Fange et Vic, Mackey des Anges
Los Angeles, commissariat de Farmington. « The Barn ». Ses bons éléments, ses brebis galeuses. Ses coups de filets, ses coups fumants aussi. Gangs, trafic de drogue, prostitution, tueurs en série, violeurs, indics, interrogatoires, perquisitions, interventions musclées, magouilles politiques et autres arrangements entre mafias ou cartel et quelques membres de la police. Et une chasse aux sorcières qui commence au sein même du commissariat, après que Mackey et les siens se soient aventurés en terrain boueux…, plus glissant qu’à l’accoutumée tout du moins. Vaguement inspiré par une affaire de corruption au sein du LAPD, The Shield, c’est avant tout une ville, une multitude d’enquêtes et d’embrouilles. Tout un programme.
La fin justifie-t-elle les moyens ? Un dérapage, un con trop laid: Vic Mackey « on top of the world ». Pour toujours ? Michael Chiklis plus crédible que quiconque en leader de la « Strike Team », brigade de choc en lutte (?) contre les gangs et la drogue. Expéditif comme personne, et efficace, mais à quel prix ? Une descente, pas forcément celle que l’on croit. Un goulot, pas forcément celui que l’on croit. Heureusement, l’homme a de la bouteille, et il est aidé par trois gaillards ralliés à sa cause: Shane Vendrell, son disciple impulsif, parfois incontrôlable (Walton Goggins impressionnant). Une relation très forte. Curtis Lemansky dit « Lem », sans doute le plus sensible et humain au début de l’aventure (Kenny Johnson impeccable et touchant), et enfin Ronnie Gardocki, le plus discret (David Rees Snell sobre mais bel et bien présent).
Ce qui frappe d’emblée, outre l’aspect visuel brut de décoffrage et la qualité d’interprétation, c’est la manière dont la série de Shawn Ryan joue avec nos émotions. Vous détestez un personnage dès le début de la première saison ? Sachez que vous risquez de l’adorer par la suite. L’inverse est valable également. Les motivations de chacun sont telles qu’il est difficile de ne pas s’attacher à tel ou tel personnage, voire à tout le cast. A un moment donné, tout le monde se retrouve devant un, voire plusieurs choix difficiles. Une décision et ses conséquences, pour l’intéressé comme pour son entourage. Car dans « The Shield », il y a aussi une vie en dehors du commissariat. Parfois, la situation est désespérée et entraîne une action extrême, on se dit alors que l’on vient de consommer le divorce avec ledit personnage. Souvent, on se trompe.
Pas d’introduction à chaque épisode, à peine un jingle. Un générique de fin brutal, fait de cris et de riffs ravageurs, couplés à des sonorités hip hop. La rue, la violence, simple, direct (dans la face), tout y est. Au fil des saisons, légèrement inégales mais de haute tenue quoiqu’il en soit, l’on se rend compte du remarquable travail au niveau de l’écriture. Les événements s’imbriquent parfaitement. Les premières saisons construisent, les trois dernières détruisent. Elles s’enchaînent à vive allure vers un chaos et une noirceur sans pareil. Il est juste regrettable de voir venir l’un des éléments clés de l’intrigue à des kilomètres, mais inutile d’en dire plus, on pardonne volontiers, et pour cause: même en m’attendant à la suite des événements, l’impact a été tout aussi fort, car superbement amené et mis en scène, sans concessions.
Enfin, il y a tant de choses à dire sur la distribution. Tout au long de la série, on découvre de nouvelles facettes de la personnalité des différents protagonistes. La Strike Team d’une part, chaque membre de l’équipe prenant de l’importance à un instant du récit. Outre la percutante équipe de Mackey, que dire du duo Wyms/Wagenbach (magnifiques CCH Pounder et Jay Karnes), du Capitaine Rowling (Glenn Close au poil), de Kavanaugh (Forest Whitaker impérial), d’Antwon Mitchell (étonnant Anthony Anderson), d’Aceveda, de Julien, de Danny, d’Olivia Murray, de Gilroy, de Billings, sans parler des différentes familles (Corrine, Mara, Cassidy, l’actrice interprétant cette dernière étant la véritable fille de Michael Chiklis), des représentants des différents gangs, des rôles secondaires (dont une apparition de Carl « Apollo Creed » Weathers notamment) ? Un sans-faute, tout simplement.
Plier 7 saisons, soit 88 épisodes, en moins de trois semaines (dont une entièrement dédiée à la seule première saison), c’est un signe qui ne trompe pas. The Shield est un incontournable de la série télé. Au-delà des nombreuses qualités énumérées plus haut, il faut dire qu’elle a tout de même l’audace de nous proposer le sosie de Philippe Etchebest avec un badge, sur un plateau: un « Cauchemar en résine », cela ne se refuse pas.
Synopsis: Pour rétablir l’ordre dans les quartiers sensibles de Los Angeles, une brigade de police met en œuvre des méthodes expéditives, multipliant les abus au mépris des dommages collatéraux.
Fiche Technique: The Shield
Années: 2002-2008 (7 saisons – 88 épisodes)
Création: Shawn Ryan
Distribution: Michael Chiklis, Walton Goggins, Kenny Johnson, David Rees Snell, CCH Pounder, Jay Karnes, Benito Martinez, Catherine Dent, Michael Jace, Autumn Chiklis, Glenn Close, Forest Whitaker, Anthony Anderson…
Production: 20th Century Fox Television
Producteur: Michael Chiklis
Producteurs délégués: Shawn Ryan, Scott Brazil, Glen Mazzara
Scénaristes: Shawn Ryan, Kurt Sutter, Glen Mazzara, James Manos Jr, Scott Rosenbaum…
Photographie: Rohn Schmidt
Auteur de la critique: Sébastien