La 77ème édition du Festival de Cannes s’est ouverte ce mardi en présence de Camille Cottin et du jury présidé par Greta Gerwig. La cérémonie a été suivie par la projection du film Le Deuxième Acte, la nouvelle comédie satirique de Quentin Dupieux.
C’est sous un ciel plutôt nuageux que s’est tenue, ce mardi 14 mai, la cérémonie d’ouverture du Festival de Cannes. Alors que l’ombre d’une grève plane au-dessus de la Croisette, et qu’une inquiétante rumeur autour de dix jeunes personnalités du cinéma français agite internet à l’ère du #MeToo, le climat cannois s’annonce tendu. La récente condamnation à cinq ans de prison, pour collusion contre la sécurité nationale, du cinéaste iranien Mohammad Rasoulof, dont le film The Seed of the Sacred Fig a été sélectionné en compétition, a également jeté un vent froid dans les palmes cannoises. Malgré ce printemps pour le moins troublé, le Festival célébrera le cinéma jusqu’au 25 mai.
Tapis rouge pour le cinéma européen
Cette 77ème édition marque le retour de grands pontes du septième art, comme David Cronenberg, Paul Schrader, Paolo Sorrentino, Jacques Audiard, Yorgos Lanthimos et bien sûr, Francis Ford Coppola, qui n’a pas signé d’oeuvre majeure depuis Tetro en 2009. La présentation de son très attendu Megalopolis, au synopsis intriguant, risque de faire couler beaucoup d’encre sur la Croisette.
Cette année, le Festival révèle aussi la remontée en flèche du cinéma européen, qui représente la majorité des films en compétition pour la Palme d’Or, dont six longs-métrages français : Emilia Perez de Jacques Audiard, The Substance de Coralie Fargeat, Marcello Mio de Christophe Honoré, L‘Amour ouf de Gilles Lellouche, La plus précieuse des marchandises de Michel Hazanavicius et Diamant brut d’Agathe Riedinger. Un panel majoritairement occidental, au sein duquel figurent des oeuvres respectivement chinoise, indienne, ou encore iranienne : Feng Liu Yi Dai de Jia Zhang-Ke, All We Imagine As Light de Payal Kapadia et The Apprentice d’Ali Abbasi.
Sur la vague du #MeToo, la cérémonie d’ouverture a offert un bel hommage à Greta Gerwig, avant de récompenser Meryl Streep d’une Palme d’honneur. En attendant de plonger dans le vertigineux « vortex cannois » décrit par Camille Cottin, revenons sur le film d’ouverture du prolifique Quentin Dupieux.
Le Deuxième acte, acteurs naufragés
Après Fumer fait tousser, présenté en 2022, Quentin Dupieux s’affiche de nouveau à l’ouverture du Festival de Cannes. Dans Yannick, le réalisateur français mettait en scène un spectateur interrompant une pièce de théâtre pour gérer lui-même le show en dirigeant les comédiens. Avec Le Deuxième Acte, Quentin Dupieux dépasse le cadre de la scène en montrant, avec humour et moquerie, les coulisses d’une industrie cinématographique à la dérive. Sous la forme de sketchs successifs, entremêlant fiction et réalité, le film offre des séquences savoureuses qui, à défaut de marquer les esprits, font passer un bon moment en ce début de festival.
Synopsis : Florence veut présenter David, l’homme dont elle est follement amoureuse, à son père Guillaume. Mais David n’est pas attiré par Florence et souhaite s’en débarrasser en la jetant dans les bras de son ami Willy. Les quatre personnages se retrouvent dans un restaurant au milieu de nulle part.
Les quatre protagonistes campés par Léa Seydoux, Louis Garrel, Vincent Lindon, et Raphaël Quenard, fraîchement auréolé du César du meilleur espoir masculin dans Chien de la Casse, se rejoignent sur un plateau de tournage singulier. Dans une sorte de caméra tournage, ils tentent de travailler au sein d’un climat tumultueux où le politiquement correct de la fiction scénaristique s’efface derrière la réalité de leurs dialogues homophobes et outranciers. Quentin Dupieux s’amuse ainsi à parodier la figure de l’acteur en passant en revue tous les tréfonds possibles et imaginables du comédien et du figurant. Dans la parfaite continuité des thèmes abordés lors de la cérémonie d’ouverture, Le Deuxième Acte ne manque pas d’aborder, par ce portrait satirique de quatre acteurs naufragés, le harcèlement sexuel et l’intelligence artificielle. Un film d’ouverture dans l’ère du temps donc, qui ne manque pas d’interpeller le spectateur sur ce qu’il recherche au cinéma.
Comme toujours chez Quentin Dupieux, le burlesque et l’originalité sont au rendez-vous. Difficile de ne pas prendre plaisir à contempler ces quatre acteurs qui se regardent eux-mêmes avec sarcasme. Malgré tout, le film montre plus qu’il n’apporte de véritable propos. De plus, son concept, basé sur une succession de saynètes comiques, s’épuise quelque peu dans la dernière partie. Ceci n’empêche pas le réalisateur français de s’interroger, à travers ses personnages, sur le sens même du cinéma, en allant jusqu’à laisser entendre qu’il ne sert à rien. Précisément, si Le Deuxième Acte n’apporte pas grand-chose en raison du ton auto-dérisoire qu’il adopte sur l’actualité et l’avenir du cinéma, il a eu le mérite de déclencher quelques fous rires sur la Croisette.
Le Deuxième Acte – Bande-annonce
Le Deuxième Acte – Fiche technique
Réalisation : Quentin Dupieux
Scénario : Quentin Dupieux
Casting : Léa Seydoux (Florence), Louis Garrel (David), Vincent Lindon (Guillaume), Raphaël Quenard (Willy)…
Montage : Quentin Dupieux
Photographie : Quentin Dupieux
Producteur : Hugo Sélignac
Société de production : CHI-FOU-MI Productions
Société de distribution : Diaphana Films
Genre : Comédie
Durée : 1h20
France – Sortie le 14 mai 2024