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Cannes 2016 : Talk Women in motion avec Salma Hayek

Talk Women in motion avec Lisa Azuelos, Su-Mei Thompson, Zainab Salbi et Salma Hayek

           À l’occasion du nouveau Talk Women in Motion organisé par Kering en collaboration avec Variety, CineSeriesMag a rencontré Lisa Azuelos (réalisatrice de Comme t’y es belle, LOL, Une rencontre ainsi que scénariste et productrice), Su-Mei Thompson (Présidente de la Women’s Foundation d’Hong Kong), Zainab Salbi (auteure, activiste des droits des femmes, qui travaille dans l’humanitaire et qui est aussi une commentatrice média et une entrepreneure du social), et Salma Hayek Pinault (actrice, réalisatrice et productrice).

            Le nouveau show de Zainab Salbi sur TFC ou télévision arabe a été présenté avec un extrait, puis par Zainab Salbi en personne : « C’est une chose de parler de ça ici, c’est une autre chose de le faire. (…) Il nous faut gagner un espace où les femmes peuvent s’accomplir. (…) On parle des femmes oppressées, pas des femmes qui agissent. Second point, pour donner aux femmes un espace pour vraiment parler, (…) il faut comprendre leur culture. (…) Il y a des femmes courageuses, des femmes incroyables… (…) C’est un talk show qui peut leur donner leur accomplissement ; il s’agit de montrer les possibilités de changement dans notre culture…ça s’adresse à un public arabe, ça n’est pas international. (…) C’est un nouveau dialogue, (…) c’est un espace pour dire : « vous n’êtes pas seules, il y en a bien d’autres ici. J’ai réalisé que la source secrète (des femmes, NDLR) est l’inspiration d’où sont tirées des histoires, des films, des livres…  Je me suis demandé comment j’allais pouvoir être utile pour aider les femmes ».

            salma-Hayek-Talk-Women-in motionEnsuite Salma Hayek Pinault a pris la parole : « les femmes n’étaient pas autorisées à jouer, autour du monde. Les rôles féminins étaient joués par des hommes. Puis elles se sont faites une place. Puis il y a eu Julia Roberts, Meg Ryan… (…) Mon Dieu, des femmes, Demi Moore…  Je suis la première femme mexicaine actrice dans les 1990’s. Et c’était muet. (…) Certains disaient que les femmes ne rapportaient rien au box-office, il y a seulement vingt ans. (…) J’étais un peu en colère, mais surtout beaucoup excitée, car je voyais quelque chose clairement se mettre en place. (…) Je savais que ça allait être un combat, mais chaque femme en nous doit agir, et se tenir droite, ne pas s’arrêter… ». Elle a ensuite continué sur la fondation Kering : « Cette fondation (Kering, NDLR) est très différente de tout ce qu’il y a dehors. C’est fantastique que des consciences sociales se forment en dehors des corporations. (…) Personne n’en entendait parler, mais vous devez continuer de travailler. (…) Des femmes qui soutiennent et combattent… Nous nous sommes bien organisées, ils n’étaient pas des gens avec beaucoup d’expérience. (…) Nous avons décidé de nous déplacer (…) c’est vraiment incroyable comme en seize ans la compagnie a fait un bond ». Elle poursuit : « C’est tellement important de dire nos histoires. (…) Nous soutenons les films qui racontent les choses (les femmes sexuellement agressées à travers le monde, NDLR), mais nous devons trouver des solutions pour les femmes agressées (…) Nous faisons le film, et nous l’appliquons dans la vie. Nous avons l’inspiration, et nous agissons dans la vie. »

Un extrait d’un documentaire produit par la firme Kering et Salma Hayek, ELLES ont toutes une histoire, nous fut présenté.

Lisa Azuelos prit ensuite la parole pour expliquer son invention du terme Genophobie : « J’ai réalisé… Il y a deux ans (…) Je pensais qu’il manquait un mot pour parler de certaines choses (…) vous devez nommer les choses correctement pour pouvoir agir comme il faut sur elles. Les homosexuels n’avaient pas de nom. Homophobie a été créé dans les années 90’s. (…) Nous parlons toujours des victimes et c’est très bien, mais je voulais parler de ceux qui en sont coupables. J’ai donc décidé de créer ce mot : Genophobia. (…) Comme Homophobie, je voulais avoir quelque chose qui rallie ensemble. (…) Il me manquait ce seul mot pour les femmes. En ce moment même, (…) 90,7 / 100 des agresseurs mâles en Amérique ne vont pas en prison. Il y a tellement de souffrance dans le monde, et on nous dit d’arrêter avec nos problèmes de femmes, (…) mais il faut tendre à la paix. Donc il fallait vraiment créer quelque chose qui nous le permette. Il y a deux ans, je me demandais ce que je pouvais faire. Car je suis d’accord avec vous toutes, c’est bien d’être conscient de tous ces problèmes mais il faut agir. (…) J’ai fait un petit film, 14 Million de cris, car il y a 14 millions filles qui sont mariées de force chaque année (…) le film a été vu par un million de personne en une semaine. Et mes amis m’ont dit ne plus voir le mariage forcé de la même manière. (…) Je sais que la nouvelle génération est sur le web, alors j’ai organisé ce concours avec pour thème / sujet : qu’est-ce que pour vous la Genophobie ? Et j’en ai reçu beaucoup. »

Un court-métrage de Lila Baral, produit par Lisa Azuelos fut alors projeté. Un autre clip, cette fois-ci produit par Su-Mei Thompson, fut lancé. Elle prit ensuite la parole : « Je dois dire que je suis ingénieur, pas vidéaste. Donc je ne savais pas comment j’allais faire. Je ne m’attendais pas à un tel challenge, alors aujourd’hui j’ai vraiment du respect pour l’industrie (du film, NDLR). Il y avait tant de choix à faire, (…) finalement nous avons choisi une jeune réalisatrice qui n’avait pas fait de film qui dépasse dix minutes. Est-ce que c’était un risque de travailler avec des gens dont on croyait au potentiel ? Oui, mais ils croyaient tellement en la fondation. (…) Le message du film est de dire à l’industrie des médias et des divertissements qu’il reflète des portraits de femmes de la réalité. (…) Certaines femmes n’ont pas de travail car elles ne font pas attention à la manière dont elles s’habillent. (…) Les portraits fabriqués par les médias des femmes comme objets sexuels tendent à inciter à davantage d’agressions sexuelles. (…) Et vous pouvez tous y participer ». Elle montre un panneau avec : #Sheobjects.

            Le groupe est ensuite revenu sur la place des femmes au cinéma dans le monde. Salma Hayek prit d’abord la parole : « Je pense que la France est diversifiée, (…) il y a du soutien pour beaucoup d’entre vous (…) en général en Europe, et plus familièrement en France. Je sais que les stéréotypes sont forts, avec Hollywood qui les exporte. (…) »

Lisa Azuela : « Ce n’est pas seulement un manque de réalisatrices, c’est aussi le fait que ce soient des histoires d’hommes (…) C’est juste que les histoires sont toujours écrites du côté masculin, et sont associées à des noms masculins. Quand je pense à Clint Eastwood et la Route de Madison, je doute que les gens retiendront Eastwood, mais ils parleront de la Route de Madison comme l’un des plus beaux films jamais faits ».

Salma Hayek Pinault : « C’est un business, il ne faut pas l’oublier, c’est une industrie. (…) Je pense que maintenant nous avons un pouvoir différent dans la conception. (…) Le problème est que nous devons avoir une chance d’écouter ce que les femmes veulent. (…) Nous devons trouver ce que nous voulons voir et, ensemble, voir des films. (…) Qui parle de moi, la femme qui travaille, qui va avoir des enfants ? Nous sommes abandonnées en tant que publics. »

La cinéaste mexicaine est revenue sur une autre machine à images : « Vous parlez des réseaux sociaux, mais je trouve qu’on ne prend pas en compte l’importance de ces réseaux sociaux dans la construction de ces filles. Elles se fabriquent une image, (…) plus tard, elles vont devoir affronter la réalité. (…) Pour Ugly Betty (qu’elle a produit, NDLR), ils ne faisaient pas un show d’une heure sur un seul personnage, féminin, pas belle, pas maigre, et en plus mexicaine. (…) Le premier épisode a eu 60 millions de vues. (…) Je sais ce que les femmes veulent. Nous devrions pouvoir voir ce que nous voulons avec notre argent. (…) Je pense que le cinéma et la télévision peuvent aider, mais maintenant vous avez ces machines (les réseaux sociaux, NDLR) qui détruisent vos âmes. »

Zainab Salbi continue : « Ce n’est pas juste une conversation de femmes, nous devons aussi écouter des hommes. C’est aussi une conversation universelle. »

Lisa Azuelos : « C’est pour cela que je parle de Genophobia, les hommes ne sont pas les méchants. »

             Puis ces combattantes des droits des femmes sont revenues sur leur quotidien.

Salma Hayek Pinault : « Ils doivent vous voir forte dans votre maison. »

Lisa Azuelos : « Un docteur m’a sauvé la vie, et je me demandais « comment je peux être une bonne mère ? », et il m’a répondu : « Une bonne mère est une femme heureuse. ».

Zainab Salbi : « L’homme doit être conscient. »

Salma Hayek Pinault : « L’estime de soi est très importante. (…) Si vous vous respectez, (…) si vous ne vous diminuez pas, (…) si vous agissez avec gentillesse et amour, vous recevrez beaucoup, et le challenge sera de ne pas les laisser vous utiliser. »

Zainab Salbi : « J’ai été mariée de force, violée par mon mari. C’est facile de se considérer comme une victime, mais le plus gros travail est de se dire : où me suis-je trahie ? (…) Quand avons-nous permis à cela d’avoir lieu ? »

Su-Mei Thompson : « Les hommes peuvent s’investir, (…) nous pouvons avoir des alliés hommes. (…) Dans l’éducation d’un garçon, il ne peut que y avoir la mère, il doit entendre son père. (…) Nous pensons que nous devons être des Superman tout le temps, (…) et nous devons leur montrer qu’un homme doit être fait de force et de vulnérabilité. »

« Hollywood vous a-t-il utilisé ? », questionna un journaliste à la cinéaste-actrice-productrice mexicaine. Ce à quoi elle répondit : « I think we used each other. They used me? No. They used me, but I said ‘ok ok let’s go » « Je pense qu’on s’est utilisé l’un et l’autre. »  Salma Hayek

« C’était soit la servante, soit la fille sexy. (…) Je savais que je n’étais pas que sexy. Il fallait changer d’esprit (…) Si je m’habille avec un décolleté, ce n’est pas parce que je veux être touchée, mais pourquoi n’aurais-je pas le droit de me faire belle ? Il faut leur faire comprendre qu’ils ne peuvent pas interagir avec ça. (…) Ce n’est pas comme au marché, et en même temps, vous devez avoir de la joie, un sens de l’humour, célébrer ce que vous êtes, chaque petite part de votre personne. (…) Vous devez trouver le chemin que vous aimez. Tous les hommes sont des enfants. Et parfois vous devez abaisser votre force et vous tenir la main. Sinon, vous avanceriez, et vous tueriez. (…) Nous voulons nous aimer, nous voulons nous respecter. Et le plus important est que vous ne tombiez pas de l’autre côté. »

            Nous terminerons notre retranscription du Talk Women in Motion sur cette phrase amusante de la brillante Salma Hayek – les autres l’étant tout autant bien sûr : « Je pense que j’ai envie de parler mais j’ai trop parlé ! ». La conférence toucha alors à sa fin. N’hésitez pas à soutenir chacune de ces femmes courageuses et guerrières via leurs organisations respectives, des événements, ou encore un simple #Sheobjects sur Instagram et Twitter pour soutenir la fondation et le travail de Su-Mei Thompson.