Festival de Deauville épisode 7: Divorce, trafic, et Flaubert
Babysitter de Morgan Krantz
Dernier jour de compétition à Deauville, tous les dès sont lancés. Le jeune Morgan Krantz présente un premier film (Encore une fois, 6 dans toute la sélection) sur les conséquences houleuses d’un divorce, et sur l’apaisement éphémère amené par la nouvelle babysitteuse. En revisitant (dans les grandes lignes) Kramer contre Kramer (Robert Benton, 1979) à la sauce teenage movie, le cinéaste Californien fait bonne impression. Peut être influencé par son histoire personnelle, il nous raconte que c’est d’après son vécu qu’il a battît son intrigue, l’enveloppant de fiction pour l’exagérer. C’est sur le lien sacré entre la mère et son fils que le film repose, un lien mis à rude épreuve car pollué par l’argent et les égoïsmes des clauses du divorce.
Ray Longway (Max Burkholder) a 14 ans, il vit avec sa petite soeur chez sa mère, actrice de profession à la carrière insignifiante. Son père qu’il voit très peu, est un grand nom d’Hollywood qui leur a assuré un train de vie confortable. Ray doit maintenant choisir avec lequel de ses deux parents il veut vivre. Sa mère qui doit absolument prouver l’amour de ses enfants devant le Juge, entame une politique de cécité devant les faits et gestes de son fils afin d’assurer son gain de cause. Pour bien préparer le procès (que ses parents paient), elle engage une jeune babysitter pour s’occuper de ses progénitures. L’adolescente, noire, satisfait la mère en s’occupant de la maison, choie la bambine dans les ballades et les déguisements, et entraîne Ray sur une vie d’adulte qui se profile. Car ces derniers tombent très rapidement amoureux, et entame une histoire qui devient vite trop belle pour cet adolescent dans la marge, qui deal pour s’intégrer. Un doute s’implante dans l’esprit de Ray: Sa mère lui a t-elle servi sur un plateau cette femme qui le comble, afin de s’assurer de sa fidélité au procès ? Morgan Krantz signe un bon film sur la famille moderne à l’ambiance douce amère.
Dope de Rick Famuyiwa
La dernière pièce de la sélection était projetée cette après-midi en l’absence de l’équipe du film. Un métrage déjà présenté à Sundance et qui devrait trouver son public dans les salles. Parce qu’il se trouve que c’est un certain Pharell Williams qui a produit le film, et que surtout le film est super sympa ! Rick Famuyiwa nous entraîne, pour son 4ème long métrage dans les bas fonds de L.A (une ville décidément à l’honneur dans cette édition) dans la vie agitée emprunte de nostalgie de Malcolm. Un jeune noir, premier de la classe, geek, fan du hip hop des 90’s. Alors qu’il soigne sa candidature pour Harvard il se retrouve en possession d’un sac remplie de Molly, la nouvelle drogue qui fait fureur. Tout en humour, le cinéaste nous empreigne de cet air de WestCoast qui fait le succès d’une saga comme GTA, tout en l’abordant avec un second degrés rafraîchissant. En se penchant sur l’ère du réseau et du multimédia, Famuyiwa réinvente le trafic de drogue, et rend une copie savoureusement comique et discrètement militante. (Lire la critique du film Dope)
Madame Bovary de Sophie Barthes
Séance de rattrapage au Casino de Deauville sur un film qui était projeté jeudi en compétition. La réalisatrice Sophie Barthes se penche, avec se second long métrage, sur un classique parmi les classiques: Madame Bovary (Flaubert, 1856). Mia Wasikowska prête ses traits à la versatile et volage Emma, une interprétation de qualité relevé par les costumes de Valérie Ranchoux et la photographie d’Andri Parekh. L’image est d’ailleurs le grand atout du film qui recréer l’aspect huileux des vieux tableaux, et la froide brume des campagnes Normandes. Une atmosphère à la fois belle et inhospitalière qui sied parfaitement à la chute morale et sociale d’Emma Bovary. Si l’on peut regretter un certain soporifisme, on prend plaisir à redécouvrir en image les lignes de Flaubert.