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L’Insulte de Ziad Doueiri : procès de quartier aux tournures nationales

Si les films judiciaires sont nombreux dans le cinéma mondial, avec L’Insulte, Ziad Doueiri nous passionne pour un procès de quartier bien plus complexe qu’il n’y parait.

Synopsis : À Beyrouth, de nos jours, une insulte qui dégénère conduit Toni et Yasser devant les tribunaux. De blessures secrètes en révélations, l’affrontement des avocats porte le Liban au bord de l’explosion sociale…

4ème long-métrage et retour au Liban pour Ziad Doueiri, réalisateur de Baron Noir, très prochainement de retour sur nos écrans pour la saison 2.
Avec L’insulte, le réalisateur nous propose un nouveau film de procès, sujet ayant déjà été exploré par de très nombreux réalisateurs, avec plus ou moins de réussite.
L’accusé, Yasser, est réfugié libanais et ouvrier. Toni, le plaignant, est un chrétien libanais, tranquillement installé avec sa femme enceinte dans un appartement, où la gouttière pose problème. Ainsi, L’insulte ne se borde pas à un simple film juridique mais soulève également de nombreuses questions sur la cohabitation au Liban, sur les actions d’Ariel Sharon, ou sur la légitimité de la Palestine. L’antisémitisme ainsi que la xénophobie prennent une place à part entière dans L’insulte, mais toujours sous un angle critique. Sans tabou, le réalisateur nous fait voir comment le conflit est abordé au cœur de la population libanaise. Toutefois, il ne prend pas parti, même si des propos peuvent choquer. Les deux partis sont représentés de manière identique. On perçoit l’importance de la cohabitation au Liban pour Ziad Doueiri.
C’est en cela que le scénario est plus que bien construit et bien plus complexe qu’il n’en a l’air. La qualité des dialogues, l’intensité du récit et le très peu de temps morts font de ce long-métrage une œuvre palpitante et haletante. Le spectateur devient public du procès et se forge, malgré lui, une opinion, quitte à être déçu lorsque le verdict tombe. Impossible de rester de marbre face à une telle intrigue.

Mais si L’insulte est une excellente surprise de ce début d’année 2018, c’est grâce à son casting, où il n’y aucune faute note. Une chose est sûre : Kamel El Basha n’a pas volé sa Coupe Volpi de la meilleure interprétation masculine lors de la Mostra de Venise 2017, même s’il aurait pu aisément la partager avec Adel Karam qui vient compléter avec brio le duo principal.
Que ce soient Camille Salameh, avocat de Toni, ou Diamand Bou Abboud, avocate de Yasser, ils laissent le spectateur pantois tant il sont crédibles, à la fois autoritaires et étonnamment humains, avec des relations exiguës qu’il est bon de ne pas dévoiler. La mise en scène de Ziad Doueiri est réfléchie et maitrisée, en adéquation avec le peu de lieux qui composent son film. Et si les acteurs nous apparaissent comme si impressionnants, c’est par les choix techniques et esthétiques du réalisateur. Les gros plans sont extrêmement nombreux et l’intimité des protagoniste nous est dévoilée. Aucun artifice dans la progression de ce procès, presque tout nous est montré. Le spectateur évolue en même temps que les personnages, et aucun détail ne lui est épargné. D’où le principe de témoin du procès évoqué précédemment.

S’il fallait relever un défaut au film, ce serait sans doute sa longueur. Le film aurait gagné en puissance s’il avait été plus court d’un quart d’heure. Certaines scènes peuvent apparaître comme superflues ou redondantes.

Avec L’Insulte, cette fin de janvier 2018 est marquée par un film coup de poing, auquel on ne s’intéresserait pourtant pas forcément. En espérant que la saison 2 de Baron Noir soit à la hauteur de ce long-métrage.

L’Insulte : Bande-annonce

L’Insulte : Fiche technique

Titre original : Qadiat raqm 23
Réalisation : Ziad Doueiri
Scénario : Ziad Doueira, Joelle Touma
Interprétation : Adel Karam, Kamel El Basha, Rita Hayek, Christine Choueiri, Diamand Bou Abboud, Camille Salameh…
Montage : Dominique Marcombe
Musique : Eric Neveux
Récompenses : Coupe Volpi de la meilleure interprétation masculine
Producteurs : Rachid Bouchareb, Jean Bréhat, Julie Gayet, Antoun Sehnaoui, Nadia Turincev
Société de production : Tessalit Productions, Ezekiel Film Production
Distributeur : Diaphana Distribution
Durée : 112 minutes
Genre : Drame
Date de sortie : 31 janvier 2018

Liban, France, Chypre, Belgique – 2018