Il existe autant de raisons de se détester que de s’aimer. Ce mélodrame porte en lui cet optimisme, avec une grande sincérité et une tendresse bouleversante, car au fond, son auteur ne demande rien de plus qu’à conter Une Histoire d’amour, dans la joie et la mélancolie.
« Comment l’amour peut finir ? » Alexis Michalik nous pose la question à travers l’adaptation de sa propre pièce, à l’image d’Edmond, qui a aussi bien triomphé sur scène qu’à l’écran. Ce retour inattendu derrière la caméra confirme néanmoins les ambitions d’un cinéaste, qui a le regard subtil sur ses personnages tourmentés, sans négliger sa narration, d’une grande fluidité.
Et pourtant…
L’amour naît d’une pensée, d’une pulsion, d’un désir ou encore d’un coup de foudre. C’est dans ce contexte que l’on va accompagner Katia (Juliette Delacroix), qui a du mal à se mettre en mouvement, car cette dernière est en décalage avec son monde. Son frère aîné William, campé par Michalik, ne manque pas de le lui rappeler, sachant sa tendance à saboter ses relations sentimentales ou amicales. Sa peur se lit aussi bien dans un traumatisme de jeunesse que dans un fantasme qu’elle s’interdit par principe. Il fallait donc cette étincelle, qu’est Justine, et son inhibiteur d’angoisse qu’est sa générosité, pour enfin transformer l’expérience en un début d’histoire.
À partir de cet instant, une osmose parfaite d’une vie qui fait oublier la mort, on s’attache à ces femmes, fortes et libres de s’aimer. Rien de foncièrement original dans les faits, car la plupart des comédies romantiques auraient bouclé leur développement sur ce nuage de bonheurs, sans concession. Malheureusement, la réalité est tout autre. Ce récit a vocation de nous rapprocher de nous-mêmes, en nous identifiant aux souffrances des personnages, qui vont toucher le fond. C’est là que réside toute la force du long-métrage, à la recherche de l’humain et de l’intime.
…je n’aime que toi
Quand il ne reste plus que la désillusion et la solitude comme issue, les âmes perdues entrent en collision. Et pourtant, on ne sentira pas la détresse escomptée du côté de Katia, élevant seule sa fille, Jeanne (Léontine d’Oncieu), née d’un amour fort et véritable. Douée pour son âge, l’adolescente ne laisse pourtant pas transparaitre une certaine douleur face à la destinée de sa mère, dont elle doit déjà préparer le deuil. Il n’y a donc plus d’autre refuge que dans le soutien fraternel de William, qui passe étonnamment au premier plan. Le nouveau duo qu’il forme avec sa nièce vient alors approfondir le lien qui les unit, alors que tout les opposerait presque. Lorsque ce dernier est perdu dans son esprit, Jeanne lui tombe dessus comme une épine dans le pied et comme un échec de plus à anticiper.
Chacun tire malgré tout l’autre vers le haut à sa façon et cette bienveillance transpire dans une mise en scène humble, où les comédiens originaux de la pièce rayonnent indéniablement. Ce sont toutes les oppositions et les étonnantes complémentarités qui rendent ce voyage sentimental merveilleux et bouleversant. La justesse est dans le jeu, mais également dans le fabuleux travail du rythme, avec des ellipses invisibles, à l’aura quasi surréaliste, reposant ainsi sur une articulation onirique et sur près d’une heure et demie de rires et de larmes.
« Quand il n’y a plus d’amour, après un deuil, une séparation, est-ce que l’amour survit quand même, malgré tout ? » La vérité peut prendre de nombreuses formes dans cette intrigue, qui rend hommage aux miracles et qui se trouvent être au cœur des bouquins qu’écrivent ou lisent certains des protagonistes. Le portrait de la vie selon Alexis Michalik se lit ainsi, dans Une Histoire d’amour parmi tant d’autres, où chacun s’y retrouve dans l’amour qu’il dégage, qu’il donne, qu’il partage, qu’il redoute, qu’il oublie ou qu’il reprend. C’est pourquoi le film affirme poétiquement que l’amour est à la fois un langage personnel et un remède à toute épreuve.
Bande-annonce : Une Histoire d’amour
Fiche technique : Une Histoire d’amour
Réalisation & Scénario : Alexis Michalik
Photographie : Marie Spencer
Son : Marianne Roussy
Décors : Julie Wassef
Maquillage : Véronique Clochepin Lassalle
Costumes : Marion Rebmann
Montage : Sophie Fourdrinoy
Production : Acmé Films, Full Dawa Films
Pays de production : France
Distribution France : Le Pacte
Durée : 1h30
Genre : Drame
Date de sortie : 12 avril 2023
Synopsis : Katia et Justine tombent amoureuses. Malgré la peur de l’engagement et le regard des autres, elles décident de faire un enfant, laissant le hasard décider de qui le portera. Mais alors que Katia tombe enceinte, Justine la quitte soudainement. 12 ans plus tard, Justine est retournée à une vie rangée et Katia, qui a gardé l’enfant, apprend qu’elle est condamnée. Contrainte de trouver en urgence un tuteur pour sa fille, elle se tourne vers sa seule option : son frère William, écrivain cynique et désabusé…