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Daei / Le Chat qui fume

Daimajin/Majin : la trilogie en Blu-ray et DVD chez Le Chat qui fume

Retour sur la trilogie japonaise Daimajin/Majin, dont les récits mêlant jidai-geki (métrage d’époque), chanbara (film de sabre) et kaiju-eiga (cinéma de monstre) reviennent nous en mettre plein les mirettes et le coeur avec une somptueuse édition Blu-ray & DVD signée Le Chat qui fume.

Synopsis : Dans chacun de ces films, Daimajin, un géant de pierre haut de vingt mètres, vient aider des villageois opprimés par un seigneur tyrannique. Sorte d’équivalence au Golem issu de la mythologie juive, Daimajin (traduction littérale : “Grand Démon”) est une divinité de pierre endormie, ne se réveillant que pour porter secours au peuple et châtier l’oppresseur. Et ce dernier, qu’il soit chambellan ou monarque, peut alors trembler, car la vengeance de Daimajin n’a aucune limite ! 

Daimajin/Majin : émotion et savoir-faire

Deux éléments ressortent de l’expérience de la trilogie Daimajin/Majin, l’émotion et l’émerveillement. Ces deux notions croissent en nous grâce aux spécificités de ce kaiju-eiga qui alla à contre-courant des franchises stars Godzilla et Gamera. Les Majin mêlent différents genres – le monstre, les sabres, le film d’époque, la tragédie – en de riches récits d’aventure qui, à l’inverse des autres modèles du genre de l’époque, prennent le temps de poser les personnages, les enjeux et les points de vue pour mieux nous investir émotionnellement dans leurs parcours de souffrance et d’invocation du fameux Majin qui, une fois arrivé, délivrera nos héros, réparera les injustices et passionnera ainsi nos cœurs et nos regards. Notons qu’une telle expérience fut rendue possible grâce à une formidable réunion de talents et de savoir-faire tous présents sur les trois métrages respectivement dirigés par Kimiyoshi Yasuda (la série de films Zatoichi), Kenji Misumi (Zatoichi encore, la trilogie du Sabre, la saga Baby Cart) et Kazuo Mori (Zatoichi toujours, Le Silencieux).

Concernant les parcours des personnages, le premier film tient de la saga mythologique avec des enfants de bons régents assassinés, alors en fuite et cachés en attendant leur retour dans de meilleures circonstances qui seront supportées par l’esprit d’un démon enfermé dans une statue de dieu guerrier et qui, face aux injustices et à l’amoralité à son apogée, sortira de son sommeil pour répandre violemment la justice. Le deuxième volet, Le Retour de Majin, tient du film d’aventure dans lequel un clan de vilains décide de prendre le contrôle des territoires de deux autres clans respectueux de leurs sujets, de leurs espaces et bien sûr de leur dieu, notre Majin ici disposé sur une île. Divers héros en fuite tenteront de survivre et résister tandis que le peuple souffrira de plus en plus. Bien sûr, le Majin, ému par toute cette souffrance, décide alors que coule la larme d’une de ses adeptes, de répondre à l’appel du devoir et viendra rétablir l’équilibre des forces en détruisant le chef des bandits et en mettant en déroute toute son armée. Enfin Le Combat final de Majin tient d’un récit initiatique pour de jeunes enfants qui vont devoir se dépasser pour sauver leurs pères prisonniers d’un tyran fabricant de poudre à canon. Empreint d’une certaine fibre Tolkien-ienne (comme le note Fabien Mauro dans son bonus), ce troisième volet s’avère plus émouvant de par son attachement au point de vue de chacun des enfants et du groupe unique et uni qu’ils forment.

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Quand tout semble perdu, l’espoir réside toujours dans le Daimajin (Démon Géant).
Daei / Le Chat qui fume

Concernant l’émerveillement face au Majin, s’il est bien sûr en partie dû la construction narrative le présentant en soupirs, en mystères, en action passive puis directement active dans des situations qui semblaient sans espoir, il faut dire à quel point la trilogie a bénéficié d’un savoir-faire formidablement malin concernant la conception de ses phases d’action. En effet, après avoir regardé de nombreux films de kaiju, le directeur de la photographie et le responsable des effets visuels, qui avaient la volonté de proposer une nouvelle imagerie du genre, ont remarqué que les séquences à effets spéciaux – ou images du monstre – étaient réalisées par une autre équipe que celle des scènes dramatiques. Ils ont pu noter cela de par la différence d’éclairage, d’étalonnage, et de par un montage trahissant le manque d’interactions entre les différents plans. Ainsi le directeur de la photographie travailla sur l’ensemble des tournages en collaboration avec le responsable des effets spéciaux pour concevoir un film visuellement uni et un film de kaiju plus tangible que jamais grâce à des interactions nombreuses entre le démon géant, les bâtiments et les hommes.

Pour atteindre un tel degré de puissance d’évocation et d’efficacité, le Majin dut toutefois avoir une taille réduite à dix mètres contre les cinquante de Godzilla. Aussi la créature change de faciès une fois éveillé pour révéler des yeux humains emplis de colère divine derrière un masque de guerrier inspiré par le visage de Kirk Douglas. Cela permit notamment de mettre en scène le géant – et l’acteur-cascadeur au regard expressif à l’intérieur – dans un décor de maquettes beaucoup plus grandes et donc plus précises. La taille modeste du géant permet aussi davantage d’interactions avec la construction d’un Majin en taille réelle dont les différents éléments pouvaient être utilisés dans des décors réels : une main saisissant l’ennemi, un pied en écrasant un autre, par exemple. Autant d’idées qui vont permettre d’assurer un spectacle total lors des apparitions du Majin, ce monstre star de formidables récits d’aventures qui ont su éviter de surexploiter leur créature.

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Spectacle total avec le Daimajin, ici dans Le Retour de Majin.
Daei – Le Chat qui fume

Daimajin/Majin – la trilogie : une édition Blu-ray divine

La fameuse trilogie de la Daei fait son retour vidéo avec une excellente édition Blu-ray (& DVD) signée Le Chat qui fume. Du côté du son, en japonais sous-titré français, peu à redire. En effet, les pistes sont efficaces, tant du côté des effets sonores que de la bande originale musicale, même si une forme d’étouffement semble accompagner plusieurs dialogues. Quant à l’aspect visuel, les trois masters HD encodés sur deux disques Blu-ray présentent un formidable rendu vidéo. Unis par la photographie de Fujio Morita tant sur les prises de vue avec acteurs que les séquences à effets spéciaux dirigées par Yoshiyuki Kuroda, les trois films et leurs masters constituent une œuvre techniquement et visuellement brillante dont la constance qualitative est valorisée par les Blu-ray édités par Le Chat qui fume grâce une gestion du grain, une définition et un rendu colorimétrique de facture excellente et égale sur tous les films. On pourrait juste regretter la présence plus ou moins importante du grain lors de scènes nocturnes ainsi qu’un manque de profondeur concernant les tons sombres de ces mêmes scènes dont les noirs ont tendance à grisonner.

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Gare à la colère du Majin.
Daei / Le Chat qui fume

Pour compléter l’expérience, quelques conséquents bonus ont été mis à disposition. On trouve la bande-annonce de chaque film en HD. On questionne toutefois la haute définition du fichier source tant des passages sont pixellisés. Arrive ensuite le module de quarante minutes, MAJIN par Fabien Mauro, dans lequel l’ex-auteur de Mad Movies et spécialiste du kaiju-eiga revient sur l’après-guerre de la Daei (dont l’après période propagandiste), ses grandes dates et sa période d’exploitation du genre du kaiju-eiga avec la sortie d’un film avec des rats géants et surtout la révélation en 1965 d’une créature concurrente de Godzilla (produite par la Toho) nommée Gamera. S’en suivra ensuite la conception efficace (en un an tout de même) et intelligente (relire ci-dessus les anecdotes de sa fabrication) d’une trilogie à succès nommée Daimajin/Majin. Une trilogie qui a d’ailleurs réussi à ne pas se perdre dans les limbes de la surexploitation de son concept, à l’inverse de ses concurrents chez la Toho. On aurait apprécié avoir le nom des titres des films cités dans les deux modules, même si le fait que Fabien Mauro s’avère bien plus précis que Fathi Beddiar en termes de dates et de présentation des métrages permet de s’y retrouver correctement. Justement, on note enfin dans le très beau coffret décoré par les affiches des films un autre très riche module nommé Un homme et des dieux. Son présentateur, Fathi Beddiar, revient tout en densité sur la carrière de Chikara Hashimoto connu sous le nom de Riki Hashimoto, l’interprète du géant Majin. De sa carrière de grand joueur de baseball à sa retraite toute en discrétion en n’oubliant pas les anecdotes de tournage de la trilogie Majin ainsi que sa relation de travail avec Bruce Lee dans La Fureur de Vaincre (dans lequel il campe un antagoniste de Lee), nous sommes entrainés et passionnés par cette filmographie de l’ombre contée par l’ancien rédacteur de Mad Movies et spécialiste du cinéma de genre même si, comme noté plus haut, quelques dates manquent d’être évoqués, de même qu’il aurait été intéressant de pouvoir lire les titres.

Ainsi la trilogie Daimajin/Majin fait un flamboyant retour vidéo grâce au Chat qui fume et son travail soigné sur cette édition Blu-ray et DVD limitée à mille exemplaires. Ne passez pas à côté !

Bande-annonce – Majin (1966)

MAJIN – 1966 – 1h23 – Japon – Réalisé par Kimiyoshi Yasuda

LE RETOUR DE MAJIN – 1966 – 1h18 – Japon – Réalisé par Kenji Misumi

LE DERNIER COMBAT DE MAJIN – 1966 – 1h27 – Japon – Réalisé par Kazuo Mori

majin-daimajin-trilogie-visuel-du-coffret-dvd-blu-ray-le-chat-qui-fumeCARACTÉRISTIQUES TECHNIQUES

2 Blu-ray – 1080p HD – 2.35 – 16/9 – Son : Japonais DTS Master Audio 2.0 mono – Sous-titres : Français – 248 minutes – Le Chat qui fume – 2 DVD – Son : Japonais Dolby Digital 2.0

COMPLÉMENTS

° Un homme et des dieux par Fathi Beddiar (42 min)

° MAJIN par Fabien Mauro (40 min)

° Bandes-annonces de chaque film

Sortie le 21 avril 2020 – Limité à 1000 exemplaires – Prix de vente : 45€

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4.5