interview-attache-de-presse-litteraire
Crédit : ElasticComputeFarm / Pixabay

En bref : « Les 100 plus grands joueurs de foot des années 2000 à aujourd’hui », « Au coeur des terres ensorcelées », « Don Juan » et « Thellus »

Jonathan Fanara Responsable des pages Littérature, Essais & Bandes dessinées et des actualités DVD/bluray

Retour sur plusieurs sorties récentes. Au programme : Les 100 plus grands joueurs de foot des années 2000 à aujourd’hui, Au coeur des terres ensorcelées, le second tome de Don Juan et Thellus : Le Cycle d’Eva Samas.

Les-100-plus-grands-joueurs-de-foot-des-annees-2000-a-aujourd-hui-avisLes 100 plus grands joueurs de foot des années 2000 à aujourd’hui. Dans son ouvrage Les 100 plus grands joueurs de foot des années 2000 à aujourd’hui, Jens Dreisbach rend un hommage passionné aux footballeurs qui ont marqué l’ère moderne. Publié par les éditions L’Imprévu, ce recueil de portraits brefs et vivants retrace les exploits et les personnalités de certaines icônes du ballon rond, de Lionel Messi à Paul Pogba en passant par Arjen Robben, Manuel Neuer ou Cristiano Ronaldo. L’auteur ne prétend pas à l’exhaustivité : il évoque quelques moments inoubliables associés à ces artistes, qui se sont distingués lors de Coupes du monde, de championnats européens ou de coupes continentales, dont la fameuse Ligue des Champions. Les lecteurs apprécieront le ton léger, divertissant, des textes, qui favorisent l’anecdote plus que l’analyse, dans des pages très joliment illustrées. Les présentations sont courtes mais percutantes, même si quelques faiblesses doivent également être notées. Ainsi, la traduction n’est pas sans scories, nuisant parfois légèrement à l’appréciation du texte (cf. Mats Hummels ou Thomas Müller). De plus, la sélection des joueurs peut – comme souvent – prêter à discussion, avec des omissions regrettables et des choix parfois surprenants. L’ouvrage n’en demeure pas moins intéressant pour quiconque s’intéresse à la redéfinition du libéro moderne par un gardien de but, à l’interprétation de l’espace par des milieux de terrain ou aux exploits techniques d’ailiers virevoltants.

Les 100 plus grands joueurs de foot des années 2000 à aujourd’hui, Jens Dreisbach
L’Imprévu, mai 2024, 160 pages

Au-coeur-des-terres-ensorcelees-avisAu coeur des terres ensorcelées. Dans Au cœur des terres ensorcelées, Maria Surducan nous invite à redécouvrir les légendes slaves à travers un conte initiatique illustré avec maestria. Dès les premières pages, le lecteur est émerveillé par la technique de la « carte à gratter » utilisée par la scénariste et dessinatrice, un choix artistique fort, qui enrichit chaque scène d’une texture visuelle bien distinctive. Le conte puise dans le riche réservoir des légendes roumaines et hongroises, territoires mythiques peuplés de créatures magiques et de magiciens métamorphes. La trame narrative suit le jeune héros dans sa quête des pommes d’or, symboles de pouvoir, tout en tissant des liens avec les thèmes plus contemporains, mais aussi liés à la trahison et aux rivalités familiales. On notera également l’intégration de personnages féminins forts et une critique subtile des dynamiques de pouvoir, ce qui donne de la chair à l’ensemble. La manière dont Maria Surducan entrelace les luttes internes des personnages avec les grands affrontements mythologiques crée un récit à la fois intime et épique. Au cœur des terres ensorcelées est une œuvre remarquable qui allie beauté visuelle et richesse narrative, célébrant la capacité des histoires à traverser le temps et à évoluer tout en restant fidèles à leur essence.

Au coeur des terres ensorcelées, Maria Surducan
Aventuriers d’ailleurs, mai 2024, 96 pages

Don-Juan-Tome-02-avisDon Juan (T.02) : L’Invité de pierre. Dans ce second tome, Didier Poli, Clotilde Bruneau, Luc Ferry et Diego Oddi nous invitent à sonder le destin de leur protagoniste. Le contexte narratif est particulièrement dense : Don Juan, séducteur impitoyable, incarne l’archétype du libertin amoral, prenant plaisir à semer la souffrance pour son seul plaisir immédiat, transgressant par là les normes éthiques et sociales les plus élémentaires. L’histoire prend cependant une tournure dramatique pour cet antihéros lorsqu’après avoir mortellement blessé le père de Dona Ana – une défense vaine de l’honneur familial –, il s’échappe vers Dos Hermanas. Là, malgré l’imminence d’une union matrimoniale, il ne résiste pas à la tentation de séduire Aminta, témoignant ainsi à nouveau de sa nature égoïste et destructrice. Cependant, la trame narrative de ce second tome atteint son paroxysme lorsque le spectre du père défunt de Dona Ana vient réclamer justice sous la forme d’une statue de pierre, invitant Don Juan à un ultime rendez-vous qui scellera son destin. Plus que jamais, Don Juan est dépeint comme un homme au narcissisme exacerbé, symbole ultime de l’hybris qui défie aussi bien la morale terrestre que céleste, jusqu’à ce que la justice divine, inévitable et impérieuse, le rattrape. L’approche narrative choisie par les auteurs permet de mettre en lumière la perdition inéluctable d’un homme qui, par ses actions déréglées et son mépris des conséquences, incarne la figure du démiurge moderne qui se croit au-dessus des lois communes. Le diptyque ne se contente toutefois pas d’explorer la débauche et la chute d’un homme ; il interroge les fondements de la moralité et les limites de la transgression. Don Juan est ainsi représenté non seulement comme un séducteur, mais également comme un personnage emblématique de la démesure humaine.

Don Juan (T.02), Didier Poli, Clotilde Bruneau, Luc Ferry et Diego Oddi
Glénat, avril 2024, 48 pages

Thellus-Le-Cycle-d-Eva-Samas-Tome-01-avisThellus : Le Cycle d’Eva Samas. Le panorama de la bande dessinée de science-fiction est à tout le moins prolifique. Avec Thellus: Le Cycle d’Eva Samas, Simona Mogavino et Carlos Gomez se distinguent toutefois par leur capacité à tisser une trame narrative à la fois dense (voire alambiquée) et haletante. Au cœur d’un univers impitoyable où le vieillissement est banni et le destin scellé à l’aube du cinquantième anniversaire, cette œuvre interroge les abysses de la condition humaine face à l’oppression et la quête de liberté. Eva, protagoniste, voit son périple marqué par des rencontres fortuites et des révélations perturbatrices. Elle s’inscrit dans une structure classique de l’épopée : interactions avec le peuple du serpent, découverte d’un ancien vaisseau spatial devenu prison, etc. Le récit s’enrichit d’une dimension presque archéologique, explorant les strates du passé pour révéler les clefs de l’avenir. Thellus ne se contente pas d’explorer des thèmes éculés, puisqu’il les renouvelle en interrogeant les notions de tyrannie et d’émancipation, de sacrifice et d’espoir, dans un style qui conjugue la précision du détail visuel à la profondeur des enjeux dramatiques. Cet univers s’étend sur deux cycles qui paraissent concomitamment, puisque Kad Moon donne le change à Eva Samas. Ici, Simona Mogavino et Carlos Gomez posent en tout cas les fondations d’une mythologie foisonnante, finement encrée et caractérisée par un bestiaire riche.

Thellus : Le Cycle d’Eva Samas, Simona Mogavino et Carlos Gomez
Glénat, mai 2024, 56 pages

[justwatch_list]
Responsable des pages Littérature, Essais & Bandes dessinées et des actualités DVD/bluray