Ainsi, il suffit qu’une femme décède pour que son veuf jette son dévolu sur celle d’un autre, au risque de provoquer de graves tensions dans le groupe. Le dessinateur Gyula Németh peut donner la pleine mesure de son naturalisme expressif dans des cases aérées, où les paysages, les éléments naturels et la lumière (un feu, des rayons de soleil, la pénombre…) occupent une place centrale.

Adaptation, résilience, accommodements… Dans un récit où les uns et les autres tendent à se regarder en chiens de faïence, souvent pour des motifs culturels, Pitcairn devient un microcosme sujet aux dissensions et aux tensions. L’espoir d’un renouveau fait rapidement place aux problèmes pratiques, aux besoins humains les plus élémentaires, aux croyances ancrées et/ou dévoyées. Dans une communauté en mutation constante, les auteurs font alterner les séquences où les femmes indigènes discutent de leur statut, où les hommes blancs se réservent le droit de vote et donc de décision, où les trahisons se révèlent dans leur extrême pluralité.

Et si cette société utopique se muait en authentique enfer ? C’est en tout cas le chemin que prend ce second tome de l’adaptation en bande dessinée du récit-enquête de Sébastien Laurier. Les dernières planches font ainsi place au sadisme, à la rancœur et aux divisions inexpiables. Les bases étant désormais bel et bien posées, on attend des scénaristes un effort significatif dans la caractérisation des différents personnages, qui continuent de manquer de relief – et souvent, plus prosaïquement, de dialogues.

Pitcairn, L’île des révoltés du Bounty : Nouvelle vie, Mark Eacersall, Sébastien Laurier et Gyula Németh
Glénat, octobre 2022, 56 pages

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