La 37e édition du Festival International du Film Francophone de Namur a débuté ce vendredi 30 septembre par la projection en ouverture de L’Innocent de Louis Garrel. Au Mag du Ciné, nous sommes accrédités en ligne et ne pouvons donc découvrir qu’une sélection de neuf films des catégories : compétition officielle, compétition première œuvre, les pépites, place au doc belge. Retour sur les premiers visionnages : Petites de Julie Lerat-Gersant (1ere œuvre), Les Grands Seigneurs de Sylvestre Sbille (pépites) , Men of deeds de Paul Negoescu (compétition officielle) et Les Femmes préfèrent en rire de Marie Mandy (doc belge).
Petites de Julie Lerat-Gersant
Avec : Romane Bohringer, Victoire Du Bois, Pili Groyne
Synopsis : Enceinte à 16 ans, Camille se retrouve placée dans un centre maternel par le juge des enfants. Sevrée d’une mère aimante mais toxique, elle se lie d’amitié avec Alison, jeune mère immature, et se débat contre l’autorité de Nadine, une éducatrice aussi passionnée que désillusionnée. Ces rencontres vont bouleverser son destin…
Distributeur : Haut et Court
Petites retrace, en lui collant aux basques, un petit bout de vie de Camille, qui est placée dans un centre maternel alors qu’elle est enceinte à 16 ans. Très proche de sa mère, dont elle va peu à peu se détacher pour mieux avancer, Camille doit faire ses propres choix. L’odyssée est souvent douce et amère à la fois, dans ce centre où des adolescentes tentent de devenir mères, se plantent, essayent encore. Quant à Camille, elle fait le choix assez tôt d’accoucher sous secret. Tout son parcours sera la confirmation de ce choix, ses vacillements et sa réconciliation avec sa propre histoire. Très brut, porté par des interprétations magistrales, Petites se rapproche de la force et de l’intelligence du cinéma adolescent tel qu’avait pu l’être 3xManon. Ecorchées, en quête d’amour, ces petites-là doivent, tout à coup, être mères, un vrai challenge accompagné par des adultes qui font « comme ils peuvent », représentés notamment par l’éducatrice campée par Romane Bohringer, en vive opposition, tant filmée que contrastée, avec la mère de Camille, jeune femme paumée jouée par Victoire Du Bois. S’il n’évite pas toujours les bons sentiments, Petites est porté par une flamme, celle qui consiste à aller de l’avant, et ce, jusque dans sa mise en scène.
Les Grands Seigneurs de Sylvestre Seille
Avec : Renaud Rutten, Damien Gillard, Ben Riga, Sébastien Waroquier
Synopsis :Roger est dans la mouise, mais il va rebondir. Il lui suffit d’obtenir un modique prêt de Monsieur Durieu, son banquier. Mais celui-ci le prend de haut et lui refuse son argent. Humilié, Roger décide de passer à l’action : il kidnappe Durieu et le menotte dans une grange abandonnée. Monsieur Durieu lui propose alors un marché : forcer la salle des coffres de la banque d’en face, celle de son ennemi juré. Les deux hommes fraternisent autour de leur nouvelle cause commune, celle qui pourrait enfin faire d’eux des Grands Seigneurs.
Production : Eklektik Productions, Les Aventuriers, Répliques
Les Grands Seigneurs est présenté dans la catégorie « Pépites » et en est assurément une. Petit bijou d’humour décalé, cette rencontre entre deux hommes est une suite de gags jamais poussifs sur deux types qui tentent de s’en sortir. D’abord très opposés, les deux hommes vont peu à peu fraterniser et c’est alors une histoire d’amitié bancale et touchante qui s’offre à nous. Déjà réalisateur de Je te survivrai en 2012, Sylvestre Sbille propose une nouvelle disparition d’abord suivie puis choisie et une comédie de la débrouille. Mais Les Grands Seigneurs est avant tout un film d’acteurs, de visages qui en disent plus long que les mots et de clowns tristes qui décident de tout changer dans leurs quotidien et surtout de ne pas se laisser abattre. Savoureux.
Men of deeds de Paul Negoescu
Avec : Iulian Postelnicu, Vasile Muraru, Anghel Damian
Synopsis : Ilie est le chef de la police d’un village du nord de la Roumanie, près de la frontière ukrainienne. Entouré d’illégalités, Ilie va bientôt sentir la pression de faire enfin ce qu’il est censé faire depuis des années : protéger les villageois et lutter contre les abus de pouvoir.
Production : Papillon Film
Men of deeds est d’abord l’histoire d’un homme qui veut acheter un verger. Il veut un petit bout de terre à lui, des arbres, et puis ensuite une famille, mais comme il vient de divorcer et va vendre son appartement en ville, rien n’est gagné pour lui et il le paiera au prix fort. Les hommes d’action du titre sont loin d’exister ici, tant la corruption et la terreur font rage et empêchent la quiétude de naître. Quel choix s’offre alors à Ilie de faire son travail de chef de la police, de protéger quand la violence règne ? Dans une infinie douceur pour le contexte (que viennent contraster la scène finale et quelques plans macabres), le film suit ce personnage empêché, dont la conscience s’ouvre. Un homme qui veut pouvoir se regarder en face, mais qui va se perdre aussi. Les personnages sont tour à tour inquiétants, touchants, paumés, mais c’est cette confrontation permanente qui irrigue tout le film. Une confrontation qui ne dit pas son nom. Ilie est toujours en mouvement, pourtant il ne parvient à rien résoudre. Un grand film de désespoir et de lutte. Malgré le pessimisme de son propos, quelqu’un se lève enfin, même trop tard. On est dans un western sans héros, sans sauvetage, balayé de grands paysages abandonnés et de rêves corrompus.
Les Femmes préfèrent en rire de Marie Mandy
Avec : Nicole Ferroni, Farah, Florence Mendez, Constance, Roukiata Ouedraogo, Samia Orosemane, Tania Dutel, Laura Domenge, Alexandra Pizzagali
Synopsis :A l’occasion d’un improbable voyage en train, neuf femmes humoristes et diablement féministes balancent, cognent, mordent, émeuvent. Avec un humour engagé, elles épinglent les travers de notre société machiste. Et quand elles se font insulter ou menacer en retour, elles préfèrent en rire….
Porté par des humoristes percutantes et engagées, le documentaire de Marie Mandy allie parfaitement extraits de spectacles et discours sur leur féminité, leur art par ces femmes qui ne veulent pas être catégorisées « humoristes féminines ». La mise en scène est souvent pétillante, axée sur les insultes reçues par les femmes humoristes sur les réseaux sociaux. Bien décidées à ne pas être emprisonnées par leurs images, les femmes du documentaire parlent déconstruction, combat, féminisme sans qu’ils soient des gros mots ou des concepts vides de sens. Marie Mandy a réalisé de nombreux documentaires – elle a déjà été primée au FiFF Namur il y a tout juste 30 ans ! -, la question des femmes traverse nombre de ses œuvres. Elle traite ce sujet sans en faire une complainte mais en le transformant en un voyage d’émancipation et de réflexion (ici représenté par le train) très salutaire et revigorant !