La Glace et le Ciel, un film de Luc Jacquet: critique

La Glace et le Ciel faisait figure d’évènement au dernier festival de Cannes, puisque pour la première fois un documentaire était projeté en clôture.

Cette semaine le dernier film du réalisateur, oscarisé pour la Marche de l’empereur, est en salle ; à plus d’un mois de la COP21, sa résonance n’en est que plus forte. Si le film promettait des images magnifiques ; il était à craindre que Luc Jacquet se noie dans son propos, en s’enlisant dans un militantisme moralisateur. Et bien sans surprises, la forme et le récit subjuguent, le fond agace. Pour lier les deux : la découverte d’une carrière qui forge l’admiration, celle de Claude Lorius. Le glaciologue qui avait compris avant tout le monde. En effet, il découvre très tôt que le climat est en train de se dérégler, et que l’augmentation de la température sera une catastrophe qui affectera les générations à venir. L’alarme sera sonnée, mais jamais entendu. Parti pour la première fois en antarctique à l’âge de 23 ans, le scientifique y a passé depuis, 10 ans de sa vie. Une décennie là-bas (là-haut ?), au cœur du plus grand désert terrestre. Aujourd’hui âgé de 82 ans, il revient triomphant pour nous souffler un « je vous l’avais bien dit ». Le méritions-nous ? Sûrement.

Entre image d’archives et plans larges époustouflants, Luc Jacquet met en place un dispositif efficace, intelligent assez captivant. Car cette histoire est remarquable, imprégnée de mythes aventureux, à mi chemin entre l’épopée Vernienne et les expéditions de Cousteau.

Le documentaire relate ce souffle pionnier qui a recouvert l’antarctique au lendemain de la seconde guerre mondiale. Quand une fois la paix acquise, l’homme s’est tourné vers des territoires qu’aucun avant lui n’avait foulé, sans carte, sans GPS, sans internet. L’authenticité des images nous emmène au plus près de ces scientifiques, et témoignent de la douleur glaciale dans laquelle ils se sont plongés. Ces terres vierges sont un trésor inestimable pour la compréhension de notre planète, mais le prix à payer pour y cohabiter est lourd de conséquences.

L’antarctique c’est  des températures insoutenables,  un oxygène rare, une banquise stérile, bref une hostilité constante qui ne sera jamais domptée. Et pourtant Claude Lorius semble chez lui dans ses campements improvisés, à forer la glace. Cherchant inlassablement à prouver que l’être humain est en train de dérégler la planète. Une chose qu’il est certes bon de rappeler à l’heure où le climatosceptisme se médiatise. La leçon aurait pu s’arrêter là. Pourquoi surcharger les images avec cette voix off qui récite son élégie ? Pourquoi prophétiser à ce point Claude Lorius ?

Un manque de délicatesse dans le texte qui nous laisse un goût amère au moment de clore le film. Alors évidemment, il était difficile d’en faire autrement, l’histoire narrée ne pouvait que tourner en fable écologique, puisque c’est ce qu’elle est. Luc Jacquet avait fait le travail nécessaire, pour nous emmener sur le pôle sud, avec des plans contemplatifs saisissants de ce continent meurtri : le sous-texte était fort, l’explicite plus futile. Mais cette partie reste concentrée sur la conclusion ; la majorité du film poursuit les années et les découvertes, un coup avec les Ricains, un coup avec les Sovièts. Un cheminement aux airs épiques et intimes qui grave l’engagement d’une vie, et qui valait la peine d’être porté à l’écran.

Synopsis: Luc Jacquet met en scène l’aventure de Claude Lorius, parti en 1957 étudier les glaces de l’Antarctique. Il nous raconte l’histoire d’une vie extraordinaire de science et d’aventure, consacrée à percer au plus profond des glaces de l’Antarctique les secrets bien gardés du climat.

Fiche technique: La Glace et le Ciel

Réalisateur: Luc Jacquet
Scénario: Luc Jacquet
Acteurs: Claude Lorius
Photographie : Stéphane Martin
Musique: Cyrille Aufort
Montage: Stéphane Mazalaigue
Producteur: Richard Grandpierre
Distributeur: Pathé/ Wild Bunch
Origine: France
Genre: documentaire
Durée: 1h29
Date de sortie: 21 octobre 2015

Rédacteur LeMagduCiné